Dans la forêt de basse altitude de St-Philippe, l’humidité est à son maximum. Le soleil parvient difficilement à se frayer un chemin entre les différentes espèces indigènes et endémiques. C’est dans cet écosystème fragile, donc protégé, que se développe le palmiste rouge. Pourtant en s’enfonçant dans la forêt les traces du saccage sont là.
Des troncs coupés et les feuilles laissées sur place. En une matinée, les gardes de l’ONF et du Parc National, en ont dénombré une centaine. « De plus en plus rares en début de forêt, les braconniers montent de plus en plus en altitude pour couper des palmistes », explique Cyril Ducret, garde moniteur au Parc National et également assermenté police de l’environnement. La zone de braconnage s’étale ici de 800 à 1000m d’altitude. Évoluant généralement en binôme, les braconniers peuvent s’emparer de jusqu’à 40 palmistes par personne. La plante est débitée sur place en petits tronçons pour des facilités de transport. Mais une fois coupée, la plante meurt. « Il lui faut une dizaine d’années en forêt pour atteindre une taille exploitable ». Coupée avant qu’elle n’ait donné des graines, la plante devient de plus en plus rare en milieu naturel.
Des déchets laissés sur site
Le braconnage impacte toute la forêt. « Les sentiers marron érodent les sols et créent des ouvertures pour les espèces exotiques envahissantes ». Le palmiste qui peut atteindre 25m de haut et « une espèce structurante » pour la forêt réunionnaise. Ainsi le Phasme du palmiste rouge découvert en 2000 est déjà inscrit sur la Liste rouge nationale des espèces menacées en France. Par l’appât du gain, en plus d’une forêt pillée, les braconniers laissent derrière eux une forêt souillée. Bouteilles, canettes… « les déchets qu’ils laissent après leur passage attirent rats et chats qui s’attaquent aux oiseaux », ajoute Arsène Noël, agent de terrain au Parc National. « La perte est également patrimoniale ». L’espèce a déjà disparu de nombreuses forêts notamment à la Plaine des Palmistes. Il ne reste plus que quelques poches difficiles d’accès.
Les braconniers sont moins nombreux mais plus organisés. Une filière illégale s’est créée en parallèle de la production officielle. « Elle semble fonctionner sur commande pour des restaurateurs et/ou des particuliers, livrés très rapidement, au prix de 7euros le chou contre 10 à 12 euros auprès des cultivateurs » , indique Arsène Noël. Les consommateurs ont le choix. Et pour les aider à faire la différence, l’ONF en charge du contrôle, marque d’un poinçon les choux légalement coupés des exploitations. « La taille est plus importante et la couleur plus uniforme du chou produit chez les agriculteurs permettent également de faire la différence », précise Cyril Ducret.
Disposant du pouvoir d’enquête sur les ventes dans les commerces et auprès des particuliers, le garde moniteur prévient, les braconniers risquent jusqu’à deux ans de prison et 30 000 euros d’amende.