Après Paris en 2005 et Londres en 2011, c’est au tour de la capitale suédoise, Stockholm, d’être en proies à des émeutes urbaines dans sa banlieue, où vit une forte population immigrée, ces cinq dernières nuits.
Cette flambée de violence a débuté dimanche soir dans le quartier de Husby, où 80 % des 11.000 habitants sont des immigrés de première ou deuxième génération.
Selon les médias suédois, ces heurts seraient liés à la mort, le 13 mai, d’un homme de 69 ans abattu par la police alors qu’il brandissait une machette. Les troubles se sont ensuite étendus de Husby à d’autres banlieues pauvres de Stockholm.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, au moins neuf véhicules ont été incendiés et huit personnes ont été interpellées, selon un bilan de la police, vendredi matin.
Jeudi dans la nuit, des pierres ont visé une antenne d’un commissariat de police à Kista, près de Husby, et deux autres antennes dans le sud de la capitale.
Selon des responsables associatifs locaux cités dans la presse, les auteurs des troubles reprochent aux forces de l’ordre leur racisme. Ces derniers accusaient des policiers d’avoir lancé des insultes comme « clochards », « singes » ou « sales nègres ».
Mais, pour Jenny Andersson, chercheuse au CNRS et aux Centre d’études européennes de Sciences Po, le motif racial doit être envisagé avec précaution. « Il n’est pas confirmé que la police a employé des expressions racistes. Ce qu’on sait pour l’instant, c’est qu’un homme de 69 ans a été abattu de plusieurs balles car il était dans un état mental compliqué et qu’il menaçait sa femme et des policiers », précise-t-elle à France 24.
Longtemps vantée pour son modèle d’intégration pacifique et égalitaire, enviée par de nombreux pays européens et en particulier la France, la Suède, après des décennies d’un système fondé sur un Etat-Providence généreux, a vu le rôle de l’Etat fortement diminué dans les années 1990, entraînant la hausse des inégalités la plus forte de tous les pays de l’OCDE.
Au pouvoir depuis octobre 2006, le Premier ministre de centre droit Fredrik Reinfeldt – pour qui les émeutiers sont des « hooligans » – a baissé les impôts et réduit le montant des allocations, des mesures qui ont soutenu la croissance mais creusé les inégalités au sein de la population.
« Le pire vandalisme, ce n’est pas celui auquel nous assistons depuis quelques nuits dans les banlieues », a déclaré un responsable local, Arne Johansson, lors d’une récente manifestation de protestation à Husby. « Le vandalisme, insidieux, rampant, c’est avant tout celui de la politique menée depuis sept ans par ce gouvernement de droite. »
Selon une récente étude gouvernementale, un tiers des jeunes de 16 à 29 ans dans certains quartiers défavorisés des grandes villes sont au chômage et ne suivent pas d’études.
Le journal de gauche Aftonbladet qualifie « d’échec cuisant » les politiques gouvernementales, qui ont, écrit-il, soutenu le développement des ghettos dans les banlieues.
De son côté, l’extrême droite suédoise a dénoncé une politique d’immigration « irresponsable ». Signe des tensions croissantes, les démocrates suédois se classent en troisième place dans les sondages en vue des élections législatives de l’an prochain.