L’égalité comme tout principe ne vaut que par la pratique que l’on en fait, de façon à être en capacité de mesurer sérieusement les manquements ou les consolidations afin de dégager de nouvelles perspectives. Comme pour la liberté et la fraternité, les deux autres piliers de la République, ces pratiques doivent être entretenues. D’où l’importance de la recherche du meilleur chemin possible pour atteindre cet objectif.
C’est le sens qu’il faut donner à l’égalité ; y accoler un adjectif (hier sociale, aujourd’hui réelle), ou jouer sur une de ses composantes comme la continuité territoriale, c’est tout simplement s’en éloigner pour s’installer dans l’ordinaire des tactiques électorales. Il est vrai que pour beaucoup l’important en politique, c’est de gagner les élections, quels que soient les moyens utilisés. L’égalité est un chemin qui passe sur les terres de la démocratie.
Et cette démarche, dans le pas-à-pas, étape après étape, en consolidant les progrès, en comparant les secteurs d’intervention, les territoires, en évaluant les actions entreprises, n’est pas seulement de la responsabilité de l’État, mais aussi de celle des exécutifs locaux et des élus en général, sans oublier les organisations syndicales, si elles sont capables de se dégager de leur corporatisme. Et aussi de celle des citoyens en général ! Ce qui veut dire que les recherches des experts, les visites de ministres et autres délégués nationaux, les propositions des partis ne pourront être valorisées que si de vrais débats et des évaluations indépendantes et régulières se mettent en place. Les outils sont sur la table, dit-on, mais un outil ne vaut que par son usage.
D’où l’indispensable vigilance des citoyens qui sont les mieux placés pour veiller au respect de la justice sociale. Alors, de compromis en compromis et de contrat en contrat, des progrès durables pourront être enregistrés. Il appartient aux forces politiques de proposer une traduction électorale de ce cheminement ! Il leur revient surtout « d’expliquer pour assumer », pour parler comme Michel Rocard.
Dans ce sens, il est clair que le chemin de l’égalité ne passe pas dans les eaux qu’affectionne le système politique local, où, encore plus que dans l’Hexagone, tout tourne autour de la constitution et de la préservation des clans, des réseaux électoraux, alimentés par l’argent public (nominations de proches dans des structures de l’environnement immédiat des exécutifs locaux ; distribution du travail disponible à des soutiens électoraux, etc.). Les perspectives globales quant à l’avenir de la Réunion, à sa place dans la République et dans l’Europe, et à une meilleure intégration dans sa propre zone géographique ne seront engageantes que si toutes les forces organisées y compris celles du monde économique concourent à trouver le meilleur tracé du chemin vers l’égalité. Et l’on pourra alors parler d’épanouissement de la personne réunionnaise.
Aimé LEBON, Bois-de-Nèfles Saint-Paul