Djaabir, 23 mois, avec la joie de vivre de tout petit garçon de cet âge-là, a vu sa vie s’arrêter, le 5 décembre 2016. Après une semaine dans la coma, le petit a succombé à ses blessures, essentiellement des hématomes cérébraux. Il souffrait en effet du syndrome de « bébé secoué ». Secoué « sans aucun doute » avec violence et de manière répétée, selon l’expertise médicale.
Qui en est responsable ? C’était la question initiale avant que la mère, Malika S., ne soit mise hors de cause.
Seul donc à être jugé pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner, Ben Abdou, 22 ans, lui-même au visage enfantin, est jugé devant la cour d’assises ce jeudi et vendredi.
Le jeune homme nie les faits. Selon son avocat, Me Ben Ali Ahmed , « ce n’est pas sa place », sous-entendant la responsabilité de la mère. En effet, cela ne faisait que quelques mois que l’accusé était en couple avec Malika S. alors que l’enfant portait des traces plus anciennes.
Mais ce jour-là – jour du traumatisme crânien – le 29 novembre à Saint-Louis, Ben Abdou est seul avec l’enfant, la mère ayant emmené les deux plus grands chez l’orthophoniste.
Elle reçoit plusieurs appels de son compagnon. À son arrivée, Ben Abdou est paniqué. Elle découvre le petit sur le lit, en couche, avec un hématome sur la tête. Il ne se réveille pas.
Selon les pompiers, Djaabir était « conscient mais ne répondait plus ».
Ben Abdou raconte d’abord que le petit avait beaucoup pleuré puis qu’il s’était simplement arrêté. C’est plus tard qu’il évoquera une chute du canapé. Mais le médecin légiste est catégorique : une chute ne peut pas avoir causé les hématomes cérébraux à l’origine du décès.
« Dans la poubelle » alors qu’il « pleurait trop »
Et ce ne serait pas la première fois qu’il « chute ». Il a d’ailleurs le bras gauche dans une attelle, plusieurs lésions sur le corps et une autour du cou qui interpelle les enquêteurs… A-t-il été étranglé ? En garde à vue, Ben Abdou avoue avoir eu recours à la strangulation quand l’enfant pleurait trop. Puis il revient sur sa déclaration.
Les autres enfants de Malika S., âgés de 5 et 7 ans, confirment des violences de la part de Ben Abdou, notamment des coups de câble de chargeur de téléphone et le fait qu’il ait mis Djaabir « dans la poubelle » alors qu’il « pleurait trop ».
Ils affirment également avoir subi des violences de la part de leur père biologique avant que leurs parents ne se séparent.
Et la mère ?
Une mère que l’on pourrait aussi qualifier de violente, un rappel à la loi ayant été effectué à son égard pour « des fessées ».
Mais également de « négligente », au vu de l’état de l’appartement, jugé « insalubre » par les enquêteurs.
Négligente (et peut-être même violente, selon le médecin légiste) également au vu de la centaine de cicatrices, dont la moitié sont anciennes.
Négligente aussi, enfin, pour avoir laissé son enfant de 23 mois avec un jeune homme désemparé.
Selon l’expert psychiatre, Ben Abdou, au casier judiciaire vierge, est un jeune homme immature qui n’a pas su gérer une vie de famille avec trois enfants, et encore moins un bébé seul.
A-t-il également reproduit le modèle parental « traditionnel »? À savoir des châtiments physiques en guise de punition ? Pour Malika S., cette « présence paternelle cadrait les enfants ».
Le verdict est prévu ce vendredi. Ben Abdou encourt 20 ans de réclusion criminelle.