L’article ne pouvait arriver à un pire moment pour Annick Girardin, exactement alors qu’elle accompagne Emmanuel Macron dans un voyage présidentiel à Mayotte et à La Réunion.
Le Canard enchaîné qui sort mercredi matin, mais que nous avons pu consulter en avant-première, épingle le compagnon de la ministre des Outre-Mer pour une série de marchés qu’il a facilement remportés à Saint-Pierre et Miquelon, d’autant plus facilement qu’il était le seul candidat…
Jean-François Vigneau, c’est le nom du compagnon de la ministre, a manifestement beaucoup de chance. Après avoir occupé occasionnellement le poste de collaborateur parlementaire de sa compagne Annick Girardin, le Canard nous révèle que le 2 juillet 2013, il « découvre » que le service de l’Aviation civile de Saint-Pierre et Miquelon (territoire dans lequel sa compagne a été conseillère territoriale pendant 16 ans, puis députée de 2007 à 2014, avant de devenir ministre de Hollande puis de Macron) lance un appel d’offres pour le gardiennage de la station Galileo, le concurrent européen du GPS américain.
Jean-François Vigneau ne dispose pas de l’habilitation nécessaire. En quelques jours, il crée une société et, en un temps record, obtient du ministère de l’Intérieur le précieux sésame absolument nécessaire pour soumissionner.
Et comme la chance ne le quitte pas, à moins que ce ne soit sa bonne fée, il se voit attribuer dans la foulée le marché pour un montant de 792.702 euros pour trois ans… Quand même.
Une fois le marché arrivé à terme, l’Aviation civile lance le 14 avril 2017 un nouvel appel d’offres avec une légère modification dans les critères exigés : les candidats doivent avoir exercé les mêmes prestations au cours des trois années précédentes. Comme par hasard.
Cela ne vous étonnera pas, la chance de Jean-François Vigneau est toujours là : sur ce petit territoire de 6.300 habitants, aucun autre candidat ne peut répondre à cette exigence. Résultat? La société de Jean-François Vigneau obtient à nouveau le marché pour trois ans pour un montant légèrement augmenté de 882.648 euros… Presque 100.000 euros de plus !
Là où ça devient beaucoup plus gênant pour Annick Girardin, c’est qu’elle a omis de signaler à la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) ses liens avec Jean-François Vigneau. Or la loi est claire : les ministres doivent mentionner « les activités professionnelles exercées à la date de la nomination par le conjoint, le partenaire lié par un Pacte civil de solidarité ou le concubin« .
Ce à quoi le cabinet de la ministre répond qu’ils ne sont ni mariés, ni pacsés, et que « chacun a un foyer fiscal et une résidence principale différents« .
Sauf que, comme le fait remarquer un cadre de la HATVP au Canard, la possession d’un bien immobilier en commun, ce qui est le cas d’Annick Girardin et de Jean-François Vigneau, constitue « une proximité suffisante pour déclencher un contrôle« …
Pour information, l’article 26 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique prévoit une peine de trois ans d’emprisonnement, 45.000 euros d’amende plus une peine complémentaire d’interdiction des droits civiques, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, pour un ministre qui omettrait « de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou de ses intérêts ou de fournir une évaluation mensongère de son patrimoine« .