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Le 1er Mai, un futur (tré)passé ?

Communiqué de Patrick Lebreton à propos du 1er mai :

Ecrit par Aurélie Hoarau – le vendredi 01 mai 2020 à 12H09

En ce jour férié et symbolique du 1er mai, le progressiste que je suis s’est autorisé une petite « entorse » à la règle du consensus qui prévaut depuis deux mois. En effet, nous célébrons la fête du travail dans un contexte particulier, en raison de la crise du COVID-19. L’histoire de cette journée dédiée aux travailleurs remonte à plus d’un siècle. Or, depuis quelques années, le progrès social qu’il représente est remis en cause. Et aujourd’hui, certains se demandent si la crise sanitaire que nous subissons ne serait pas un prétexte pour battre en brèche cette lutte hautement acquise ?

1. Le 1er mai, plus d’un siècle d’histoire
Ses origines remontent au 1er mai 1886, lorsque 200 000 travailleurs de Chicago, obtiennent la journée de 8 heures, au lieu de 12 heures minimum. Ceux n’ayant pu obtenir cet accord, démarrent aussitôt une grève qui connaît des affrontements violents avec la mort d’ouvriers américains.

Cette revendication va se répandre en Europe, et le 1er mai 1890 en France, les ouvriers défilent pour demander la journée des 8 heures de travail.

Le 1er mai 1919, la loi réduit le temps de travail à 8 heures par jour. Puis, la loi du 30 avril 1947, relative à la journée du 1er mai, fait de cette date un jour chômé et payé.

Cette lutte pour la journée de 8 heures va au-delà de la simple arithmétique ; elle met fin aux abus du patronat sur les ouvriers. C’est l’un des plus grands acquis sociaux de notre Histoire.

Le 3 mai 1936, une coalition de gauche, le Front populaire conduite par Léon Blum, remporte les élections législatives. Cette victoire de la gauche sonne comme une réponse à la grave Crise économique de 1929. Des grèves se déroulent alors partout en France, de mai à juin, de manière pacifique pour faire avancer des revendications sociales. Le gouvernement de Léon Blum oeuvre pour la paix sociale. Dans la nuit du 7 au 8 juin 1936, les représentants syndicaux et patronaux signent les Accords de Matignon, qui comportent de grandes avancées sociales: les congés payés, la semaine de 40 heures, les augmentations des salaires.

Plus récemment, sous la présidence de François Mitterrand en 1982, le gouvernement Mauroy instaure la semaine des 39h, la 5ème semaine des congés payés ainsi que la retraite à 60 ans.

Enfin, en 2000, sous le gouvernement de Lionel Jospin, la loi Aubry fixe la durée légale du temps de travail à 35 heures hebdomadaires qui a favorisé la création d’emploi.

2. La remise en cause permanente de ces acquis
Depuis le début du 21ème siècle, ces avancées sociales n’ont cessé d’être menacées par les gouvernements successifs.

D’abord sous la Présidence de Nicolas Sarkozy, la loi du « Travail, de l’Emploi et du Pouvoir d’Achat » (TEPA) du 21 août 2007 défiscalise les heures supplémentaires mais aussi les exonère de charges sociales. Il s’agit ici d’une manière détournée et subtile de remettre en cause la durée du temps de travail en encourageant les patrons à user de ce dispositif pour contourner les 35 heures et en leurrant les salariés par le slogan « travailler plus pour gagner plus ». Député à cette époque depuis quelques mois, j’ai voté contre cette loi.

Ensuite, en 2016, sous le gouvernement Valls, la loi El Khomri, prévoit une plus grande flexibilité du temps de travail par le biais de la négociation collective et d’accords d’entreprises qui peuvent prolonger la durée du temps de travail de 44 heures à 66 heures sur 12 semaines. On inverse la hiérarchie des normes, un accord d’entreprise pouvant prévaloir sur la loi, donc sur le code du travail. Le gouvernement Valls voulant passé en force par l’utilisation du fameux « 49.3 », j’ai brandi le « 97.4 », et quitté le groupe socialiste à l’Assemblée Nationale. Je suis fier d’avoir voté contre cette loi.

Enfin, aujourd’hui, sous la Présidence d’Emmanuel Macron, le code du travail a été profondément réformé dans l’intérêt du Patronat au détriment des droits du salarié.

Dans le cadre des mesures d’urgences liées à la crise sanitaire actuelle, l’ordonnance du 25 mars 2020 contient des dispositions remettant en cause les congés payés, la durée du travail et les jours de repos.

Ainsi la durée quotidienne maximale du travail peut être reportée jusqu’à 12 heures et la durée hebdomadaire maximale jusqu’à 60 heures.

Ces dispositions s’inscrivent dans le contexte particulier de cette crise sanitaire grave que nous connaissons. Elles sont réputées transitoires. Il ne faudrait pas qu’elles deviennent demain un prétexte patronal à la suppression d’un important acquis social. Car, elles contiennent les germes d’une remise en cause de la durée du travail et des congés payés, ce qui nous ferait faire un bond en arrière de plus de cent ans.

3. Le COVID-19 ou la tentation de faire payer cette guerre par les salariés
Ainsi, le patron du MEDEF, Geoffroy Roux de Bézieux qui a accordé une interview le 10 avril 2020 au journal Le Figaro disait « il faudra bien se poser la question tôt ou tard du temps de travail, des jours fériés et des congés payés pour accompagner la reprise et faciliter, en travaillant un peu plus, la création de croissance supplémentaire. »

Cela ne démontre t-il pas le mépris qui existe encore à l’égard des ouvriers et salariés qui consentent des efforts importants durant cette crise, et font preuve de solidarité avec la Nation ?

Devrait-on faire supporter le coût de cette guerre uniquement par les salariés, qui en sont les premières victimes ?

Alors qu’à la Libération de la France en 1945, des droits sociaux importants ont été accordés aux salariés, la fin de la guerre sanitaire d’aujourd’hui ne pourrait-elle pas également ouvrir sur des mesures de progrès social ? On pourrait ainsi construire notre Futur tout en nous référant à notre Passé.

Mais, force est de constater que nous sommes loin de prendre ce chemin. Et même, que la tentation serait forte de la part de certains dirigeants, sous l’influence du patronat, de rayer plus d’un siècle de Progrès social.

En cette journée du 1er mai, il apparaît donc que les droits sociaux restent fragiles et que nous devons rester plus que jamais vigilants. Le combat pour nos libertés, nos droits et la justice sociale, doit continuer… un siècle après les avoir durement obtenus.

Bonne fête du travail.

 

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