A l'heure où tout un chacun se doit de proclamer bruyamment son soutien à la « liberté d'expression », il faut malheureusement constater qu'il y a loin de la théorie à la pratique, de la proclamation vertueuse à la réalisation effective. Depuis l'assassinat du malheureux Samuel Paty, le Quotidien, tout comme le JIR d'ailleurs, s'est montré d'une extrême retenue dans le commentaire de cet événement. Vous vous êtes contentés de reproduire les communiqués passe-partout, à l'indignation convenue, des hommes politiques locaux et d'un certain nombre d'associations comme la LDH, le FGDR de M. Panechou et différents syndicats enseignants. Certains de ces textes sont tellement généraux et loin du sujet qu'ils vont jusqu'à s'abstenir d'utiliser dans leur prose insipide le mot « islamisme ». Quant à proposer un commencement de début d'analyse de ce phénomène très inquiétant, cela semble vraiment très loin de leurs préoccupations !
Alors, permettez-moi de vous signaler que la liberté d'expression, célébrée avec tant de véhémence (Je suis Charlie !), ne se limite pas à la liberté de caricaturer mais implique également la liberté de faire entendre des points de vue, des réflexions et des analyses, en particulier sur des sujets aussi capitaux que celui-ci. Je vous ai pour ma part fait parvenir successivement deux textes de cette nature mais vous avez jusqu'ici jugé bon de n'en publier aucun. Ni « Terrorisme islamique : le geste barrière » du 19 octobre, ni « Un fort beau discours du Président Macron » du 22 octobre. Mais peut-être considériez-vous que la menace mortifère que fait peser sur notre pays un islamisme politique conquérant serait moins grave que les méfaits bien connus du port du soutien-gorge, sujet longuement développé dans votre édition d'aujourd'hui !
On a parlé, à propos de la décapitation du professeur de Conflans, de l'effet de sidération que celle-ci a provoqué dans l'opinion. Si, bien sûr, j'ai moi aussi éprouvé intensément ce sentiment d'horreur et de sidération, ce qui me sidère aujourd'hui, c'est de constater combien on a vite fait ici et là, et notamment dans les organes d'information de notre île, de s'accommoder de la seule déploration larmoyante, sans jamais oser entreprendre un examen sérieux des tenants et aboutissants de ce tragique événement. De mauvais esprits pourraient aller jusqu'à voir dans la prudence que vous manifestez en ce domaine une sorte de capitulation devant l'ennemi islamiste, lequel serait alors parvenu à vous intimider.
Pour ma part, je me refuse pourtant à croire que nos vaillants journalistes-pays seraient désormais dépourvu de tout courage éditorial. Je me refuse à croire qu'ils aient renié cet idéal journalistique qu'Albert Londres jadis avait si magnifiquement formulé, dans une célèbre profession de foi qu'aujourd'hui même le JIR (page 26) à la bonne idée de nous rappeler : « Je demeure convaincu qu'un journaliste n'est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de rose. Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » C'est-là un bien beau programme mais sans doute devenu un peu trop exigeant pour les publicistes d'aujourd'hui !
A.P., le 24 octobre 2020
Alors, permettez-moi de vous signaler que la liberté d'expression, célébrée avec tant de véhémence (Je suis Charlie !), ne se limite pas à la liberté de caricaturer mais implique également la liberté de faire entendre des points de vue, des réflexions et des analyses, en particulier sur des sujets aussi capitaux que celui-ci. Je vous ai pour ma part fait parvenir successivement deux textes de cette nature mais vous avez jusqu'ici jugé bon de n'en publier aucun. Ni « Terrorisme islamique : le geste barrière » du 19 octobre, ni « Un fort beau discours du Président Macron » du 22 octobre. Mais peut-être considériez-vous que la menace mortifère que fait peser sur notre pays un islamisme politique conquérant serait moins grave que les méfaits bien connus du port du soutien-gorge, sujet longuement développé dans votre édition d'aujourd'hui !
On a parlé, à propos de la décapitation du professeur de Conflans, de l'effet de sidération que celle-ci a provoqué dans l'opinion. Si, bien sûr, j'ai moi aussi éprouvé intensément ce sentiment d'horreur et de sidération, ce qui me sidère aujourd'hui, c'est de constater combien on a vite fait ici et là, et notamment dans les organes d'information de notre île, de s'accommoder de la seule déploration larmoyante, sans jamais oser entreprendre un examen sérieux des tenants et aboutissants de ce tragique événement. De mauvais esprits pourraient aller jusqu'à voir dans la prudence que vous manifestez en ce domaine une sorte de capitulation devant l'ennemi islamiste, lequel serait alors parvenu à vous intimider.
Pour ma part, je me refuse pourtant à croire que nos vaillants journalistes-pays seraient désormais dépourvu de tout courage éditorial. Je me refuse à croire qu'ils aient renié cet idéal journalistique qu'Albert Londres jadis avait si magnifiquement formulé, dans une célèbre profession de foi qu'aujourd'hui même le JIR (page 26) à la bonne idée de nous rappeler : « Je demeure convaincu qu'un journaliste n'est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de rose. Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » C'est-là un bien beau programme mais sans doute devenu un peu trop exigeant pour les publicistes d'aujourd'hui !
A.P., le 24 octobre 2020