Les faits sont simples. En janvier 2017, le centre commercial Leclerc du Portail à Saint-Leu veut lancer une campagne de publicité et fait donc appel à une agence de communication. Rien d’illégal jusque-là. En tant que prestataire, c’est l’agence Zoorit qui est chargée de l’organisation de la campagne et donc du recrutement des mannequins. Sept en tout, dont deux mannequins enfants.
Un devis à plus de 35.000 euros
Il n’y a que deux agences sur l’île qui peuvent faire travailler des enfants : Kwahéri et Couleur Métisse. Un devis est fait : 35.204,34 euros. Trop cher juge l’agence Zoorit, pour qui cette somme représente le double du budget pour toute la campagne. Plus de nouvelles, le devis tombe à l’eau.
Sauf que la campagne de pub a finalement bel et bien lieu. En résultent un an d’affiches (très esthétiques) placardées en 4×3, à chaque occasion spéciale pour le centre commercial. L’agence Zoorit est passée en direct et a recruté les mannequins, qu’elle a rémunérés elle-même. Et c’est là que le bât blesse. Les agences de mannequins se sentent lésées et portent plainte pour « exercice illégal d’agence de mannequin et concurrence déloyale ».
Sauf que pour la défense, « les mannequins ont tout à fait le droit d’officier en direct, surtout à La Réunion où ils ne peuvent pas vivre de leur activité entièrement. La législation applicable aux agences de mannequins ne s’applique donc pas et il n’y a pas de concurrence déloyale », explique Maître Perisse-Seube, représentant l’agence Zoorit.
Car le prix du devis s’explique par le poids de cette législation, les charges et démarches administratives que doivent justement supporter les agences de mannequin. Agréments en préfecture à renouveler tous les ans, autorisations, visites médicales, la liste est longue.
Quid du travail des enfants ?
Seul hic dans cette histoire, l’avocat des agences de mannequins ne s’est concentré que sur la partie « concurrence déloyale », occultant totalement le fait que sur le fond, c’est bien une question d’autorisation à faire travailler des enfants, exclusivité chère aux deux agences de mannequins qui ont porté l’affaire devant les tribunaux.
Et sur ce point, comme le souligne l’avocat de Zoorit à bon escient « le contentieux ne se base pas là-dessus et ce ne sont pas les fondements juridiques des parties demanderesses. Je ne vais donc pas extrapoler là dessus ». Le Tribunal saura-t-il voir au-delà des lignes procédurières ? Réponse le 23 avril pour le délibéré.