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La fraude fiscale estimée entre 300 et 500 millions d’euros à La Réunion

Jusqu’au 20 mai, les feuilles de déclaration vont s’accumuler sur les bureaux d’institutions de finances publiques, tandis que le syndicat Solidaires Finances Publiques déplore des manques importants de moyens et de personnels. Avec une fraude fiscale locale comprise entre 300 et 499 millions, La Réunion perd des ressources essentielles à son développement.

Ecrit par zinfos974 – le lundi 28 avril 2014 à 17H22
Ce matin, 28 avril 2014, le syndicat Solidaires Finances Publiques a profité de l’actualité et de l’arrivée des feuilles d’impôts dans les boîtes aux lettres pour dénoncer une nouvelle fois la fraude fiscale qui sévit à La Réunion. L’organisation évalue la fraude fiscale sur l’île entre 300 et 499 millions d’euros, 60 à 80 milliards en France et 1000 milliards en Europe, des chiffres basés sur différents rapports dont un de la Commission Européenne.
 
Des chiffres contestés l’année dernière mais qui ont été confirmés par le précédent ministre du budget, Bernard Cazeneuve, en mai 2013 devant l’Assemblée Nationale. « Ces chiffres sont devenus un fait », insiste Pascal Valiamin, administrateur de la Région Réunion et Mayotte
 
En 2013, 30% des 460.000 foyers réunionnais étaient imposables contre 70% non imposables. Pour Pascal Valiamin, « le recensement est indispensable mais aujourd’hui mal évalué ». Il laisse entendre que ces chiffres, en comparaison avec ceux de la métropole (60% de foyers imposables au niveau national), sont révélateurs de fraudes.
 
Or, pour les représentants du syndicat, les solutions ne viendront pas des mesures d’austérités du gouvernement actuel, qui a pris un virage social-libéral depuis le remaniement. Le nouveau gouvernement cherche essentiellement à réduire les finances publiques, avec des « coupes violentes dans les dépenses sociales de l’Etat », selon Eric Metro, secrétaire départemental.

« Il faut se donner les moyens d’aller chercher la fraude, puisque l’on sait où elle se trouve »

 
Pour l’organisation, il faut mettre le doigt sur différents facteurs qui favorise l’évasion fiscale et la fraude, afin de limiter les restrictions budgétaires, notamment avec l’instauration d’un suivi précis, pertinent et continu pour surveiller les possibles fraudes. Mais surtout, en se focalisant sur les recettes de l’Etat cette fois, et donc sur le contrôle fiscal qui peine à être mis en œuvre à la Réunion. « Il faut se donner les moyens d’aller chercher la fraude, puisque l’on sait où elle se trouve », déclare Pascal Valiamin qui mise sur l’emploi, l’harmonisation et la coopération fiscale (aussi bien au niveau local que international) pour lutter contre la fuite de capitaux.
 
Solidaires Finances Puibliques rappelle que la Réunion est un lieu où le système fiscal est atypique et le potentiel de fraude élevé. Par son emplacement déjà, car l’île est située près de deux paradis fiscaux, Maurice et les Seychelles, ce qui favorise l’évasion fiscale. Ensuite, avec le remboursement du FCTVA (le fonds de compensation pour la TVA) dont les collectivités locales se servent par manque de budget. Les contrôles sur cette ressource sont compliqués car elle est propre et légale, et les institutions financières n’ont pas les compétences juridiques suffisantes. La compensation à La Réunion est supérieure à la TVA versée. La différence équivaut à un bénéfice en cash pour la collectivité, car le TVA est à 8% pour les DOM, contre 19% en métropole, et le FCTVA à 16 %. L’île est aussi un lieu propice à la défiscalisation et les institutions ne peuvent pas toujours vérifier si celle-ci est arrivée à terme.
 
Sans moyens c’est difficile
 
Après une demande de la part du syndicat pour effectuer des contrôles de revenus dans l’examen de la situation fiscale, une nouvelle brigade de contrôle va être créée cette année. À partir de septembre, elle va intervenir au niveau régional et inter-régional, contrairement aux deux autres qui agissent au niveau départemental. Neuf contrôleurs fiscaux supplémentaires s’ajouteront à l’équipe globale d’une trentaine d’agents réunionnais.
 
Mais cela reste insuffisant, insiste le syndicat qui exprime un besoin de « renforcement à tous les niveaux ». Il exige une mise à niveau des effectifs par rapport aux enjeux de la fiscalité à la Réunion, qui dépassent, pour lui, largement les moyens dont disposent les institutions publiques de finances. À tel point que la probabilité d’être contrôlé pour une PME (Petite et Moyenne Entreprise) qui paye la TVA est d’une fois tous les 101 ans et de subir un contrôle sur pièce, tous les 76 ans. Eric Metro rappelle au passage qu’un contrôle ne débouche pas forcément sur un redressement de l’entreprise.
 
À cause, selon les syndicalistes, du manque d’effectifs et d’outils sophistiqués (informatique, investigation) certaines anomalies présentes dans les listings ne peuvent être traitées rapidement. C’est pourquoi l’organisation demande un rallongement de la prescription afin de vérifier ses suspicions et récupérer une partie des capitaux qui auraient fuité.

La nouvelle brigade, va se focaliser en priorité sur les « gros »

 
Le type de fraude que l’on retrouve le plus souvent à La Réunion vient des foyers modérés : travail au noir pour toucher une indemnité chômage, fraude sur la taxe d’habitation, sur le nombre d’enfants à charge en cas de divorce, ou encore fausses factures.
 
Cependant, la nouvelle brigade, va se focaliser en priorité sur les « gros », selon le secrétaire adjoint du syndicat. 320 des 70.000 entreprises réunionnaises (PME et TPE) dépendent de la DGE à Paris (Direction des Grandes Entreprises). La DGE pilote particulièrement ces entreprises dont les activités restent axées sur l’île mais qui dépassent les 400 millions de bénéfices par an. Le fait que le taux de recettes de l’Etat par l’impôt sur la société soit moins important qu’en France métropolitaine (15% des recettes à la Réunion contre 18% au niveau national) s’explique par ce rattachement à la DGE.
 
Le syndicat appelle à la solidarité
 
Ces chiffres posent la question de justice fiscale et donc de justice sociale, selon le syndicat. « La fraude fiscale est aussi un manque à gagner pour les communes », selon Pascal Valiamin, qui rappelle qu’il est nécessaire pour l’investissement public dans l’éducation, la santé et les institutions publiques. Solidaire Finances Publiques constate que la fraude pousse à la fraude quand un lien entre les citoyens et la collectivité a été rompu parce que ce sont « toujours les mêmes qui sont concernés et qui portent le poids fiscal des fraudeurs ».
 
La complication de la fiscalité à travers les années « la rend illisible pour certaines personnes et fait le nid de la fraude », ajoute le syndicat.
 
Solidaire Finances Publiques tente d’ouvrir un débat citoyen dans une optique de solidarité et contre une évasion fiscale compréhensible à la vue des pressions fiscales exercées sur les PME et la classe moyenne (le taux d’imposition des PME est de 20% contre 8% pour une entreprise du CAC 40).
 
« La solidarité attendue passe par un consentement de l’impôt qui a une image dégradée », conclut le syndicat, qui compte redonner à l’impôt toute sa « nécessité en luttant contre l’injustice du système fiscale qui alimente l’esprit « anti-impôt » et la fraude ».

 

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