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La Réunion pourrait-elle être submergée par un tsunami après une éruption comme en Indonésie ?

Le réveil de l’Anak Krakatoa le 22 décembre dernier a été tragique. L’éruption a engendré un tsunami qui a rapidement déferlé sur le détroit de la Sonde. 430 morts, 1 495 blessés et 159 disparus selon un dernier bilan. Ce type de phénomène est déjà survenu par le passé à La Réunion et pourrait bien à nouveau se produire… dans des milliers d’années. Aline Peltier, directrice de l’Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise nous explique pourquoi.

Ecrit par Prisca Bigot – le vendredi 28 décembre 2018 à 14H01

Un tsunami d’un telle ampleur pourrait-il se produire à La Réunion?

Oui cela peut se produire. D’ailleurs nous avons un sujet d’étude actuellement qui analyse toutes ces déstabilisations de flanc sur le Piton de la Fournaise.

Il faut savoir que par le passé cela s’est déjà produit.

L’enclos Fouqué, il y a 4500 ans environ, s’est formé par une déstabilisation de flanc qui a généré un grand apport de matériel en mer et atteint les côtes de Maurice et l’ensemble des côtes de La Réunion.  

Comment le sait-on?

Il y a eu des études faites au large de La Réunion. Lors de la formation de cet enclos, il y a eu une importante quantité de matériel qui s’est écroulé rapidement en mer comme cela a été le cas pour l’Anak Krakatoa le 22 décembre dernier. Cela a très certainement généré des vagues et un tsunami.

Des collègues de Clermont-Ferrand ont fait des simulations il y a quelques années, avec l’arrivée de matériels rapidement en mer et on voyait donc que la vague créée aurait pu engendrer un tsunami qui aurait fait le tour de l’île en moins de 10 minutes. Avec des vagues, dans les scénarios le plus pessimistes, de 5 à 10 mètres de hauteur. 

Ce genre de phénomène pourrait de reproduire dans le futur. Ce sont des événements extrêmement rares sur ce type de volcans comme le Piton de la Fournaise.
 

 

Cela tient aux caractéristiques de notre volcan, il n’est pas explosif…

Ce n’est pas un volcan explosif mais nous avons pas mal d’éruptions et elles ont tendance à pousser le flanc Est ouvert vers la mer. Un flanc Est qui bouge de manière continue vers cette direction, de l’ordre de 2 cm par an.

Ce sont donc des déplacements extrêmement lents mais, à terme, il y aura très certainement une rupture et une déstabilisation de ce flan vers l’Est comme cela a eu lieu il y a 4 500 an.

Mais il faut pondérer ces propos en disant que ce sont des phénomènes extrêmement rares mais qui ne sont pas à exclure sur un volcan comme le notre. 

Sont-ils prévisibles?

Ces phénomènes de rupture, comme cela s’est produit en Indonésie, sont difficiles à anticiper.

On peut anticiper des éruptions : on sait quand le magma remonte, on sait même assez tôt où est-ce qu’aura lieu l’éruption. Mais on ne peut pas prévoir ces ruptures dans le fond d’un volcan. Elles sont très brutales.

On sait qu’il y a des contraintes qui s’accumulent dans l’édifice et qu’à un moment donné, ça va rompre. Mais malheureusement, on ne sait pas quand. C’est comme pour les séismes. 

Est-ce qu’il y a quand même des indices perceptibles lors d’une éruption? 

Oui, il faut des pressions et des contraintes assez importantes à l’intérieur de l’édifice. Avant d’avoir une rupture du flanc, il faut déjà d’abord avoir de grandes déformations.

Par exemple à la Fournaise, la dernière fois que nous avons eu de grandes déformations dans le flanc, c’est à dire de l’ordre de plus d’un 1 mètre, c’était pour l’éruption de 2007. Beaucoup de magma impliqué dans cette éruption et un flanc Est qui a bougé jusqu’à 1m40. Il n’y a pas eu de rupture mais un grand glissement s’est produit alors que lors des éruptions classiques, il est plutôt de quelques dizaines de centimètres. Donc pour qu’il y ait rupture, il faut qu’il y ait accumulation de contraintes en termes de pressurisation en profondeur.

Pour l’instant à la Fournaise, nous sommes dans des éruptions de faible volume mais à l’échelle des prochains milliers d’années, il est fort probable que l’on connaisse de nouvelles déformations de flanc comme ce fut le cas pour l’enclos Fouqué. 

L’effondrement du Dolomieu en 2007 avait-il été prévu? 

Effectivement l’éruption avait débuté le 2 avril et l’effondrement avait commencé le 5 avril. Pendant ce laps de temps, on a eu trois jours de très forte sismicité.

Cela veut dire qu’avant d’avoir un effondrement ou un glissement de terrain, la roche se fragilise et cela crée de la sismicité, avec plusieurs dizaines de milliers de séismes par jour qui ont pu être enregistrés par le matériel de l’Observatoire.

Donc on savait qu’il allait se passer quelque chose. 

Donc nous serions capables de prévoir à minima un effondrement? 

Nous pourrions peut-être anticiper cette rupture puisqu’elle s’accompagne toujours de sismicité.

Après il faut croiser les doigts pour que celle-ci soit assez longue comme par exemple pour le cratère Dolomieu. La crise sismique avait duré 3 jours.

Si jamais nous venions à observer une cassure qui commencerait à s’initier sur le flanc Est, cela pourrait être très rapide comme au Krakatoa où cela a duré quelques minutes.

Mais le phénomène pourrait être aussi plus lent à l’échelle d’heures ou de jours.   

 

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