Le constat est sans appel. Selon l’enquête Insee de 2011 portant sur l’illettrisme, la Réunion compte 116.000 personnes en situation d’illettrisme. Un chiffre en augmentation par rapport à 2007 (+16.000 personnes), mais compensée par la croissance démographique, qui reste trois fois plus importante qu’en métropole (7,4%).
Une définition de l’illettrisme s’impose avant de comprendre l’enquête de l’Insee. Selon l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI), le terme d’illettrisme est réservé pour qualifier les personnes qui ont été scolarisées dans le cadre de l’école française et qui ne maîtrisent pas les compétences de base en lecture, écriture pour être autonome dans des situations simples de la vie quotidienne.
« L’enquête réalisée en 2011 s’est attachée à évaluer les compétences d’adultes, sur la tranche d’âge de 15 à 65 ans, à l’oral et en calcul. Elle permet de les situer au niveau national« , explique Valérie Roux, directrice régionale Réunion Mayotte de l’Insee. La dernière enquête de l’Insee sur ce sujet remontait à 2007.
Qu’apprend-on dans la nouvelle enquête de 2011 ? A la Réunion, 116.000 personnes sont en situation d’illettrisme, soit 22,6% des 16-65 ans ayant été scolarisés (21,4% en 2007 ndlr). Entre 2007 et 2011, 16.000 Réunionnais en plus se retrouvent confrontés au problème de l’illettrisme. Un chiffre qui s’explique notamment par la croissance de la population, souligne l’Insee. Un taux particulièrement élevé par rapport à la métropole et les Antilles (respectivement de 7,4%, 20% en Guadeloupe et 14% en Martinique).
Parmi les catégories de la population les plus concernées par l’illettrisme, un profil se dessine. Celui d’un homme jeune, issu d’un milieu modeste. L’Insee note dans son enquête que 30% des hommes réunionnais sont en situation d’illettrisme, contre 16% des femmes. Une situation liée en partie aux « habitudes » de lecture durant l’enfance. « 48% des hommes ne lisaient jamais contre 30% des femmes« , souligne Hervé Le Grand, chef du service études et diffusion à l’Insee.
« Le constat est préoccupant et demande la mobilisation de tous les acteurs »
Pis, si l’on en croit l’étude de l’Insee, la part des jeunes rencontrant des difficultés face à l’écrit s’est accrue entre 2007 et 2011. « Le taux d’illettrisme ne baisse pas chez les jeunes, alors qu’il diminue sensiblement au-delà de 60 ans« , rappelle-t-il.
Le rôle des parents dans l’apprentissage pèse également dans la balance. « La réussite de l’enfant dans l’apprentissage de la langue française dépend également des compétences des parents, notamment du diplôme de la mère ou du père (…). La langue parlée durant l’enfance à la maison est aussi un facteur important quant à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture de la langue française. 70% des personnes parlaient uniquement le créole durant leur enfance. Parmi elles, 29% ont de grandes difficultés à l’écrit à l’âge adulte« , précise Hervé Le Grand.
Présent autour de la table ce matin, Renan Boillot, sous-préfet délégué à la cohésion sociale et la jeunesse, ne peut que faire le constat « préoccupant » de la situation de l’illettrisme à la Réunion. « Le constat est préoccupant et demande la mobilisation de tous les acteurs. En 2011, l’Etat et les collectivités ont décidé de la création d’un plan régional de lutte contre l’illettrisme. Cette étude va nous permettre de mesurer l’effet du plan, car il nous fallait des références (dernière étude datée de 2007 ndlr). Il très important pour nous d’avoir un point de situation au moment de la mise en oeuvre du plan d’action« , explique Renan Boillot.
Le plan régional de lutte contre l’illettrisme met en place une quarantaine d’actions chaque année : des actions scolaires et péri-scolaires dans le domaine de la prévention ou encore la mise en place de formations spécifiques auprès d’un effectif annuel d’environ 1.500 stagiaires.
En synthèse, 22,6% des 16-65 ans scolarisés en France sont en situation d’illettrisme. Un taux dont l’évolution n’est pas significative par rapport à 2007 (21,4%) mais qui reste trois fois plus important qu’en France métropolitaine et aussi supérieur aux Antilles.