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La Pointe des Galets : Construction d’un Port

On ne peut parler de patrimoine maritime de l'île de La Réunion, sans citer la construction du Port de la Pointe des Galets. Alors qu'aucun gros navire ne peut y accoster depuis le début de son peuplement, plusieurs projets de ports sont envisagés mais n’aboutissent pas. Le progrès économique pousse l'île à s'adapter.

Ecrit par Sabine Thirel – le samedi 23 mai 2009 à 08H00

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Fin du XIXe siècle, l’augmentation de la population, une production importante de sucre et par la même des échanges commerciaux croissants, amènent les responsables politiques et économiques à penser à la création de nouvelles structures. En effet, grâce aux marines privées installées dans les quartiers, le batelage et le cabotage assurent les exportations et les importations, au moyen de débarcadères  approvisionnant les chaloupes et autres chasse-marées se chargeant d’amener les marchandises jusqu’aux navires ancrés plus au large.

 

Les pertes d’hommes et d’embarcations sont courantes pendant les intempéries. De plus, aucun contrôle des marchandises ne peut être réalisé par les autorités. Aux impératifs économiques et logistiques s’ajoutent les impératifs militaires, de défense du territoire. Parallèlement à la construction du chemin de fer reliant Saint-Benoît à Saint-Pierre par le littoral Nord, le creusement d’un port digne de ce nom, est envisagé. Les Des ingénieurs Alexandre Lavalley et Adrien Blondel se penchent sur le projet. Plusieurs villes se concurrencent pour abriter le premier grand port de l’île.

 

Sainte-Rose et Saint-Denis bénéficient des vents d’Est, mais la marine à voile laisse progressivement la place aux grands navires à vapeur comme les steamers. L’étang de Saint-Paul abrité par la Pointe des Galets et le cap La Houssaye, bénéficie d’une baie naturelle et d’une infrastructure d’entrepôts et de magasins non négligeable. A Saint-Pierre, un port est en construction depuis près de 20 ans mais il est dores et déjà trop étroit pour les nouveaux navires de la marine marchande. D’ailleurs, la ville ne bénéficiant plus des aides de la colonie, est complètement endettée. C’est le site de la pointe des Galets proposé par Etienne Pallu de la Barrière, Capitaine de Vaisseau, qui est retenu tout d’abord par le conseil général en 1874 puis en 1876 par Paris.

 

Ce site présente plusieurs avantages. D’abord c’est un immense espace désert, situé à l’embouchure de la Rivière des Galets, l’enlèvement des roches et du sable se fera sans l’intervention de  machines ou de moyens excessifs. L’autre avantage est la situation de la Pointe des Galets par rapport à l’île elle-même. En effet, à mi-chemin entre Saint-Denis et Saint- Paul, elle l’est aussi de Saint-Benoît et de Saint-Pierre, villes desservies par le chemin de fer qui transporte les marchandises (sucre, café, vanille) et les voyageurs. La Compagnie du Chemin de Fer et Port de La Réunion (CFPR) se voit attribuer les travaux du chemin de fer et du port de la Pointe des Galets pour 34 millions de francs.

 

Ainsi, de 1879 à 1886, le Port se construit sous la direction de Adrien Blondel. De larges tranchées se creusent, occasionnant plusieurs accidents humains, matériels et dûs à la météo qui retardent les travaux. Mais un autre problème se présente, une barre de roche dure de 30 mètres de large empêche la progression des travaux et l’accès à la mer. La Compagnie installe une énorme machine « Titan » de 3 tonnes montée sur rails. Le « Titan » permet de poursuivre les travaux, déplaçant les blocs de 120 tonnes, de bétons lestés de canons. Les premières jetées sont livrées en 1881et en 1882, la même année que le chemin de fer.

 

Le coût de 8 665 000, prévu dans le devis est dépassé et les travaux sont loin d’être terminés. Des dragages  réguliers, des travaux d’entretien permanents et un agrandissement de bassin sont encore à prévoir. Le Ministère de la Marine et des Colonies, maître d’œuvre, apporte des crédits supplémentaires, signe une convention avec la Compagnie, et accepte le remboursement de son avance à la livraison des travaux du Port de la Rivière des Galets. Si ces engagements ne sont pas respectés l’Etat prononcera la déchéance de la compagnie qui deviendra la CPR. 

 

L’inauguration du Port de la Rivière des Galets se fait en septembre 1886. Mais le premier port réunionnais n’assure qu’un quart de l’activité maritime de l’île. Les Marines privées occupent 75 % du marché et lui font concurrence. Elles mettent encore un peu plus en difficulté la CFPR. A la fin 1887, la compagnie ne peut rembourser l’Etat et ne peut plus continuer l’exploitation du Port, l’Etat devient alors propriétaire de la CPR. Seul un décret du Gouverneur supprimera l’utilisation des Marines qui résisteront jusqu’en 1920 pour certaines. 

 

Des grands entrepôts se montent à proximité des quais permettant de stocker les marchandises en attendant leur transport à destination finale.  Ouvriers et dockers Réunionnais, Egyptiens, Indiens, Soumalis, Malgaches par centaines, se rapprochent de leurs lieux de travail, s’installant dans des cases en paille avec leurs familles aux alentours des chantiers, des maisons dont celles de techniciens et du Commandant du Port, des bâtiments administratifs dont une mairie viennent s’y ajouter, ainsi nait la ville du Port. Sur le territoire de la commune de Saint-Paul puis sur celle de La Possession, le Port devient commune à part entière en 1895, elle compte alors 2000 habitants.

 

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