Après un an de réaménagements, l’ancien « sentier marron » qui descendait La Montagne pour rejoindre Saint-Denis, a été inauguré ce matin par l’ONF et le Conseil Général.
Sur les 3,5 km de sentier faisant le lien entre la station Tamoil de La Montagne et La Redoute, 1,9 km ont été totalement « créés » par la Commission Santé et Patrimoine de l’ONF, « afin de ne pas déborder sur la route dans les rampes de La Montagne ». Avec plus de 200 marches et 70 dalots, le projet a coûté environ 50.000€ au Conseil Général. Selon les jours et la difficulté du sentier initial, la dizaine d’ouvriers mobilisés qui avaient donné les premiers coups de pioches pouvaient réaménager entre un mètre et quinze mètres par jour. « Guidée par l’esprit des lieux », l’équipe de l’ONF a travaillé à la « mise en valeur des pierres présentes sur le sentier » avec une « cueillette de pierre » sur le chemin même, afin de « respecter son passé ».
Un sentier, une histoire
L’ONF explique que « ce sentier est rattaché à l’histoire, il en fait partie ». Il a été construit en 1730 en tant que seul axe nord-sud. Dans les années 1800, l’île était convoitée pour sa culture dominante du café et son emplacement sur la route des Indes. En 1803, au début des guerres napoléoniennes, la France entre en conflit avec l’Angleterre. Finalement, c’est en 1810 que les anglais débarquent à la Grande Chaloupe. Ils rejoignent le champs de bataille de La Redoute en empruntant ce sentier, surnommé alors Sentier des anglais. Pavé en 1775, l’itinéraire garde encore des secteurs de cette époque.
Richard Muller, conseiller en secteur de La Montagne, affirme que « beaucoup de gens se rappellent du temps où La Réunion n’était pas desservie par les bus. Dans les années 50, les habitants de La Montagne étaient de grands marcheurs, ils allaient au travail à pieds ». D’après lui, cette rénovation du tracé leur permet de « reprendre ce qu’il leur avait été enlevé ». Avec cette réouverture se prépare « un projet plus ambitieux », celui de remettre au goût du jour le sentier et de faire redécouvrir le « fabuleux quartier » qu’est celui de La Montagne.
« Les Réunionnais aiment marcher et l’on ne peut pas les priver de cet amour pour la randonnée ». Souffrant lui-même d’une déficience visuelle, Richard Muller s’est impliqué pour rendre le sentier « accessible à tous, même pour les personnes porteuses d’un handicap ». Plusieurs aspects techniques ont été pris en compte pour la rénovation du sentier marron autrefois « inadapté et dangereux pour une balade en famille » bien que régulièrement emprunté par les habitants de La Montagne, d’après Bernard Labrosse, référent sentier pour l’ONF. Comme il l’explique : « Le sentier était extrêmement sportif, il fallait sauté des fossés, traverser la route ».
Développer La Réunion en aménageant la montagne
L’ONF rappelle que « la lèpre du sentier, c’est la question de la propreté car tous les gens n’ont pas des réflexes éco-citoyens et plus de 500 tonnes de déchets sont ramassés ». Le chef-lieu estime que pour faire bouger les choses il n’est pas seulement question « d’éducation mais bien d’une campagne de sensibilisation importante, à faire en amont ». Selon le Conseil Général, « il faut relancer la conscience des gens. Aussi, le nouveau sentier des anglais s’inscrit dans une politique de développement durable et du tourisme après un travail volontariste et une vision collective du développement de La Réunion ».
En vue des prochaines Journées du Patrimoine, la mairie de Saint-Denis espère voir une nouvelle ouverture d’un sentier par l’ONF, celui de l’Ilet-à-Guillaume. D’après l’ONF ce sont près de 1.800.000 randonneurs qui empruntent tous les ans les 850 km de sentiers de La Réunion, soit quatre fois le tour de l’île. Chaque année ces sentiers sont aménagés et entretenus grâce à presque 4 millions d’euros d’investissement du Conseil général, qui est propriétaire de 95% des forêts publiques. « Il n’existe pas de tel partenariat pour la randonnée en métropole et La Réunion est un exemple » assure la ville de Saint-Denis. 80% des territoires réunionnais sont classés en parc national et inscrits au Patrimoine mondial de l’humanité.
Des éco-compteurs vont être installés sur le nouveau tracé afin de comptabiliser le nombre de passages. Même si aucune estimation n’a encore été faite par les collectivités, l’équipe de l’ONF estime que ce sont « cent personnes qui seraient susceptibles de prendre le sentier chaque jour ».