On aurait pu se croire un lendemain de cyclone, ce midi, à La Bobine. Une des terrasses est littéralement détruite, des monceaux de bois jonchent le parquet, les clôtures sont à terre, tables et chaises sont abîmées. Côté mer, les petits abris faits de tonneaux sont totalement détruits. Une atmosphère post-cataclysmique règne, et le désarroi et la colère se lisent sur les visages des serveurs. Des dizaines de clients sont attablés pour le déjeuner, sur la terrasse à droite de l’établissement, beaucoup sont venus déjeuner en soutien à l’équipe.
L’un des employés, sous couvert d’anonymat, accepte de nous conter la matinée houleuse de ce dimanche, et nous livre son analyse des faits.
« Vas-y, casse, c’est chez les zoreils ici, toi, tu es chez toi »
« Karl Bellon a chauffé la foule pendant une heure, puis est parti se cacher dans sa maison (en face des paillotes, ndlr) une minute avant la casse, pour ne pas être mêlé à l’affaire », nous affirme l’employé. Puis de nous raconter la scène de saccage qui s’est ensuivie: « Ils sont venus par deux fois tout casser à la massue, il y avait des enfants parmi eux, les policiers, à notre demande d’intervention nous ont répondu que tant qu’ils ne s’en prenaient pas à des personnes, ils ne pouvaient intervenir, au vu de la présence d’enfants. » « Ils se sont servis des gosses comme de boucliers humains, mais les ont aussi encouragé à participer à la casse », s’insurge-t-il. « J’ai entendu quelqu’un dire à un gosse ‘Vas-y, casse, c’est chez les zoreils ici, toi, tu es chez toi' ». Des propos qui ont forcément choqué le personnel : « Encourager des enfants au saccage et au racisme, quelle belle image du vivre-ensemble réunionnais! » . « En arrière-plan des casseurs, les gens de ‘Croire et oser’ poussaient des cris de joie et applaudissaient à tout rompre », s’indigne l’employé.
« Ils se servent de l’écologie comme prétexte »
La seconde terrasse, qui était en cours de travaux, a été vandalisée elle aussi. Des travaux qui font l’objet de critiques de la part du mouvement anti-paillotes, Alain Bénard et Karl Bellon en tête, lesdits travaux ayant été entamés après la décision du tribunal administratif de suspendre les AOT des paillotes. L’employé interrogé nous explique que c’est la DEAL qui a enjoint à La Bobine d’agrandir de 100 m2 une terrasse existante de 75 m2, celle tout au bord de la mer était devenue dangereuse de par la montée des eaux. « Nous avons donné les plans à la DEAL, qui les a validés. Toutes les semaines, des gens de la DEAL venaient vérifier la conformité des travaux avec les plans validés par eux. », précise l’homme, qui travaille depuis plus de 10 ans à La Bobine, et semble très au fait des détail techniques.
Quant au respect du PPR, l’homme précise : « On est les premiers à être volontaires pour s’installer en arrière-plage, reconstruire sur le parking, avec une terrasse amovible sous les filaos, on veut juste le bail adéquat ». Mais il doute que ce soit la volonté du mouvement, car, dit-il, « Le fond du problème, c’est qu’ils se servent de l’écologie comme prétexte, mais en réalité, certains riverains à l’origine du mouvement souhaitent juste récupérer leur vue sur l’océan, qu’on leur gâche. Si nous étions en arrière-plage, nous serions encore plus près de leurs villas ».