Au mois de septembre 2015, j’ai écrit une lettre ouverte apportant mon témoignage sur la situation de la Sica Lait que j’avais intitulé « [Sica Lait : En attendant la fin…]urlblank:http://www.zinfos974.com/Sica-Lait-En-attendant-la-fin_a90994.html « .
Cette fin est déjà arrivée pour certains d’entre nous et je le déplore, et est malheureusement annoncée pour d’autres collègues, et je pense que mon tour viendra aussi (pour le plus grand plaisir de certains, je n’en doute pas !).
Certains éleveurs cessent leur activité pour des raisons financières, et il faut à un moment avoir le courage d’arrêter l’hémorragie même si nous travaillons avec passion. Mais le pire de tout, je pense, c’est d’arrêter par ras le bol du système et de la situation végétative actuelle.
En l’espace d’un an, faut-il le rappeler, la Sica Lait a connu 4 présidents et donc 4 conseils d’administration. Cette instabilité, doublée d’une direction quasi inexistante, fait que nombreux sont ceux qui n’ont plus de visibilité sur leur avenir. Certains continuent avec espoir de voir changer la situation et d’autres jettent l’éponge.
Longtemps, je me suis battue contre ceux qui se contentaient de produire du lait en disant que de toute façon, il sera payé, sans se poser la question du lendemain.
Je ne suis pas fière de l’avouer mais depuis plusieurs semaines, face à l’inertie de la filière, de l’autorité de tutelle, de l’état,…, j’en suis arrivée au même raisonnement. Et ça, ce n’est pas moi. Je me bats au quotidien pour continuer à produire un lait de qualité et à faire de mon mieux mais ma seule volonté ne suffira pas, à terme, à garder ma motivation et à continuer à travailler avec passion.
Je m’étais promis de rester en retrait et de la fermer mais je suis consternée par l’attitude de nos dirigeants qui n’ont pas l’air de prendre la mesure des conséquences catastrophiques de toutes ces cessations d’activités.
Je suis outrée par le comportement de certains éleveurs qui pensent que la disparition de certains collègues leur permettra de gagner plus. Ils n’ont pas compris que l’existence de chacun d’entre nous dépend des autres.
L’actualité métropolitaine a pourtant de quoi faire réfléchir. A la Réunion, nous avons la chance d’avoir un prix stable et une production écoulée en totalité quelque soit la quantité.
Cette situation de merde (il faut appeler un chat, un chat) devient insupportable. Les élevages disparaissent d’année en année et cela n’a pas l’air d’inquiéter qui que ce soit. Nous avons aujourd’hui la chance qu’il n’y ait pas eu de perte humaine parmi les collègues, mais peut être est ce le seul moyen de faire réagir ? Que Dieu nous en préserve !!
Que faut-il pour mettre un terme à toute cette indifférence ?
Que faut-il pour que les éleveurs arrêtent de se tirer dans les pattes et comprennent qu’ils doivent travailler ensemble pour s’en sortir et réussir ?
Que faut-il pour rétablir cette confiance perdue suite à l’année écoulée ?
Sommes-nous suffisamment intelligents pour tourner la page et passer à autre chose ?
Personnellement, cette situation, je la trouve frustrante et elle me fait peur. Je sais que je saurai rebondir, mais je n’ai pas envie d’abandonner un métier, un choix de vie pour des raisons que beaucoup d’entre nous ne comprennent même pas tellement elles sont futiles.
Est-ce une guerre de pouvoir ?
Est-ce un manque de courage et de fermeté ?
Les questions sont posées.
Danielle BOYER