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[Jules Bénard] Jeu macabre ? Lynchage ? Pulsion morbide ? Le désir de tuer n’était pas niable !

Correctionnelle Champ-Fleuri - Vendredi 8 novembre 2019 :

Ecrit par Jules Bénard – le samedi 09 novembre 2019 à 08H37

Le morbide sanguinaire fleurit à la télé et dans les journaux. Pas une semaine qui ne nous offre sa ration de monstruosités en tout genre ! À Moufia, untel larde sa compagne de coups de couteau. Dans les Hauts de l’Est, tel autre démembre puis brûle sa jeune victime. Au Col-de-Bellevue, on retrouve le corps d’une femme : elle a été torturée puis ficelée dans tous les sens avant que son corps ne soit jeté en pâture aux hordes de chiens sauvages errant dans le coin. On en a tant vu, j’en ai tant vu que je ne devrais plus m’étonner de rien. Ben si !

Par jeu, « quelques salauds » (combien au juste ?) ont voulu tuer Peter, la nuit du 29 au 30 juin 2016, aux Roches-Noires. En fait d’instinct sanguinaire, ils dépassent largement les requins qui, dit-on, hantent ces parages. Sauf que les requins attaquent pour se nourrir. Pas par désir de tuer.  Alors que là… !

La volonté manifeste d’annihiler un être humain

Au petit matin, ce 30 juin, une maman s’inquiète ; son fils Peter, 19 ans, n’a plus donné signe de vie depuis la veille en matinée. Il devait passer la soirée à jouer aux jeux vidéo avec un copain, ce qui a bien eu lieu ; depuis, plus de nouvelles. Personne ne sait ce qu’il est devenu, pas même l’ami en question. Folle d’inquiétude, la maman prévient la gendarmerie. Celle-ci, quelques heures plus tard, l’avertit qu’on a retrouvé sur la plage des Roches-Noires un jeune homme inanimé dont la description ressemble fort à celle de son gamin.

On imagine l’angoisse folle de cette maman songeant déjà au pire…

Il s’agit bien de lui, inconscient et vite pris en charge par les pompiers puis évacué au service d’urgences neurologiques du CHU de Saint-Pierre. La liste des constatations des médecins est longue : fractures partout, lésions idem, hémorragie cérébrale, lacération du nerf optique de l’oeil gauche, d’importantes cicatrices à la face, aux bras, aux jambes, aux genoux. Les premières constatations des gendarmes démontrent que si le malheureux a été retrouvé au pied d’un mur de six mètres, c’est qu’il a été précipité de là-haut et n’a, en aucun cas, pu tomber tout seul. Une ITT de 200 jours est prononcée mais c’est le moindre mal, si j’ose dire, car les séquelles vont bien au-delà de ces 200 jours : elles sont à vie. Perte totale de l’oeil gauche, choc psychique indélébile, sautes d’humeur fréquentes, peur de sortir de chez lui et, diminué physiquement, incapacité totale à se projeter dans l’avenir, proche ou lointain.

La maman et le fils se sont exilés en métropole car la terreur, chez ces deux êtres, est permanente. Même « là-bas », elle est lancinante, impossible à éradiquer.

Un coupable très bavard

La piste des malfaiteurs sera assez vite remontée, grâce à Saïdi (prénom d’emprunt), un jeune Mahorais ami de Peter. À quelques temps de là, Saïdi se promène près d’un bistrot du port de Saint-Gilles et quelle n’est pas sa surprise en entendant une bande de jeunes en train de picoler se gausser d’un méfait commis voici peu. En bref : « Mwin lavé envie tape in moune à soir-là… Mwin la tape à li dans son tête minm… » Le jeune homme entend aussi l’un des bavards dire qu’ils ont « balancé quelqu’un sur la plage ».

Meurtri dans son amitié envers Peter, Saïdi, qui ne manque ni d’aplomb ni, encore moins, de courage, se dirige vers le groupe et, à brûle-pourpoint, leur demande si ce sont eux qui ont presque tué Peter. Ils s’énervent, se font menaçants et bousculent Saïdi qui ne peut que s’enfuir. Que vouliez-vous qu’il fît contre quatre ? Ben il est logiquement allé le raconter à la gendarmerie toute proche.

D’interrogatoires en recoupements, les enquêteurs mettent la main sur Anaël qui semble bien être le meneur du groupe de sinistres. Puis, de fil en aiguille, d’auditions en séances de « tapissage » (reconnaissances sur photos) et surtout, grâce à la veulerie du premier responsable, Anaël, qui « balance » à tire-larigot, un groupe de quatre jeunes est placé en garde à vue puis en détention provisoire.

Le susnommé Anaël, rompant avec les obligations de sa liberté conditionnelle, s’est esquivé en métropole, manifestement avec la complicité de sa mère. Sur les trois autres, seul Nicolas est resté sous les verrous, les deux autres libérés sous conditions, des conditions qu’ils ont manifestement respectées.

Seuls paraissaient donc à l’audience ce matin Nicolas, menotté et jouant à l’invalide, et « X » et « Y ». On verra plus loin pourquoi nous les appelons ainsi.

« Encore in’ chance lu lé encore en vie ! »

Seuls Anaël et Nicolas sont formellement reconnus sur photos. X et Y sont à la barre parce que dénoncés par Anaël.

Le motif de cette sauvagerie ? Dans une première version, Anaël prétend que Peter serait venu leur demander du zamal avant de se montrer agressif, voire menaçant. Ils l’auraient alors poursuivi en tapant à qui mieux-mieux, à coups de poing, de pied, de bouteille, jusqu’à ce que Peter s’écroule. Suite à quoi ils prennent le corps et le « balancent » du haut d’un mur de 6 mètres de haut !

« Encore in’ chance lu lé encore en vie ! » dira même un de ces fumiers.

Dans une seconde version, même si cela ne change rien à la suite de l’affaire, Peter « aurait » fait des avances à la soeur de la copine de Nicolas. Ce qui, avouons-le, est un motif valable pour vouloir lyncher quelqu’un à mort…

Les raisons plus profondes ? Ils auraient bu, beaucoup : une bouteille et demie de rhum charrette à quatre, plus de la vodka et enfin quelques petites bières (chacun) pour étancher une dernière ‘tite soif.

Il apparaît que Peter au sol, inconscient, ils auraient continué à s’acharner sur son corps pantelant, coups de pied dans les côtes, coups de bouteille à la tête… Tous les quatre y seraient allés de leur animalité la plus profonde. Ce qui s’appelle volonté d’en finir une fois pour toutes.

Atmosphère particulièrement insoutenable dans la salle d’audience. Certains sont sortis précipitamment. Le Président Molié, d’habitude mutin et moucateur, avait du mal à dissimuler son écoeurement. Dieu sait s’il en a vu pourtant, cet homme !

Quand on dit « les quatre ont continué à frapper », une question se pose : « quels quatre ? »

Des séquelles irréversibles

Car si pour Anaël et Nicolas, la question de leur participation ne se pose pas, il n’en va pas du tout de même concernant X et Y. L’un est à moitié invalide ; difficile donc de courir et taper. L’autre a des alibis le montrant ailleurs au moment de la mise à mort.

La procureure Delmoitié a dégainé la MG44, parlant longuement de cette maman découvrant le corps presque sans vie de son fils unique, au petit jour, abandonné comme un chien, presque invisible, avant d’insister sur le détail des blessures et les séquelles irréversibles de Peter, peignant à notre intention et celle des juges le portrait de ce jeune, bandeau sur l’oeil gauche, cloîtré peur au ventre, ne fréquentant plus personne, sujet à de fréquentes crises de colère, lui si doux auparavant, n’existant plus que grâce à l’amour inconditionnel d’une mère. La procureur a sollicité 4 ans de prison contre trois des accusés, et seulement trois contre X.

La tâche des défenseurs avait quelque chose du combat de Persée contre la Méduse…

Le bâtonnier Georges-André Hoarau, brillant, incisif comme toujours, défendait Nicolas, « dont la culpabilité tient aux seuls aveux d’Anaël. Si on peut se transformer en accusateur rien qu’en citant un nom… »

Me Lefèvre et Navarro, défenseurs de X et Y, opiniâtres, se sont étendus à propos des alibis de leurs clients… et ont obtenu gain de cause : X et Y ont été relaxés « car trop d’éléments sont en contradiction avec les déclarations d’Anaël ».

Anaël et Nicolas écopent de 4 ans dont un avec sursis et mise à l’épreuve, « en raison de l’extrême gravité des faits, des actes indignes, lamentables », a encore commenté le président Molié.

Nicolas a réintégré sa cellule. Quant à Anaël, mandat d’arrêt au prose, il aura l’insigne privilège d’être recherché par toutes les polices de France et d’Europe.

 

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