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Je porte plainte contre Paul Vergès, Nassimah Dindar, Gilbert Annette…

Parfois, je ne pouvais m’empêcher d’esquisser un sourire en lisant des commentaires reprochant à Zinfos de ne faire que dénoncer, sans que personne ne porte plainte contre les faits révélés. Ça me démangeait de révéler que j’avais porté plainte dès le 25 juin 2009 auprès du Procureur de la République contre Paul Vergès, Pierre Vergès, […]

Ecrit par Pierrot Dupuy – le mardi 03 novembre 2009 à 10H23

Parfois, je ne pouvais m’empêcher d’esquisser un sourire en lisant des commentaires reprochant à Zinfos de ne faire que dénoncer, sans que personne ne porte plainte contre les faits révélés.

Ça me démangeait de révéler que j’avais porté plainte dès le 25 juin 2009 auprès du Procureur de la République contre Paul Vergès, Pierre Vergès, Nassimah Dindar, Gilbert Annette et Monique Orphée pour prise illégale d’intérêt.

En fait, je reproche à ces cinq personnalités politiques (voir le texte complet de ma plainte ci-dessous) d’avoir embauché des membres de leurs familles dans les différentes collectivités dont ils ont la charge, en violation de l’article 432-12 du Code pénal.

Dans une démarche fort courageuse, François Muguet, le procureur de la République au Tribunal de Grande instance de Saint-Denis, n’a même pas daigné me faire savoir qu’il ne comptait donner aucune suite à ma plainte, ce qui me contraint aujourd’hui, le délai de latence de trois mois étant largement dépassé, à déposer la même plainte, mais avec constitution de partie civile cette fois-ci, entre les mains de Mme Brigitte Lagière, doyen des juges d’instruction au même tribunal.

Si je ne vous avais pas parlé de ma plainte à l’époque, c’était pour éviter que le Procureur ne se saisisse de ce prétexte pour ne pas y donner suite. Aujourd’hui, je peux la rendre publique puisqu’avec la constitution de partie civile, je suis certain qu’il y aura une enquête.

Cette procédure de plainte avec constitution de partie civile a un avantage et un inconvénient. L’avantage, c’est comme je l’ai dit, d’être certain qu’une enquête sera diligentée. L’inconvénient est qu’il me faudra payer une consignation d’un montant que le juge fixera….

 

                                                                      

COPIE DE LA PLAINTE
                

                                                                      Madame Brigitte LAGIERE
                                                                      Juge d’Instruction
                                                                      Tribunal de Grande Instance
                                                                      Champ Fleuri
                                                                      97490 SAINTE-CLOTILDE

Madame Le doyen des Juges d’Instruction,

Compte tenu du mutisme du Parquet suite à ma la plainte au Procureur du 25 Juin 2009, je dépose plainte avec constitution de partie civile entre vos mains pour prise illégale d’intérêt contre Mme Nassimah Dindar, Présidente du Conseil Général, contre le maire de Saint-Denis, Monsieur Gilbert Annette et contre Madame Monique Orphée, 1ère adjointe au maire de Saint-Denis.

Les faits sont simples.

1 – S’agissant de la Région tout d’abord, M. Paul VERGES a recruté sa fille Françoise Vergès à la Région Réunion, alors qu’il a la charge en tant que président de cette collectivité. Elle occupe la fonction de directrice technique du projet de la Maison des Civilisations et de l’Unité réunionnaise.

Par ailleurs, le petit fils de Paul Verges, M. Mael Vergès, à travaillé jusqu’à une date récente à la SR21, société d’économie mixte dont la région est actionnaire. Je note que le délit est également constitué à l’encontre de M. Pierre Vergès, PDG de la SR21 et père de M. Mael Vergès.

2 – S’agissant du Département, je constate que les emplois familiaux prospèrent soit au Conseil général même, soit dans des organismes satellites.

Ainsi, Mme Dindar a, pendant un temps (2007-2008), fait travailler son propre fils, M. Abdul Hack Mangrolia, au Cabinet du Département. Vous conviendrez avec moi que la loi n’exclut nullement du périmètre délit les emplois de Cabinet.

De plus, la compagne de ce dernier, Rizwanah Omarjee, duquel il a eu deux enfants, a été embauchée à l’accueil de l’Agence départementale d’insertion (ADI), présidée par Mme Dindar. Elle a été titularisée en un temps record.
Son neveu, M. Adam Mangrolia, travaille également à l’ADI de même que la tante par alliance de Mme Nassimah Dindar, Mme Kretif Haliman, née Badat.

M. Imrane Ingar, le fiancé de la fille de Mme Nassimah Dindar, a, de son côté, obtenu un emploi au SDIS (Service départemental d’incendie et de secours), organisme présidé aussi par Mme Dindar.

3 – S’agissant de la mairie de Saint-Denis, M. Gilbert Annette a recruté son fils M. Didier Annette au Cabinet.

Par ailleurs, il a accordé une promotion à la femme de son autre fils, Christophe, à la direction de l’Urbanisme. Mme Paramée avait certes été embauchée sous la période Victoria, mais sa promotion est survenue après l’élection de M. Gilbert Annette.

4 – Mme Monique Orphée, 1ère adjointe, a également embauché son frère Johnny à la CINOR dont elle est élue.

Je tiens à ajouter que bien qu’ayant attentivement lu les textes de loi et les nombreuses jurisprudences sur le sujet, je n’ai trouvé à aucun moment d’éléments tendant à accorder un statut spécifique aux emplois de Cabinet, qui les aurait exclus du champ de la prise illégale d’intérêt.

J’ajoute que pour avoir octroyé un simple CES à une personne avec laquelle il a eu une liaison passagère le Maire de Cilaos a récemment été condamné par la Cour d’Appel de Saint-Denis.

Or, les faits qui nous occupent sont beaucoup plus graves.

Des élus locaux sont régulièrement condamnés à la Réunion comme en Métropole, pour avoir embauché un membre de leur famille. Dans un contexte social difficile, dans lequel des dizaines de milliers de Réunionnais recherchent ou perdent un emploi, vous conviendrez que le trouble à l’ordre public occasionné par ces pratiques népotiques connues de tous, est considérable.

J’offre de régler la consignation que vous fixerez.

Je vous prie de croire, Madame Le doyen des Juges d’Instruction, à l’assurance de ma considération distinguée.

                                                                                                       P. DUPUY

P.J. : Plainte au Procureur en date du 27/05/2009 restée sans réponse.

 

Qu’est ce que je reproche à tout ce beau monde?

1) En ce qui concerne Paul Vergès, d’avoir embauché sa fille Françoise en tant que directrice technique du projet de la Maison des Civilisations et de l’Unité réunionnaise et son petit fils Maël à la SR21, une SEM de la Région. Maël Vergès a depuis démissionné pour être embauché à CBO Territoria, mais le délai de prescription n’est pas forclos et ces faits peuvent donc encore faire l’objet d’une plainte.

Au passage, le même reproche de prise illégale d’intérêt peut être fait à Pierre Vergès, le PDG de la SR21…

2) Concernant Nassimah Dindar, la liste des membres de sa famille embauchés au Conseil général est longue comme le bras. Je n’en ai donc retenu que certains, les plus voyants (voir la liste dans la plainte ci-dessous). Il appartiendra à l’enquête de mettre en lumière la liste complète…

3) Pour Gilbert Annette, on peut lui reprocher l’embauche de son fils Didier au Cabinet, tandis qu’il a accordé une promotion à sa belle-fille qui vient d’obtenir le poste de DGA (directrice générale adjointe) en plus de ses fonctions de directrice de l’Urbanisme.

4) Enfin, au passage, j’ai appris que le frère de Monique Orphée venait d’être embauché à la CINOR, ce qui lui vaut d’être également citée dans ma plainte.

 

Que dit la loi ?

Selon l’article 432-12 du Code pénal, la prise illégale d’intérêts est « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement. Il est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende« .

Pour Me Régis de Castelneau (Gazette des communes du 7 février 2000), cet article signifie que la décision publique doit être “chimiquement pure et ne souffrir aucun soupçon de pollution par un intérêt privé”.

L’article 432-12 ratisse très large et il est revenu aux tribunaux, et notamment à la Cour de Cassation, grâce à des arrêts portant sur des exemples concrets, de déterminer jusqu’où pouvait aller cette mise en cause pour prise illégale d’intérêt. Et force est de constater qu’ils se sont montrés sévères dans l’application de la loi.

C’est ainsi qu’il a été estimé qu’une employée d’une structure intercommunale, qui était mise à la disposition de plusieurs communes depuis 15 ans, et qui avait souhaité travailler à temps plein sur la commune centre qui l’emploie déjà à 80 %, ne pouvait le faire au motif que son beau-frère avait été élu maire de cette commune.

 

Où commence la prise illégale d’intérêts ?

Selon l’Observatoire des risques juridiques des collectivités territoriales, « la philosophie générale du délit de prise illégale d’intérêts est de réprimer toute collusion réelle, apparente ou même supposée d’un intérêt public avec un intérêt privé.

Dès lors, peu importe que l’élu ou le fonctionnaire concerné ait retiré ou non un avantage personnel. Et il n’importe pas davantage que la collectivité ait ou non été effectivement lésée.

La rédaction de l’article 432-12 du Code pénal est très large, s’agissant de réprimer la prise d’un “intérêt
quelconque”. Autant dire qu’il n’y aucune limite textuelle quant à la nature et à l’intensité de l’intérêt en cause. De fait, la Cour de cassation considère qu’un intérêt moral ou un intérêt indirect, par interposition de personne, suffit à caractériser le délit.

A ainsi été condamné l’élu, président d’une Chambre de commerce et d’industrie, qui avait accordé une concession du domaine public à une entreprise dans laquelle son gendre exerçait des fonctions de directeur technique (Cass crim 5 novembre 1998, bull 289).

Dans un autre arrêt rendu la même année (Cass. Crim 22 septembre 1998), la Cour de cassation a condamné l’élu qui avait obtenu la signature par le président de son assemblée territoriale de deux contrats de travail en faveur de son épouse et de sa sœur. Le fait qu’il s’agissait en l’espèce d’emplois fictifs n’a certes pas incité les juges à la clémence mais l’on peut penser que le délit aurait été caractérisé même sans cette circonstance aggravante.

Une incrimination tous azimuts

Tout est question d’appréciation au cas par cas par le juge. Ainsi, le très officiel Rapport de la Cour de cassation de l’année 1999 reconnaît une incrimination tous azimuts : du conjoint au gendre en passant par le concubin de l’enfant (situation soumise au tribunal correctionnel de Draguignan, qui, par jugement du 22 décembre 1997, a retenu le délit), jusqu’à l’ami ou la… “connaissance”, de sorte que “la situation délictueuse s’arrête là où le soupçon n’a plus cours et qu’il appartiendra aux juges du fond de faire le partage, dans cette dernière hypothèse, entre les cas où la décision publique ne peut être soupçonnée de partialité et ceux où elle peut l’être. Il s’agit d’une question de fait.”

Et l’Observatoire des risques juridiques des collectivités territoriales de constater que « la reconnaissance d’une telle subjectivité n’est pas forcément rassurante ».

Pas d’exonération par l’antériorité

Autre exemple donné par l’Observatoire : « Mme T. a été recrutée par voie de concours avant que son beau-frère ne soit élu maire. Cette circonstance serait-elle de nature à écarter la mise en jeu de sa responsabilité ? Rien n’en moins sûr…

En témoignent trois récentes questions parlementaires : un maire nouvellement élu peut-il renouveler
sans commettre une prise illégale d’intérêts le contrat de sa fille qui avant son élection était employée en CDD par la commune comme femme de ménage ? Les trois réponses sont concordantes sur le fond : “Lorsqu’un agent appartenant à la famille de l’autorité territoriale est recruté sans concours, un tel recrutement peut-être constitutif d’une prise illégale d’intérêts si l’élu concerné est l’exécutif de la collectivité au jour où intervient la décision, qu’il s’agisse d’un recrutement initial ou d’un renouvellement de contrat, même dans des conditions similaires de durée et de rémunération”.

Par contre, « on peut penser qu’un fonctionnaire en poste a droit au maintien de son emploi quand bien même l’un de ses proches serait élu maire. En effet, il n’y a pas de nouveau contrat de travail et le maire hérite des fonctionnaires en place« . Il en va différemment quand il s’agit d’une titularisation ou d’une promotion survenue après l’élection du nouveau maire, parent de l’agent en cause. C’est ce que je reproche à Gilbert Annette qui a accordé une promotion à sa belle fille.

Au passage, notons cette remarque intéressante de l’Observatoire : « La non participation du maire à la délibération n’y change rien : selon l’article L 2122-18 du Code général des collectivités territoriales, il est en effet seul chargé de l’administration de la commune et s’il peut déléguer ses fonctions ou sa signature (article L 2122-19 du CGCT) c’est toujours “sous sa surveillance et sous sa responsabilité”.

Pour ceux qui douteraient de l’application de ce texte de loi, je voudrais leur rappeler que le maire de Cilaos a récemment été condamné pour des faits beaucoup moins graves : avoir octroyé un contrat aidé à une amie avec laquelle il avait eu une relation passagère… On est loin des embauches sur des emplois pérennes avec des salaires mirobolants…

Enfin, je ne porte plainte que contre la Région, le Département, la ville de Saint-Denis et la CINOR parce que ce sont les collectivités dans lesquelles je suis contribuable. C’est ce qu’on appelle en droit « l’intérêt à agir« . Mais, bien évidemment, je sais que les mêmes abus existent dans d’autres communes. Aux autres citoyens de prendre leurs responsabilités…

 

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