Août 2017: près de Toulouse, un couple a la lumineuse idée de donner à son bébé le prénom de Djihad. La mairie, chargée de l’état-civil, saisit le procureur, estimant que ce prénom pourrait porter préjudice à l’enfant. Le juge aux affaires familiales a retoqué le prénom, en inversant les deux voyelles : Djihad sera Djahid. Une inversion de voyelles permise par l’article 57 du code civil, qui stipule que « si le juge estime que le prénom n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant ou méconnaît le droit des tiers à voir protéger leur nom de famille, il en ordonne la suppression sur les registres de l’état civil ».
En arabe, le mot djihad n’a pas seulement la signification qu’on lui attribue, de « guerre sainte », celle que pensent mener les terroristes islamistes, mais signifie aussi « abnégation, effort, lutte, ou résistance ». Pris en ce sens, le djihad est un devoir religieux en Islam: il s’agit de « faire un effort dans le chemin de Dieu ». Néanmoins, le contexte actuel d’attentats explique la décision de justice et l’inquiétude de l’agent de l’état-civil.
C’est la seconde fois que le prénom Djihad est refusé par la République : en 2016, un couple de Roubaix s’était également vu opposer une fin de non-recevoir. En revanche, en 2012, un enfant de 3 ans ainsi prénommé avait été envoyé à l’école arborant un tee-shirt portant, devant, l’inscription « Je suis une bombe », et au dos « Jihad, né le 11 septembre ». Sa mère et son oncle ont été poursuivis pour « apologie de crime », mais relaxés en 2013. Une décision motivée par l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, qui prévoit que l’apologie de crime doit être non équivoque.