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Ile à vendre dans l’océan indien. Pas sérieux s’abstenir. (2/2)

Quand le parc national et Daniel Gonthier ont vendu La Réunion.

Ecrit par collectif – le vendredi 17 septembre 2010 à 15H49

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Début de l’article sur http://www.zinfos974.com/Ile-a-vendre-dans-l-ocean-Indien-Pas-serieux-s-abstenir-1-2_a21199.html

La véritable question qui intéresse les banquiers et les fonds d’investissement, c’est à l’évidence de transformer la biodiversité en fonds monétaire. Des systèmes de compensation, comme le « Paiement et compensation des services environnementaux » (PSE) sont déjà en vigueur. Pratiqué depuis quelques décennies, ce système se résume à cette idée : les écosystèmes fournissent des services essentiels au bien-être humain, pourquoi ne pas les faire payer? Pour les pays du Sud, la FAO (organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) a proposé une convention-type de PSE. Elle incite, par exemple, les agriculteurs à cesser la culture sur brûlis ou à pratiquer l’écobuage… « Toutefois, le PSE ne s’applique pas aux multinationales, en particulier celles qui détruisent les forêts pour planter des palmiers à huile.  Il ne contraint que les petits paysans qui mettent fin à leurs droits d’usages » reconnaît Alain Karsenty, du CIRAD, à la conférence de l’International center for research on environmental issues (ICREI), ou centre international de recherche sur l’environnement (fondé par Alain Madelin, un protecteur acharné de l’environnement), réuni à Aix-en-Provence en juin dernier. Tout cela rappelle étrangement le sort des éleveurs et des Mafatais dans le parc des hauts!!

Après le marché des droits à polluer pour le climat, la mise en place d’un marché de la biodiversité, avec des droits de compensation et des « mécanismes de développement vert », est à l’ordre du jour. Ce sera sur la table de la prochaine conférence au Japon, en octobre. Un tel « marché » induit la possibilité de détruire la biodiversité quelque part à condition de la remplacer ailleurs. Il se met déjà en place. La Caisse des dépôts a créé une filiale pour gérer ce genre de titres. On commercialise la nature dans ce qu’elle a de plus essentiel, le vivant et la biodiversité. Difficile d’aller plus loin. Il existe donc les « réserves d’actifs naturels » (RAN), que la filiale biodiversité de la Caisse des dépôts et consignations commence à créer en achetant des terrains qu’elle remet à l’état de « nature », comme elle l’a déjà fait dans la plaine de la Crau (http://www.caissedesdepots.fr/developpement-durable/innover-pour-lenvironnement/biodiversite.html). Par ailleurs, la filiale gère des espaces de compensation pendant 30 à 50 ans pour le compte d’un aménageur (exemple de l’autoroute A 65).  

Pour gérer ces contrats, les banques de compensation entrent en jeu. « Elles existent déjà aux Etats-Unis pour les zones humides », a expliqué Capucine Chamoux, de l’ambassade américaine à Paris, lors de la conférence de l’ICREI. Une société privée finance, via un crédit bancaire, la restauration d’une zone humide; « celui qui offre la meilleure prestation au plus bas prix emporte le marché de gestion ». Autant dire que les banques attendent avec une grande impatiente la charte du parc des hauts, plan de gestion des 2/3 de La Réunion!

Chacun sait que les banques de compensation, telles Clearstream, ne sont absolument pas régulées. Leurs activités sont fondées sur les contrats à terme qu’elles transfèrent ensuite aux chambres de compensation chargées de vérifier les transactions. Leur fonctionnement est si opaque qu’en 2008, elles ont été qualifiées de « trou noir de la finance ». Comment peut-on prétendre qu’elles vont protéger la biodiversité et les écosystèmes  ?

Selon Sarah Hernandez, économiste environnementale et chargée de mission à Office Nationale de l’eau et des milieux aquatiques, la compensation financière a toutes les chances de devenir « une licence de destruction » de la nature. Le seul intérêt serait donc celui des banques. Elles seront habilitées à transformer les territoires en actifs financiers et ceci n’est pas une vue de l’esprit. L’Allemagne n’a-t-elle pas suggéré, en mars dernier, que la Grèce « offre ses îles » pour compenser sa dette? Grâce aux réserves d’actifs naturels, les banques  auront davantage d’occasion de spéculer. 

Cette préséance accordée aux fonds spéculatifs dans le management global des écosystèmes de la planète, aussi scandaleuse qu’elle soit, n’est pas tout à fait surprenante. La richesse et le pouvoir ont changé de mains aux Etats-Unis en 2007. Devançant pour la première fois les patrons d’entreprises industrielles ou technologiques, les responsables des fonds spéculatifs et privés sont arrivés en tête du classement des fortunes publié dans Forbes Magazine. Et ils comptent bien conserver la première place. Le cœur du capitalisme financier s’apprête à franchir un nouveau pas : se garantir sur nos réserves d’actifs naturels.

Après avoir coulé le système économique par des investissements véreux, il ne manque plus aux banques que de couler la terre. Voilà donc pourquoi les banques réunionnaises ont soutenu si activement la candidature de La Réunion au patrimoine mondial. La population en a t-elle seulement conscience? Lui a-ton demandé son avis au regard de ces éclairages ?

Au nom de la biodiversité, cette nouvelle gouvernance affectera le statut et le sort de toutes les ressources naturelles pour des décennies. L’OMC ne s’y est pas trompé. Son rapport sur le commerce mondial 2010, publié fin juillet, s’intitule « Commerce des ressources naturelles ». Son directeur, Pascal Lamy se félicitait dans un communiqué du 27 juillet 2010 que « les choses » allaient bouger en octobre. Bouger pour qui et dans quel sens ? Cette financiarisation de la nature va soustraire  aux communautés locales et aux souverainetés nationales l’usage de leurs ressources et territoires. « On ne peut pas protéger la biodiversité sans toucher au droit de propriété », affirmait Patrick Hubert, ex-conseiller d’État qui a dirigé plusieurs cabinets ministériels, dont celui de Dominique Perben. 

Cette nouvelle gestion implique la transformation du droit de propriété, propriété individuelle, bien sûr, mais aussi propriétés de l’État et des communes, propriétés collectives en Afrique et dans l’hémisphère Sud en général. Certes, l’érosion génétique, la dégradation des écosystèmes et l’épuisement des ressources prennent des proportions alarmantes. Mais les solutions proposées par les technocrates et les financiers à Nagoya, vont à contre-sens de la préservation de la nature. Vont-ils y parvenir à les imposer ? L’alerte sur le détournement de Nagoya est lancée et commence à se répercuter à travers la planète (http://www.truth-out.org/big-bodies-vs-biosphere56561).

A La Réunion vous rajoutez un soupçon du programme Gerry à tout ça et le tour de passe-passe prend encore plus de consistance. Quand l’ancienne majorité régionale était obsédée par la géothermie, la nouvelle présidence du conseil régional veut faire des lodges de luxe dans le parc des hauts, son nouveau dada. Gerry en facilitera également la réalisation puisqu’il dispose d’un volet tourisme. Assurément, tout comme le parc des hauts à autoriser en son temps la géothermie, nous pouvons compter sur son nouveau bureau pour valider les lodges luxueux dans le parc. Vous mettez la future charte du parc dans le paquet cadeau, programme de gestion pour les 10 prochaines années et les banques sont aux anges.

Pour Daniel Gonthier, président du parc des hauts et son staff, La Réunion « lé en ler ». Oui, mais pour qui? Alors La Réunion patrimoine des réunionnais ou patrimoine futur des partenaires bancaires du parc des hauts?

 

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