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Il escroque 50.000 euros à un ami… pour échapper à la prison !

Il y a les escrocs de haut vol... et les gagne-petit qui se font gauler à la moindre tentative. Vous avez aussi les présidents de correctionnelle sérieux comme des papes, et des procureurs qu'on dirait croqués par Gotlib... et les autres aussi. Ce mardi 26 mars, nous avons eu droit aux deux. D'abord un escroc tentant de se dédouaner en faisant passer sa victime pour un crétin ; puis un président et un accusateur public qui, pour détendre une atmosphère pesante, avouons-le, ont vogué entre pince-sans-rire et Michel Audiard. Encore, encore !...

Ecrit par Jules Bénard – le mercredi 27 mars 2019 à 07H43

Baiseur de paquet par habitude

L’affaire est d’une stupidité qui propulserait Van Damme ou Ribéry au rang des grands esprits.
Le sieur Imazoute, sans poil (aaaaarrrrrggggg !), la cinquantaine passée, propre, bien de sa (petite) personne, annonce d’emblée qu’il a bel et bien l’intention de rembourser les quelque 50.000 euros qu’il a « obtenus » de sa victime. Sauf que, depuis un paquet de temps, il n’a jamais commencé à rembourser que dalle.

On le comprend, le cher homme : son métier est de piquer du fric, pas de le rendre. Son curriculum-vitae, autrement dit son casier judiciaire, est porteur de condamnations à rallonges pour escroqueries, tromperies, abus de confiance et autres baisements de paquet. Et c’est justement pourquoi il en a tenté une troisième qui lui pète à la figure comme un feu d’artifice partant en cacahuète. J’explique…

Notre Filochard-du-pauvre avait sur les endosses une peine de prison assortie d’un sursis simple : soit il casquait ses 50.000 euros d’amende, soit il allait en vacances à Domenjod pour 2 piges. Mettez-vous à sa place, à ce pauvre homme. Il a eu vite trouvé la coupure car les bisets, c’est pas ce qui manque sur la place. Il avise un ami, appelons-le Hilarion, pour qui l’aventure sera funeste (inside joke pour bédéphiles).

Pourquoi casquer le Trésor public ?

Hilarion est un entrepreneur prospère (sans être cousu d’or), qui a la réputation d’être quelque peu naïf et c’est une litote. Imazoute va te lui tisser une toile d’araignée dans laquelle son ami va s’engluer pieds et poings liés.

Il aime investir ? Que voilà une idée qu’elle est bonne ! Il y a justement une station-service qui cherche un nouveau gérant à l’orée de Saint-André. 
Si tu veux emporter l’affaire, lui fait-il miroiter, il faut verser, admirez la précision des chiffres, un chèque de 45.590 euros au Trésor Public. Pour bloquer l’option, na !

Hilarion, comme disent nos frères malgaches, « tsy ita rano », traduisez « il n’y voit que de l’eau ». Nous, on dit « du feu ». C’est du pareil au même.
Le brave Hilarion ne se demande pas une seule seconde pourquoi il faut casquer le chèque au Trésor : son pote lui  dit que la station-service étant sur le domaine public, ça intéresse le Trésor public en premier.

Un môme de six ans serait déjà en train de se tordre de rire devant un tel tissu de conneries, mais pas notre brave Hilarion : les enfants des deux familles sont copains comme cochons, alors, alors, pourquoi grands dieux se méfier d’une si honorable proposition ?

Sauf que…
Sauf qu’au bout de quelque temps, Hilarion apprend que c’est un autre qui a obtenu le contrat de la station-service convoitée. Et que lui-même, ben, il peut s’astiquer la colonne !

« Les  escrocs, ça ose tout… »

De fil en aiguille, la vérité se fait jour dans les neurones d’Hilarion : « Je me suis donc fait b… la gu… ? Vraiment ? Moi ? »
Ben oui, toi ! 

L’enquête lui prouvera que sa lucidité, quoique tardive, est bel et bien totale. Comme disait Rigaud : « Aussi haut soit-on assis, ce n’est jamais que sur son c… »
Et c’est là, ce mardi après-midi à Champ-Fleuri, que juges, procureur et avocats nous ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Et quand je dis « le meilleur »…

Ce sont d’abord les avocats qui ont ouvert le bal, Mes Rakotonirina pour le plaignant, Normand pour l’escroc. Sans que l’on comprît pourquoi, ils se sont pris de bec, Me Normand accusant quasiment le plaignant d’être le malfaiteur. Comme à El Paso, la fièvre a monté, jusqu’à ce que le président Molié vînt y mettre bon ordre. En demandant à Me Normand :
« Qui a la police de l’audience, maître ? Vous ou moi ? Que chacun reste à sa place et les vaches, etc. »
C’était parti sur les chapeaux de roue d’une Shelby, les amis.

Pour la partie civile, Me Rakotonirina a défoncé le mur adverse avec l’acharnement d’une bibe. Incisif, voire vindicatif, il t’a enfoncé l’Imazoute sous ses délires de contradictions.
Le procureur Bernard n’a guère eu à forcer son talent : « Dans tous ces cas, l’accusé offre un visage lisse ; on lui fait confiance, c’est un ami ».
Et d’asséner : « Les escrocs, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît ! »
Michel Audiard, dans « Les tontons flingueurs », disait : « Les cons… etc. » Mais notre procureur a de ces pudeurs, aussi…

Me Normand a tenté l’impossible, jusqu’à réclamer la relaxe. Pas de bol !
L’Imazoute en prend pour 24 mois. 24 mois fermes dont seulement 6 mois avec sursis. Plus les 47.590 euros à rembourser. Plus 500 euros de préjudice moral. Plus 600 euros de frais de justice.
Paraît qu’il a les moyens…
 

 

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