Parce que faire face à la maladie de son fils de 16 ans relève d’un véritable sacerdoce, Heïdi a décidé de témoigner à visage découvert « pour les autres parents dans la souffrance également » et malgré les jugements qui culpabilisent ou qui accusent sans savoir.
Heïdi, elle-même handicapée, est mère célibataire de deux enfants, dont Lukas*. « C’est au moment où il est entré à l’école que nous avons remarqué que quelque chose clochait », se souvient-elle. Lukas, qui manifestait des troubles du comportement et de l’hyperactivité, ne nouait en effet aucun lien avec les autres enfants et « restait dans son coin ».
Aujourd’hui encore le diagnostic complet n’est pas posé, Lukas présente des troubles du spectre autistique (TSA) et est également suivi au CHU Sud pour présenter « très probablement une maladie génétique ».
Peu de place dans les établissements médico-sociaux spécialisés
C’est au collège que le calvaire aurait commencé pour la famille. « Beaucoup de souffrance et d’incompréhension « , résume Heïdi. À plusieurs reprises, Lukas a fait l’objet d’accusations dont notamment d’avoir eu un comportement sexuel inapproprié dans l’établissement scolaire. Il y a deux ans, une exclusion avec sursis avait déjà été prononcée, confie sa mère. En avril dernier, des faits du même type se sont reproduits. « Si mon fils a commis ces faits graves, je sais que ce sont les conséquences de son handicap. On parle d’intégration d’enfant porteur de handicap sans moyens adaptés. On tape sur les familles qui doivent se défendre seules ! »
Compte tenu de son handicap, Lukas a été sanctionné d’une exclusion avec sursis par le conseil de discipline, confirme le rectorat.
Heïdi est consciente que l’intégration scolaire pour son fils n’a pas fonctionné et a multiplié les démarches depuis plusieurs années pour qu’il soit accueilli dans un établissement médico-social spécialisé. SESSAD (service d’éducation spécialisé et de soins à domicile), IME (institut médico-éducatif), ESAT (Établissements ou Services d’Aide par le Travail), IMPRO (Institut Médico-PROfessionnel)…Heïdi dispose de toutes les notifications pour un avis favorable, mais les places sont limitées et la liste d’attente interminable. Une réalité confirmée par l’Agence Régionale de santé. Le département dispose de 58 structures, en comptant les ESAT, accueillant les enfants porteurs de handicap pour 3 325 places installées.
Et les délais d’attente, variables selon la nature de la structure et le type de public accueilli, « sont relativement conséquents », indique l’ARS. La cause: des taux d’équipement inférieurs à la métropole et plus particulièrement dans le secteur en charge des adultes. Le taux d’équipement en place dans les établissements pour enfants handicapés de moins de 20 ans pour 1 000 habitants est ainsi de 9,1 places contre 9,7 en métropole. Pour les adultes handicapés de 20 à 59 ans, il chute de 5,95 places contre 9,98 en métropole, soit quasi la moitié de l’offre hexagonale. Enfants et familles doivent ainsi compter des mois voire des années avant de pouvoir intégrer ces structures spécialisées.
« En tant que parent, on ne sait plus vers qui se tourner. Les solutions et les moyens manquent. Où est l’intérêt de l’enfant ? « , dénonce-t-elle. « On ne donne pas de chance aux enfants différents, ils sont vus la plupart du temps comme des monstres. Quant à nous parents, ce sont la culpabilité et le manque de considération qui nous accompagnent au quotidien », s’insurge Heïdi.
*prénom d’emprunt