Très chic, mince, joli visage empreint d’une profonde détresse, svelte en dépit de 7 grossesses, Florence, 33 ans mais en paraissant à peine 18, a tout pour émouvoir. Mais ne convainc pas grand-monde, en réalité. Pour le coup, c’est une incompréhension totale dans laquelle baignent le tribunal et l’auditoire.
Pas moins de 10 vols, contrefaçons de chèques, escroqueries et menus abus de confiance qui lui sont reprochés ; des faits qui ont tout-de-même fait quelque 14 victimes, dont certaines à plusieurs reprises mais il faut reconnaître qu’elles y ont souvent mis du leur.
Accusée de mauvais traitements… par erreur !
La genèse des ennuis de Florence est simple en elle-même. Ayant du mal à joindre les deux bouts, à élever seule ses 7 enfants, elle choisit la solution la plus simple (à ses yeux !) pour oublier ses ennuis : les boissons titrant plus de 40°. Elle s’enfonce de plus en plus dans l’alcool, ce qui n’arrange rien, pour elle qui vit avec un minimum social et les allocations. Pas le Pérou.
Pour ajouter à ses énormes problèmes, Florence doit tenir compte de sa petite fille, atteinte d’une maladie rare qui lui vaut, à elle, d’être accusée de mauvais traitements lourds à enfant.
Explication : la gamine porte sur tout son squelette (ce n’est visible qu’à la radio) des traces ressemblant à des coups répétés et violents. Mais qui ne marquent jamais sa peau ! De là à accuser la jeune mère de traitements inqualifiables à enfant, il n’y a qu’un pas que médecins (eux !) et juge des enfants franchissement sans états d’âme. On lui retire sa fille. La descente aux Enfers s’aggrave ; la consommation d’alcool aussi. C’est un médecin plus avisé que les autres qui, après radios approfondies et analyses, s’aperçoit que la jeune dame n’y est pour rien. On finira par lui rendre sa fille, soignée pour une maladie rare qui laisse des traces sur les os. Mais pour Florence, la spirale maudite est enclenchée.
Elle a trop forcé sur les adjuvants artificiels du bien-être et ne semble plus vraiment maîtresse de ses actes comme de ses raisonnements.
Elle a déjà plongé dans l’arnaque et le vol.
« Quand on est emporté… »
Elle va faire plusieurs fois la connaissance d’hommes en recherche de compagne peu regardante. Le problème est que ces hommes ne lui veulent que du bien… beaucoup de bien. Ils la prennent quelque peu en charge (!) et elle en profite pour piquer leurs chéquiers et cartes bancaires. Avec ça, elle écume les magasins du Sud, achète des choses et des trucs qui n’ont souvent qu’un lointain rapport avec la nécessité d’élever des enfants et soigner sa vieille mère, malade et à sa charge.
Elle émet des dizaines de chèques et se sert des CB comme on respire, automatiquement, dès que l’envie s’en fait sentir. PC, tablettes tactiles, jeux à gratter, parfums, vêtements chic, chaussures, essence, vivres frais quand même (car jamais elle ne néglige sa progéniture), oiseaux de compagnie (« c’était pour mon fils qui aime les animaux »), meubles de cuisine, chèques déposés sur son compte et aussitôt retirés en liquide, virements à partir des CB, y compris sur le compte de sa mère…Entre les chèques et les CB, ce sont plusieurs dizaines de milliers d’euros qui sont en jeu.
Un fait a quand même posé question : certains des commerçants se sont laissé abuser plusieurs fois par Florence avant de déposer plainte. Aucune de ces victimes « complaisantes » n’a pu aider à résoudre ce mystère ! Ce qui n’est évidemment pas une excuse.
Pour toutes les questions posées par la présidente Dinot, Florence n’a pu que faire état de son alcoolisme et de sa grande détresse.
« Quand on est descendu dans ce cercle-là, on est emporté et on n’y peut rien ! »
Un être à la dérive
« Votre façon de vous exprimer est inquiétante, lui a gentiment expliqué la présidente Dinot, manifestement émue par la situation catastrophique de l’accusée. Vous vous présentez plus comme une victime que comme une accusée. Vous vous plaignez, vous avez réponse à tout. Ce ne sont pas vraiment de bons signaux que vous envoyez au tribunal. On a du mal à penser, avec ça, que vous désirez vous amender. Ce n’est pas parce que vous avez une vie difficile que vous avez raison de dépouiller ceux qui travaillent et qui ne vous ont jamais fait de mal, bien au contraire ! »
« Je sais… Je regrette… Je reconnais que… Je regrette… », c’est tout ce qu’a pu répliquer cette femme.
Me Frédéric Hoareau, pour la partie civile, a tiré à boulets rouges.
« Elle insulte, elle accuse ses propres victimes qu’elle charge de tous les péchés de la Création, viols, coups, méchanceté flagrante. Elle se victimise sans rien prouver ».
Le procureur Genet rappela que Florence avait déjà fait l’objet d’une contrainte judiciaire destinée à freiner ses élans kleptomanes et son addiction à l’alcool, sans s’acharner sur cette accusée qui ne semble pas trop mesurer l’étendue des dégâts qu’elle a commis et qui n’arrivera pas à se reconstituer sans aide extérieure.
Le représentant du Ministère public n’a réclamé que 12 mois avec sursis et surtout la réparation des dommages ainsi qu’un suivi médical intense.
Pour la défense, Me Aude Cazal a reconnu que les réponses de Florence n’étaient jamais que des explications, et en aucun cas des excuses, sollicitant l’indulgence pour cette accusée à la dérive.
Le tribunal a été clément : 8 mois avec sursis et mise à l’épreuve, l’indemnisation des victimes, plus obligation de soins.