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Fred Buyle: « Je ne pensais pas qu’il y avait si peu de requins »

"Se réapproprier l'océan pour désacraliser la peur du requin". Voici en substance le message qu'a voulu faire passer ce matin à Saint-Gilles le champion d'apnée Frédéric Buyle. Malgré une campagne dont son compère, William Winram, et lui reviennent bredouilles, ils évoquent calmement trois semaines d'expérimentation constructive.

Ecrit par zinfos974 – le mardi 06 décembre 2011 à 12H58

 

Frédéric Buyle et William Winram repartent ce soir. Derrière eux, les deux apnéistes ne laissent pas de marquage sur un squale mais une somme d’expériences qui pourra servir localement.

Sur les trois semaines de leur présence sur l’île, ils sont sortis en mer à 17 reprises. « Nous n’avons pas plongé deux jours », résume Frédéric Buyle, déjà un exploit en soi. Sans surprise, les zones de mise à l’eau se sont étendues de la baie de Saint-Paul à l’Ermitage, avec malgré tout des prédilections pour la zone en sortie de port de Saint-Gilles et celle de la baie de Saint-Paul (sept sorties chacune). « Le premier jour, nous avons vu un requin bouledogue devant la plage des Roches Noires », explique l’apnéiste. En tout, sept visions, toujours distante de 12 à 15 mètres, ont été faites dans les eaux saint-gilloises. En baie de Saint-Paul, le spécialiste se dit étonné de n’avoir observé qu’un requin bouledogue « alors même que l’on m’avait dit ‘attention, près de la cage (comprendre la ferme aquacole, ndlr), il y aura beaucoup de requins' ».

Malgré ces quelques observations faites « entre 300 et 800m du rivage », il reste catégorique : « il s’agit à chaque fois de rencontres furtives, 2 ou 3 secondes, pas plus ! ». Aucun requin tigre n’a par ailleurs été détecté. Autre fait marquant sur lequel les deux apnéistes se mettent d’accord, la pauvreté en ressource poissonneuse, « du moins par là où on est passé, au-delà, on ne saurait pas dire ».

Sur la conduction de cette opération inédite dans les eaux réunionnaises, il n’hésite pas à donner son sentiment concernant la frilosité de l’administration. « Je suis belge, j’ai la chance de voyager beaucoup dans le monde et à chaque fois on me donne carte blanche pour effectuer de telles opérations », précise-t-il. Entre la possibilité de sillonner dans la Réserve marine et l’utilisation d’appâts, les deux spécialistes ont ainsi été confrontés à « un climat passionnel » qui « n’a pas rendu le travail facile ». C’est simple dit-il « personne, aucune autorité ne souhaite prendre le risque de prendre une décision. Je trouve par ailleurs ridicule de vouloir toujours trouver des coupables lorsque des attaques ont lieu, tout comme je ne comprends pas qu’on rende responsable un maire pour cela. En France, on veut trouver un coupable à tout prix. En Afrique du Sud ou en Australie, les autorités informent les gens qui décident ou pas d’aller à l’eau ».

 

Du passage des deux apnéistes sur notre département on retiendra que deux tentatives de taggages sur deux bouledoques ont failli réussir. « Les deux fléchettes ont rippé sur la peau très épaisse des squales », ce qui fait dire à Frédéric Buyle que les bouledogues ont quasiment la même constitution que les requins citrons. Georges Masanelli, le président du comité régional de plongée, estime qu’il faudra nécessairement corriger le tir sur le matériel pour qu’il puisse être utilisé une fois les deux spécialistes partis.

Un « malheureux concours de circonstance »

« Je savais que ça allait être difficile mais je ne pensais pas qu’il y en avait si peu (de requins) », témoigne le champion belge. Une affirmation qui ne manquera pas de faire réagir les pêcheurs qui disent sensiblement le contraire.

Un peu plus dans les hypothèses, Frédéric Buyle avance la théorie du « malheureux concours de circonstance » pour qualifier les attaques de 2011. « C’est un manque de chance, s’avance-t-il. Oui, j’entends bien qu’on me dit qu’il n’y en a jamais eu pendant 25 ans par ce côté de l’île, c’est vrai, mais les causes sont partagées. On aura jamais la réponse. Il n’y en a pas une plus importante que l’autre. Ca peut-être du 25% à cause de la Réserve marine, 25% à cause des déchets qui proviennent du port, etc… ».

Petite anecdote venant de William Winram dont l’expérience en mer est tout aussi imposante que son confrère : « j’ai vécu cinq ans à Hawaï et j’y ai trouvé une eau relativement similaire. Je sais que je n’irai pas surfer ici sans quelqu’un à proximité pour surveiller en dessous de l’eau ».

De leurs expériences communes, les deux champions délivrent des messages évocateurs: « Aujourd’hui, on va à la mer comme on va au supermarché ». Dans ses propos, Frédéric Buyle milite pour un meilleur respect d’un « animal qui a tout aussi peur, si ce n’est plus peur que nous ». Pour concrétiser ce qu’il avance, il imagine que les requins qui ont attaqué l’ont fait après avoir constaté que leur future proie était relativement isolée. « Il a pu rester en-dessous du surfeur 4 ou 5 minutes à évaluer la situation avant d’attaquer », explique-t-il. Ce qui fait dire au champion que l’une des solutions immédiates reste que l’homme se réapproprie cet espace délaissé.

« Il faut réouvrir les plages ! »

Pour Frédéric Buyle, « il faut que les plongeurs, les apnéistes, les randonneurs sous-marins viennent occuper la colonne d’eau derrière les surfeurs afin de perpétuer une présence humaine dans la zone ». Sur la possibilité de prélèvements sur des prédateurs au comportement déviant ou marqué à plusieurs reprises sur une même zone, il n’exclut pas l’idée d’en venir à cette extrémité mais avec un bémol. « Vous pouvez en tuer 3, 4, 6 (et encore faut les trouver !), vous aurez toujours derrière une population de remplacement. D’ailleurs qu’est-ce qui vous dit que après en avoir tué 200, le 201ème n’attaque pas parce que l’on ne l’aurait pas repéré ? », questionne-t-il.

Dans l’immédiat, Frédérice Buyle préconise la fin de l’interdiction de baignade sur les plages concernées. En conclusion: « Plus on va attendre, plus ça va être difficile aux autorités de justifier une réouverture parce qu’on aura jamais une explication« . 

 

 

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