« La fin des fouilles au corps systématique nous pose énormément de souci ». C’est par ces mots que David Calogine, secrétaire général UFAP UNSA Réunion Mayotte, qualifie le mur face auquel les personnels pénitentiaires de France sont confrontés depuis quelques mois.
A la Réunion, la situation est plus criante d’insécurité car les portiques à ondes millimétriques (qui permettant de voir n’importe quel objet dissimulé, même s’il n’est pas métallique) ne sont pas prêts de débarquer. Chacun de ces bijoux de technologie coûte à l’administration 300.000 euros pièce. Le territoire national compte 203 établissements et il en faut deux au moins par établissement : « faites le compte », sourit le syndicaliste.
C’est la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 qui a introduit la non systématicité de la fouille corporelle, « seul moyen pour un agent de contrôler le détenu dès qu’il est en contact avec des personnes extérieures », lors des visites.
Son constat est sévère. « Même lorsque les fouilles étaient systématiques, on retrouvait du zamal ou tout autre objet sur les détenus », alors cette loi est venue carrément démunir le personnel de sécurité, surtout en l’absence d’installation de portiques.
Malgré la loi de 2009, les fouilles corporelles étaient tolérées, faute de texte d’application. Une loi théorique en somme. C’est une décision du Conseil d’Etat en juin dernier qui a obligé la Garde des Sceaux à émettre une circulaire ministérielle confirmant la loi votée quatre ans plus tôt.
« Que FO et la CGT arrêtent de berner le personnel »
Avec beaucoup d’ironie, David Calogine explique que certains détenus bien défendus, en métropole particulièrement, ont vite trouvé la parade en « se retournant contre le chef d’établissement », parce que ces derniers continuaient à fermer les yeux sur les fouilles systématiques.
Le syndicaliste fait appel à l’actualité de ces derniers mois pour démontrer que la fin des fouilles systématiques a sans doute facilité l’évasion spectaculaire de Redoine Faïd en avril dernier de la maison d’arrêt de Séquedin (département du Nord).
David Calogine ne perd pas sa fibre syndicale en mettant ses confrères de Force ouvrière et de la CGT face à leur contradiction. « A FO, leur représentant national a voté pour la fin des fouilles mais leur représentant local est contre. Quant à la CGT, elle s’est abstenue au niveau national, ça revient à donner sa voix. Il faut que ces syndicats arrêtent de berner le personnel. A l’UFAP, on a voté contre », ajoute-t-il, alors que sur le terrain, une certaine unanimité semble prévaloir sur la poursuite des fouilles en attendant la mise à disposition des portiques. La même contradiction est à constater du côté des parlementaires, y compris Réunionnais, qui « ont voté pour la loi de 2009 », se rappelle David Calogine. Certains seraient étonnés si on venait à le leur rappeler, croit-il savoir.
« Il y a trois semaines, des fouilles au centre de Saint-Pierre ont permis de trouver du zamal chez deux détenus. Sans ça, ils seraient passés sans problème », argumente-t-il. Mais la crainte de l’UFAP UNSA tient sur la nature plus dangereuse encore de ce qui pourrait être introduit un jour dans les prisons. « Ca pourrait créer des dommages collatéraux, chez les surveillants mais aussi vers les habitants voisins d’un centre pénitentiaire », envisage-t-il en forme d’avertissement.
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Que dit l’article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 ?
Les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des personnes détenues fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l’établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des personnes détenues.
Les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou l’utilisation des moyens de détection électronique sont insuffisantes.