Y a-t-il de la poésie dans « in chipèk pardon » ?
La chipèk pardon ? s’écrieront ceux ayant oublié notre malicieux vocabulaire créole. C’est tout bonnement le nom de la mante religieuse. Pourquoi « pardon » ? Parce qu’avec ses deux serres avant relevées, elle a l’air d’être en dévotions et prier le bon Dieu de bien vouloir lui pardonner d’avoir tortoré son bonhomme de crétin qui vient de lui faire les honneurs de la guerre.
Eh bien oui, il y a de la poésie partout, y compris dans in chening’ galabert qui pique moins le derrière que ne le prétend certaine chanson. C’est en tout cas le pari relevé et tenu par nos compères insectologues (ça existe, ça ?), et poètes, et artistes, Bled et Laurent-Dreux.
Le premier, tout en menant une carrière d’agent de voyages, d’écrivain et d’iconoclaste, n’a eu de cesse de fortifier, perfectionner son amour et sa connaissance de ces minuscules qui nous entourent. Et il a mille fois raison : sans les insectes (paraît qu’il y en a 250 millions par personne !), sans eux, nous aurions disparu depuis la nuit des temps.
Fallait bien que ça sorte un jour ! Alain s’est assuré le concours d’un sien ami artiste, observateur, très fin dessinateur. Moi qui dessine comme une patte de mouche, je ne peux qu’admirer le trait de ce peintre naturaliste plus que confirmé. Chacun de ses « portraits » est d’une finesse, d’une précision, d’une beauté qui laissent pantois.
Les textes sont courts, documentés mais sans ce jargon pseudo-scientifique qui semble vous laisser croire que vous êtes c… comme un balai. Là, on en ressort plutôt avec le sentiment, que dis-je, la certitude d’avoir appris et retenu quelque chose de beau, d’intime, de précieux. Comme tout ce que nous offre la nature. Sans le dire, c’est un plaidoyer pour tenter de sauver ce qui peut encore l’être. On adhère plutôt mille fois qu’une.
C’est autant un livre d’art qu’une oeuvre de vulgarisation sans la moindre pédanterie. Alain et Michel (tiens ! les mêmes prénoms que mes deux frangins…) partagent leur passion avec un bonheur sans mélange. Et un bonheur, ça ne se boude pas !
Notons enfin la très belle photo de couverture, véritable chef-d’oeuvre de couleurs et de composition. Mais vous aurez tout compris quand je vous aurai dit qu’elle est due à Roland Bénard, à mes yeux un photographe de haute volée comme on en fait peu.
Ce livre, c’est Alain qui le dit (il n’en rate jamais une), est fait « pour les jeunes de 7 à 107 ans ».
« Les insectes, ces héros méconnus »
Alain Bled/Michel Laurent-Dreux
Editions Orphie
En librairie
Dédicaces le 11 décembre au Tampon :
– À livre ouvert (le matin)
– Nouvelle colombe (l’après-midi).