La taxation des carburants sera bien au coeur des revendications des « gilets jaunes ». La danse du ventre de la récupération politicienne bat son plein puisque le 17 novembre, de l’extrême droite à la gauche en passant par la droite classique, on trouvera présents tous les élus productivistes, ceux qui ont pourtant voté la Loi de transition énergétique mais ne veulent pas en assumer les conséquences. Ce sont les mêmes qui depuis des années favorisent le tout automobile, la multiplication des grandes surfaces en périphérie et laissent se dégrader les transports en commun.
A La Réunion, la fiscalité sur les carburants relève de la compétence du Conseil Régional. Depuis 2012, cette collectivité fait payer, par tous les Réunionnais, une partie du gazole des professionnels du secteur des transports : elle reverse 11,33 centimes d’euros/litre gazole aux transporteurs et 26,33 euros/litre pour taxis, ambulances et auto-écoles. Devant la grogne des « gilets jaunes », le Conseil Régional promet aujourd’hui un chèque carburant de cent euros destiné aux cent mille familles aux revenus les plus modestes. Cent euros par an, soit 8,33 euros par mois, le geste est à relativiser d’autant plus que, les chiffres sont bien connus, par manque de moyens, un Réunionnais sur trois ne possède pas de véhicule ! Le Conseil Régional affecte seulement 3 % des revenus de la taxe sur les carburants à l’amélioration des transports en commun ! En 1993, le transport en commun, hors transport scolaire, représentait 5 % des modes de déplacements des Réunionnais, vingt-cinq ans, on en est toujours à 5 % !
Bref, si aucune alternative à l’automobile n’existe à l’heure actuelle, ce n’est pas une fatalité mais bien une responsabilité des élus réunionnais et on peut comprendre la colère de ceux qui sont littéralement prisonniers de l’usage du véhicule personnel ou du bus.
L’État et la Région Réunion appliquent la loi de transition énergétique mais sans en avoir anticipé ses effets et sans avoir mené une politique de mobilité alternative ambitieuse.
L’utilisation de la totalité des recettes de la fiscalité carbone doit financer la transition énergétique : transports collectifs, efficacité énergétique, valorisation du passage de la voiture à tous les modes alternatifs, accompagnement des usagers les plus fragiles et les plus exposés pendant toute la période de transition par des chèques énergies sur critères géographiques et sociaux, déployer équitablement les services publics et les commerces de proximités, aménager l’espace urbain pour le rendre facilement accessible sans voiture. Voilà ce que devrait être une politique de mobilité au service de tous.
Nous le répétons depuis longtemps, les prix des carburants ne peuvent qu’augmenter avec le déclin des ressources fossiles, nous ne participerons donc pas à un mouvement qui, quelle que soit la légitimité de certains de ses griefs, fait de la baisse des taxes sur les carburants un impératif prioritaire.