Quel est le sens de votre visite à La Réunion à la veille de la grève du 5 décembre?
J’ai été élu en avril denier et avec mon équipe nous avons décidé de faire un tour de France, un tour des responsables locaux pour les rencontrer parce qu’il n’y a que comme cela que l’on peut fonctionner. Et puis, j’ai promis à Lucas Gobalou, à mon élection, que La Réunion serait mon premier déplacement en Outre-Mer.
C’est aussi parce que l’actualité sociale est dense. Elle est la conséquence de la Loi de Transformation de la Fonction Publique. Nous préparons aussi la mobilisation du 5 décembre, mais aussi FO a appelé à une mobilisation reconductible parce que nous n’acceptons pas la réforme telle qu’elle est mise en place.
La réforme des retraites cristallise les mécontentements…
La réforme des retraites est un point d’ancrage, mais ne peut pas occulter les autres points de revendications : les salaires, les conditions de travail, les régimes de retraite. Trois points liés qui cassent le statut des fonctionnaires. On a oublié pourquoi le statut de fonctionnaire a été créé. Après la Seconde Guerre mondiale, il fallait stabiliser la Nation, assurer la continuité du service public et surtout assurer une neutralité aux fonctionnaires. Demain avec la casse du statut, c’est remettre en cause l’égalité et cette neutralité. Fonctionnaires et service public sont indissociables. Les municipales vont d’ailleurs se dérouler dans un contexte très trouble.
Comment percevez-vous d’ailleurs la situation des fonctionnaires à La Réunion?
Ici, il y a peu d’emplois à temps complet et plus d’agents territoriaux. Les changements de maires accentuent les phénomènes de « fonctionnaires bashing » ou de « fonctionnaires Kleenex ». Un de nos objectifs est que les contractuels deviennent titulaires. Comment se projeter dans l’avenir sinon? On va d’ailleurs lancer une campagne nationale et mettre la pression sur les députés en ce sens. On va aussi inciter les responsables locaux à être actifs à ce niveau là.
Bon nombre d’agents ne perçoivent pas ici de complément de salaire, c’est très arbitraire. Malheureusement ce qu’il se passe à La Réunion s’étend sur l’ensemble du territoire français. La Loi de Transformation de la Fonction Publique va forcément accentuer la précarité des agents. Demain, on va embaucher pour une courte période et après les jeter, c’est ce qu’on appelle les contrats de missions. Le gouvernement a toujours comme volonté de supprimer 70 000 emplois de fonctionnaires dans la territoriale d’ici 2022 alors que le besoin de service public de proximité est plus qu’important.
Il y a un autre point de la politique gouvernementale, hors Loi de Transformation de la Fonction Publique, mais qui est un point essentiel pour les Ultramarins. Le président veut supprimer la bonification des 30 jours. Le « partir plus souvent et moins longtemps », c’est plutôt un partir moins longtemps et moins souvent. Cela va être la réalité du décret et c’est scandaleux. Le prétexte employé aujourd’hui est fallacieux. C’est supprimer aux Ultramarins le droit du sol. Revoir sa famille, c’est quelque chose d’important et pourtant cette mesure est complètement dans la logique du gouvernement qui casse les droits des salariés.
Pour motiver la réforme des retraites, le gouvernement avance la réduction du déficit. Comment en sortir?
Il n’ y a pas forcément de déficit. Toutes les précédentes réformes ont été faites pour pérenniser les caisses et en fait, rien n’a été pérennisé du tout. S’il y a un déficit, c’est parce que le gouvernement exonère les entreprises des cotisations sociales. S’il y a déficit, c’est par le taux de chômage est important. L’argent existe, il faut juste le prendre là où il est. Il faut arrêter le CICE, les crédits accordés aux grandes entreprises. S’il y a déficit, c’est parce que le fonds de réserve pour financer les retraites n’est pas sollicité. Aujourd’hui, on fait porter les charges sur le dos des salariés. La réforme des retraites est un catalyseur de tous les mécontents, du malaise social prégnant à La Réunion. Sans m’étendre sur le sujet, s’il y a eu le mouvement des Gilets jaunes c’est que le gouvernement n’écoutait plus. Il y a donc les retraites, mais aussi tout ce qui est périphérique et FO, le 5 décembre, ne fera l’économie de faire converger toutes ces revendications.