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Des ténèbres à la lumière

« L’obscurité couvre la terre, la nuit enveloppe les peuples » Isaïe, 60, 2   De par le monde, diverses manifestations religieuses marquent nos mois de novembre et de décembre. Elles font souvent appel au symbolisme de la lumière pour signifier, célébrer, commémorer la victoire du bien sur le mal, la vie sur la mort, l’espérance sur […]

Ecrit par Reynolds MICHEL – le vendredi 07 décembre 2018 à 10H59

« L’obscurité couvre la terre, la nuit enveloppe les peuples » Isaïe, 60, 2
 
De par le monde, diverses manifestations religieuses marquent nos mois de novembre et de décembre. Elles font souvent appel au symbolisme de la lumière pour signifier, célébrer, commémorer la victoire du bien sur le mal, la vie sur la mort, l’espérance sur le désespoir, la vérité sur le mensonge, la connaissance sur l’ignorance. Tel est le sens de la fête hindoue des lumières de Dipavali, de la fête bouddhiste de Loy Krathong (23 novembre), de la fête juive de Hanouka (du 2 au 10 décembre), de la fête du 8 décembre à Lyon, de Noël et de bien d’autres fêtes chrétiennes et musulmanes en dehors de cette période de novembre-décembre.

Ce qui symbolise, peut-être le mieux, le Dipavali, c’est l’allumage des diyas, ces petites lampes à huile en terre cuite sur les rebords des fenêtres, sur les balcons et devant les portes des maisons que les familles de confession hindoue allument pour commémorer, selon les légendes et les régions : soit la victoire du roi Rama (avatar de Vishnu, le Préservateur) sur le démon Ravana qui avait enlevé son épouse Sita (avatar de Lakshmi), ou celle de Krishna (avatar de Vishnu) sur le démon roi Narakasura, devenu le fléau de la terre et des cieux. Ou encore pour aider Lakshmi, épouse de Vishnou et déesse de la prospérité, à trouver son chemin dans les maisons, la porte d’entrée grand ouverte à la Déesse, mais aussi la porte arrière pour que sorte son « contraire », Alakshmi, la déesse de la Misère.

La fête de Loy Krathong, dite fête des lumières, est l’une des plus belles fêtes bouddhistes célébrée chaque année en Thaïlande. Pour rendre hommage et remercier la déesse des eaux bienfaisantes, les Thaïlandais-es, à la tombée du jour, effectuent un lâcher de lanternes flottantes en forme de lotus sur tous les plans d’eau, rivières et canaux, lacs et littoraux. Le spectacle de ces milliers de lanternes flottant sur les plans d’eaux est magique et il élève l’âme. Le lâcher des  Kratongs (en Thai « loy » signifie flottant et « Krathong », petit radeau d’une vingtaine de centimètres) symbolise l’abandon des rancunes, colères et souillures afin de pouvoir repartir comme un homme nouveau. Ce n’est donc pas pour rien que les lanternes flottantes sont en forme de lotus. Car le lotus est le symbole de l’élévation spirituelle. Cette fleur, si elle naît souvent dans la boue,  échappe toujours à la souillure en s’élevant au-dessus pour s’épanouir immaculée.

La fête du 8 décembre à Lyon, fête de l’Immaculée Conception et fête populaire laïque, est tout aussi féerique. C’est le jour où toutes les familles Lyonnaises, ou presque, disposent, à la nuit tombée, des lumignons à leurs fenêtres et parcourent les rues de la ville, toute illuminée et en fête. Quel est le pourquoi de cette fête des lumières ? A Lyon, la vénération de la Vierge Marie remonte au Moyen Âge. Une première dédiée à la Vierge Marie est construite à Fourvière en 1168. Pour avoir épargné la ville de divers fléaux (la peste en 1643, l’entrée des armées prussiennes en 1870…), les autorités religieuses et les notables de Lyon décident d’ériger, en 1852, une statue de la Vierge Marie sur la chapelle de la colline de Fourvière. Initialement prévue le 8 septembre, l’inauguration est repoussée au 8 décembre, le jour de la fête de l’Immaculée Conception, en raison d’une crue de la Saône. Le jour venu, compte tenu du mauvais temps, les autorités religieuses hésitèrent un instant. Mais le ciel se dégageant, spontanément les  Lyonnais-es disposent, pour la première fois, des bougies à leurs fenêtres. Et à la tombée de la nuit, la ville tout entière est illuminée. La fête des lumières est née !

Hanouka est la fête juive des lumières. Elle est célébrée par l’allumage d’une Ménorah, (en français candélabre ou chandelier) à huit branches que toute famille juive possède chez elle. L’allumage (une flamme par nuit) se fait chaque soir pendant les huit jours de la fête de Hanoukka – cette année du 2 au 10 décembre. La Ménorah de la fête de Hanouka est placée aux fenêtres et à l’entrée de chaque foyer juif, sa lumière, la lumière spirituelle, rayonnant ainsi vers l’extérieur. Elle commémore un événement historique qui appel une petite explication. Nous sommes au IIe siècle avant notre ère. La Palestine est sous la domination des héritiers grecs d’Alexandre le Grand. Les Séleucides régnent sur la Syrie et une partie du Proche et du Moyen-Orient. Antiochos Épiphane, roi de Syrie de la dynastie séleucide, tente une hellénisation systématique de la Palestine, accompagnée d’une politique répressive dure. Quiconque respecte la loi juive (sabbat, circoncision, tabous alimentaires…) est passible de la peine de mort.

En 169, à son retour d’Egypte, Antiochos IV s’empare de Jérusalem et massacre une bonne partie de la cité. Il commet même l’impensable en entrant dans le sanctuaire pour le piller. Or le Temple est tout pour le peuple. La résistance des Juifs pieux à l’hellénisation s’organise sous la direction d’une famille, d’abord du père, Matthias, puis du fils Judas Maccabée. En mêlant guérilla et batailles rangées, les résistants à l’occupation ouvrent en trois ans la route de Jérusalem. Le Temple de Jérusalem est libéré en décembre 165/164 et on procède alors à sa consécration. C’est cet événement, fondateur du judaïsme moderne, que la fête de Hanoukka commémore[1].

Mais lors de la nouvelle consécration, les officiants ne trouvèrent qu’une seule fiole d’huile d’olive pour l’allumage de la Ménorah du Temple (le candélabre à sept branches). Ils allumèrent néanmoins la Ménorah. Par miracle, l’huile à peine suffisante pour un jour dura huit jours. Or, 8 jours étaient indispensables pour la préparation d’une huile pure. D’où les 8 jours de la durée de la fête de Hanouka et le rite de l’allumage des bougies sur un chandelier à 8 branches. C’est pour commémorer la victoire des Juifs pieux et le miracle de la fiole d’huile que les sages d’Israël ont institué la fête de Hanouka.

Levons-nous, marchons dans la lumière

Toutes ces fêtes des lumières nous renvoient le même message spirituel : Soyons des Êtres de Lumière ! Lumière[2] « qui ne doit pas être sous le boisseau », mais sur les « divas », sur la « Ménorah », sur les Krathongs, sur les lumignons des fenêtres lyonnaises…, objets qui tous symbolisent la lumière spirituelle et son rayonnement sur le monde et sur tous les humains. Nous sommes donc tous et toutes invité-e-s à marcher dans la lumière, car quand la lumière manque, tout devient confus et il est impossible de distinguer le bien du mal, l’injustice de la justice. Cette invitation à marcher dans la lumière, mieux à être source de lumière dans le monde, est à une invitation à marcher pour le climat, c’est-à-dire pour un mode de vie durablement généralisable, et à marcher pour la justice dans un cadre global. « Les ressources de la planète étant limitées, seule une « justice globale » peut permettre de les repartir équitablement », déclare avec justesse la sociologue Marie-Duru-Bellat.[3].  

 


[1] Cf. Le Monde de la Bible, N° 168 (2005) ? Les Maccabées, 175-164 av. J.-C)
[2] Pour les croyants, cette lumière vient de Dieu : « Dieu est la lumière des cieux et de la terre. Le symbole de Sa lumière est semblable à une niche où se trouve une lampe ; la lampe est dans un verre ; le verre est comme un astre brillant… Lumière sur lumière. Dieu guide vers sa lumière… » (Coran, sourate 24, 35)
[3] DURU-BELLAT Marie, une planète équitable est-elle possible ?, Revue Sciences Humaines, n°258, avril 2014, p. 14.  Pour notre sociologue, « la justice globale consiste à ne pas admettre que les frontières d’un pays spécifient ce qui est juste ici et tolérable là-bas ».

 

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