
La France franchit la barre des 90 000 morts du virus, 6 millions de Français ont reçu au moins une première injection de vaccin, les livraisons accusent des retards en Europe et la situation demeure très tendue à l’hôpital. Pour autant, les conséquences économiques balayées sous le tapis du cloisonnement médiatique n’en sont pas moins présentes.
Voici ce que l’on peut dire des effets économiques de la pandémie, en 12 points. Ce travail se découpe en deux parties.
1/ Démographie
La pandémie de 2020 a-t-elle eu des conséquences démographiques ? Rien n’est moins sûr. Au 1er janvier, la France compte 67,4 millions d’habitants : très légère hausse de 0,22% par rapport à 2019. Un tiers de l’augmentation tient à l’excès des naissances sur les décès et deux tiers à un excédent migratoire. Pourtant l’impact de la Covid-19 a été négatif du côté des décès et des naissances. Ceci s’explique par le fait que les autres sources de mortalité ont diminué : grippe, accidents de la route, à quoi s’ajoutent des décès attribués au Covid-19, mais pour des personnes en situation de comorbidité dont une partie serait morte même sans la pandémie.
Pour rappel, la surmortalité liée aux épisodes de grippe sévère s’établit plutôt dans la fourchette de 8 000 à 14 000 personnes. La surmortalité 2020 selon l’INSEE est de 54000. Pourtant, la pandémie n’a pas laissé, autant que redoutée, son empreinte mortelle sur la France. Ceci s’explique par un phénomène épidémiologique que l’on appelle les années moissons (2003, 2009, 2012, 2015, 2017, 2020) : ce sont les années ou canicule, grippes sévères, ou Covid-19 ont « fauche » les personnes très âgées : la majorité des décès a concerné des individus âgés > 85 ans : la Covid-19 tue ces personnes ayant déjà dépassé l’espérance de vie moyenne à la naissance.
Enfin, la pandémie a également eu un impact significatif sur les naissances. A la fin 2020, les naissances étant inférieures de 7% à celles de 2019 et celles de janvier 2021 de 13% par rapport à janvier 2020. Ces naissances seront simplement différées. Ce n’est pas une bonne nouvelle. On peut cependant discuter, qu’avec la baisse du pouvoir d’achat issu de cette crise sanitaire, beaucoup d’entre nous n’ajournent définitivement leur projet parental.
2/ Croissance : effets différenciés et durables
La croissance mondiale a été en berne, limitée à -3,4%.
L’Europe s’en est mal sortie. La récession au sein de la zone euro a été de 6,8%, certains pays comme la France, l’Italie ou l’Espagne affichant des chutes plus marquées, sans même parler du Royaume-Uni, plongé dans un fort recul.
La principale caractéristique de la Covid-19 est que ses effets ont été très différents sur l’ensemble de la planète. Certains pays émergents se sont effondrés, l’Argentine, le Mexique, l’Inde, tandis que d’autres ont fait plus que résister, comme la Turquie et la Chine, championne du monde de la reprise rapide.
Les économies mettront du temps à éponger cette récession.
Le gouvernement français porte une responsabilité : certaines entreprises n’ont pu augmenter leur production alors qu’elles avaient des débouchés, d’autres ont été ralenties par la baisse des transports (mais pourquoi le fret ferroviaire s’est-il ralenti ?), d’autres enfin n’ont pu fabriquer du matériel médical, comme des masques, acheté pour 7 milliards d’euros à l’étranger (0.25% du PIB !)
3/ Le chômage n’a pas explosé…
8% seulement, du jamais-vu depuis 2008 ! Fin 2020, le taux de chômage en France était à la baisse, son taux le plus bas depuis douze ans. L’explication vient du plan de soutien du gouvernement qui a mis l’économie française sous cloche et a pour le moment masqué les réelles difficultés. Ainsi, malgré l’ampleur historique de la crise économique et une récession de 8,3% du PIB en 2020, l’emploi privé n’a reculé que de 1,8% entre le quatrième trimestre 2020 et l’année précédente à la même période.
Une large partie des « non-suppressions » d’emplois tient au chômage partiel, jusqu’à 8,6 millions de travailleurs en avril 2020, lors du premier confinement. Les personnes privées d'emploi et payées à 84% se sont trouvées fragilisées, surtout pour celles vivant en ville dans de petits appartements avec des enfants privés de cantine (d'où des repas supplémentaires à payer).
4/ Pauvreté : un recours massif aux minima sociaux
La crise a épargné les salariés en emploi stable, mais n’a pas manqué les précaires. CDD non renouvelés, intérim en chute libre… Dès les premiers jours du confinement, les précaires qui n’avaient pas cotisé suffisamment ont basculé sur les minimas sociaux. Notamment le RSA, dont le nombre de bénéficiaires s’est envolé en 2020, + 7,5% entre décembre 2019 et 2020.
Le RSA ne fait pas exception : la tendance est la même pour les aides au logement (+ 2,1%) ou l’allocation spécifique de solidarité, destinée aux chômeurs en fin de droits (+ 4,6%). En janvier 2021, 9 100 étudiants ont bénéficié d’une aide ponctuelle attribuée par les services sociaux en cas de situation d’urgence ou de détresse avérée, soit une hausse de 39% par rapport à janvier 2020.
Voilà pour la face émergée de l’iceberg. La face immergée se dévoilera lors de la publication des chiffres 2020 de l’Insee sur la pauvreté.
Que se passera-t-il lorsque la pandémie s’éloignera ? Le train de vie actuel est maintenu par les sommes non dépensées, or télétravail et mesures barrières induisent des dépenses supplémentaires à la charge des citoyens (masques, chauffage domestique, équipement internet). La pauvreté sociale, mentale, physique, émerge avec âpreté et certitude après 13mois de mise en cage du pays, conditionnée par la terreur et les stress induits. Notre nation est remodelée par Jupiter et ses affidés : les dieux qui nous gouvernent sont loin d'être en colère. Ils exultent en usant et abusant de leurs pleins pouvoirs.
5/ La dette publique à la rescousse
En 2020, la dette publique mondiale a progressé de 12 000 milliards de dollars (10 080 milliards euros) – dont 10 700 milliards de dollars (8 988 milliards d’euros) de la part des pays industrialisés – passant de 88% à 105% du PIB mondial.
Ce dans toutes les parties du monde, y compris dans des pays où elle était élevée, comme le Japon, l’Italie ou la Grèce. De ce point de vue, les Etats-Unis sont complètement en train de changer la donne. Après le plan de relance de 900 milliards de dollars de l’ère Trump, Joe Biden vient d’ajouter un nouveau soutien budgétaire à l’économie de 1 900 milliards, en attendant son futur plan d’infrastructures de 2 000 milliards. Une réforme fiscale est à venir, laissant tout de même un endettement supplémentaire de 2 000 milliards, 10 points de PIB.
Il faudra mesurer l’impact de ces mesures sur la croissance, mais le message américain est clair : avec des taux d’intérêt très bas et des politiques monétaires ne pouvant plus agir, c’est aux politiques budgétaires nourries par la dette de prendre le relais pour les investissements publics de demain.
6/ Des matelas d’épargne plus ou moins épais
Vacances annulées, restaurants et cinémas fermés, gros achats reportés, projets immobiliers remis à plus tard… Pendant le confinement, privés d’opportunité de consommation, les Français(e)s ont rempli leur bas de laine.
Cette épargne se loge principalement sur les comptes courants des ménages et leurs livrets d’épargne. D’abord forcée, l’épargne est devenue précaution.
Quand certains, faute de loisirs et d’occasions de dépenses, ont profité de cette économie forcée pour renforcer leur matelas, les plus pauvres ont au contraire dû se serrer la ceinture pour faire face à la crise.
A noter que le gouvernement français aurait pu instaurer une « contribution de solidarité nationale » proportionnelle aux revenus en offrant le choix aux personnes physiques de la payer majoration de l'impôt sur le revenu, ou bien de choisir de payer le double en achetant des titres de rente perpétuelle à 1% d'intérêt net d'impôt, librement négociables. Toutes les personnes ayant des revenus non touchés par la pandémie auraient ainsi participé, au lieu de gonfler leur épargne liquide improductive.
Travail collectif d’AID : aid97400.re
Tiré en partie d’Alternatives Economiques
Voici ce que l’on peut dire des effets économiques de la pandémie, en 12 points. Ce travail se découpe en deux parties.
1/ Démographie
La pandémie de 2020 a-t-elle eu des conséquences démographiques ? Rien n’est moins sûr. Au 1er janvier, la France compte 67,4 millions d’habitants : très légère hausse de 0,22% par rapport à 2019. Un tiers de l’augmentation tient à l’excès des naissances sur les décès et deux tiers à un excédent migratoire. Pourtant l’impact de la Covid-19 a été négatif du côté des décès et des naissances. Ceci s’explique par le fait que les autres sources de mortalité ont diminué : grippe, accidents de la route, à quoi s’ajoutent des décès attribués au Covid-19, mais pour des personnes en situation de comorbidité dont une partie serait morte même sans la pandémie.
Pour rappel, la surmortalité liée aux épisodes de grippe sévère s’établit plutôt dans la fourchette de 8 000 à 14 000 personnes. La surmortalité 2020 selon l’INSEE est de 54000. Pourtant, la pandémie n’a pas laissé, autant que redoutée, son empreinte mortelle sur la France. Ceci s’explique par un phénomène épidémiologique que l’on appelle les années moissons (2003, 2009, 2012, 2015, 2017, 2020) : ce sont les années ou canicule, grippes sévères, ou Covid-19 ont « fauche » les personnes très âgées : la majorité des décès a concerné des individus âgés > 85 ans : la Covid-19 tue ces personnes ayant déjà dépassé l’espérance de vie moyenne à la naissance.
Enfin, la pandémie a également eu un impact significatif sur les naissances. A la fin 2020, les naissances étant inférieures de 7% à celles de 2019 et celles de janvier 2021 de 13% par rapport à janvier 2020. Ces naissances seront simplement différées. Ce n’est pas une bonne nouvelle. On peut cependant discuter, qu’avec la baisse du pouvoir d’achat issu de cette crise sanitaire, beaucoup d’entre nous n’ajournent définitivement leur projet parental.
2/ Croissance : effets différenciés et durables
La croissance mondiale a été en berne, limitée à -3,4%.
L’Europe s’en est mal sortie. La récession au sein de la zone euro a été de 6,8%, certains pays comme la France, l’Italie ou l’Espagne affichant des chutes plus marquées, sans même parler du Royaume-Uni, plongé dans un fort recul.
La principale caractéristique de la Covid-19 est que ses effets ont été très différents sur l’ensemble de la planète. Certains pays émergents se sont effondrés, l’Argentine, le Mexique, l’Inde, tandis que d’autres ont fait plus que résister, comme la Turquie et la Chine, championne du monde de la reprise rapide.
Les économies mettront du temps à éponger cette récession.
Le gouvernement français porte une responsabilité : certaines entreprises n’ont pu augmenter leur production alors qu’elles avaient des débouchés, d’autres ont été ralenties par la baisse des transports (mais pourquoi le fret ferroviaire s’est-il ralenti ?), d’autres enfin n’ont pu fabriquer du matériel médical, comme des masques, acheté pour 7 milliards d’euros à l’étranger (0.25% du PIB !)
3/ Le chômage n’a pas explosé…
8% seulement, du jamais-vu depuis 2008 ! Fin 2020, le taux de chômage en France était à la baisse, son taux le plus bas depuis douze ans. L’explication vient du plan de soutien du gouvernement qui a mis l’économie française sous cloche et a pour le moment masqué les réelles difficultés. Ainsi, malgré l’ampleur historique de la crise économique et une récession de 8,3% du PIB en 2020, l’emploi privé n’a reculé que de 1,8% entre le quatrième trimestre 2020 et l’année précédente à la même période.
Une large partie des « non-suppressions » d’emplois tient au chômage partiel, jusqu’à 8,6 millions de travailleurs en avril 2020, lors du premier confinement. Les personnes privées d'emploi et payées à 84% se sont trouvées fragilisées, surtout pour celles vivant en ville dans de petits appartements avec des enfants privés de cantine (d'où des repas supplémentaires à payer).
4/ Pauvreté : un recours massif aux minima sociaux
La crise a épargné les salariés en emploi stable, mais n’a pas manqué les précaires. CDD non renouvelés, intérim en chute libre… Dès les premiers jours du confinement, les précaires qui n’avaient pas cotisé suffisamment ont basculé sur les minimas sociaux. Notamment le RSA, dont le nombre de bénéficiaires s’est envolé en 2020, + 7,5% entre décembre 2019 et 2020.
Le RSA ne fait pas exception : la tendance est la même pour les aides au logement (+ 2,1%) ou l’allocation spécifique de solidarité, destinée aux chômeurs en fin de droits (+ 4,6%). En janvier 2021, 9 100 étudiants ont bénéficié d’une aide ponctuelle attribuée par les services sociaux en cas de situation d’urgence ou de détresse avérée, soit une hausse de 39% par rapport à janvier 2020.
Voilà pour la face émergée de l’iceberg. La face immergée se dévoilera lors de la publication des chiffres 2020 de l’Insee sur la pauvreté.
Que se passera-t-il lorsque la pandémie s’éloignera ? Le train de vie actuel est maintenu par les sommes non dépensées, or télétravail et mesures barrières induisent des dépenses supplémentaires à la charge des citoyens (masques, chauffage domestique, équipement internet). La pauvreté sociale, mentale, physique, émerge avec âpreté et certitude après 13mois de mise en cage du pays, conditionnée par la terreur et les stress induits. Notre nation est remodelée par Jupiter et ses affidés : les dieux qui nous gouvernent sont loin d'être en colère. Ils exultent en usant et abusant de leurs pleins pouvoirs.
5/ La dette publique à la rescousse
En 2020, la dette publique mondiale a progressé de 12 000 milliards de dollars (10 080 milliards euros) – dont 10 700 milliards de dollars (8 988 milliards d’euros) de la part des pays industrialisés – passant de 88% à 105% du PIB mondial.
Ce dans toutes les parties du monde, y compris dans des pays où elle était élevée, comme le Japon, l’Italie ou la Grèce. De ce point de vue, les Etats-Unis sont complètement en train de changer la donne. Après le plan de relance de 900 milliards de dollars de l’ère Trump, Joe Biden vient d’ajouter un nouveau soutien budgétaire à l’économie de 1 900 milliards, en attendant son futur plan d’infrastructures de 2 000 milliards. Une réforme fiscale est à venir, laissant tout de même un endettement supplémentaire de 2 000 milliards, 10 points de PIB.
Il faudra mesurer l’impact de ces mesures sur la croissance, mais le message américain est clair : avec des taux d’intérêt très bas et des politiques monétaires ne pouvant plus agir, c’est aux politiques budgétaires nourries par la dette de prendre le relais pour les investissements publics de demain.
6/ Des matelas d’épargne plus ou moins épais
Vacances annulées, restaurants et cinémas fermés, gros achats reportés, projets immobiliers remis à plus tard… Pendant le confinement, privés d’opportunité de consommation, les Français(e)s ont rempli leur bas de laine.
Cette épargne se loge principalement sur les comptes courants des ménages et leurs livrets d’épargne. D’abord forcée, l’épargne est devenue précaution.
Quand certains, faute de loisirs et d’occasions de dépenses, ont profité de cette économie forcée pour renforcer leur matelas, les plus pauvres ont au contraire dû se serrer la ceinture pour faire face à la crise.
A noter que le gouvernement français aurait pu instaurer une « contribution de solidarité nationale » proportionnelle aux revenus en offrant le choix aux personnes physiques de la payer majoration de l'impôt sur le revenu, ou bien de choisir de payer le double en achetant des titres de rente perpétuelle à 1% d'intérêt net d'impôt, librement négociables. Toutes les personnes ayant des revenus non touchés par la pandémie auraient ainsi participé, au lieu de gonfler leur épargne liquide improductive.
Travail collectif d’AID : aid97400.re
Tiré en partie d’Alternatives Economiques