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Coup de gueule : « Parents, faites attention à vos enfants en boîte de nuit »

Depuis la levée des restrictions sanitaires, beaucoup de discothèques ont pu rouvrir et les habitués ont retrouvé le chemin de la vie nocturne. Mais crise oblige, les discothèques acceptent tout le monde actuellement. Résultat, beaucoup se marchent dessus et la tension monte. Des bagarres en veux-tu, en voilà et le personnel de sécurité ne peut pas faire grand chose par manque d’expérience et de qualification. Nicolas*, professionnel de la sécurité nocturne, nous fait part de son inquiétude et reproche aux gérants de discothèques de ne plus valoriser le métier.

Ecrit par 39486 – le mercredi 03 août 2022 à 08H11

Nicolas a plus de dix huit ans dans la profession d’agent de sécurité. Il maîtrise les arts martiaux. Jeune, il a été un compétiteur de haut niveau. Puis, il s’est orienté dans la sécurité et la formation d’agents de sécurité. Policiers, gendarmes, GIGN figurent aussi parmi ses élèves. 

“On sait travailler la lutte. Mais ce n’est pas pour autant qu’on va frapper les gens. On se fait respecter et on respecte les gens devant et à l’intérieur de la boîte, du début jusqu’à la fin de la soirée. On raccompagne même certains à leur véhicule. Ces derniers mois, il y a eu plusieurs débordements aux abords des établissements de nuit. La semaine dernière encore, un jeune homme s’est fait mettre KO devant l’entrée d’une discothèque du nord alors qu’il était alcoolisé et sans défense. Des bagarres ont éclaté avec plusieurs femmes et des hommes. Le personnel de sécurité est intervenu au bout de cinq minutes seulement mais n’a pu rien maîtriser”, souffle Nicolas.   

En tant que professionnel de la sécurité, il s’aperçoit aujourd’hui que le travail n’est plus le même. En cause :  « le manque de sécurité dans les soirées évènementielles, couplé à un laisser-aller des clients ».

“Les patrons, en fin de compte, ne valorisent plus la profession, ne cherchent plus la qualité au niveau de la sécurité. Des professionnels ont été mis à part parce qu’ils demandaient un tarif normal. Ces derniers ont été remplacés par des gens qui  n’ont pas été formés à intervenir dans ce type d’événement. En fait, depuis bien avant la covid, les patrons ont commencé à vouloir moins payer, à descendre leur budget pour la sécurité. Du coup, cela a occasionné une grosse baisse au niveau de la vigilance en général. Les professionnels dans le domaine ont perdu leur emploi et ont été remplacés par des personnes incompétentes. La plupart, même s’ils pratiquent un art martial, ne savent pas maîtriser une bagarre. Les personnes qui se retrouvent au milieu sont jetées dehors alors qu’elles n’ont rien fait. Et la plupart du temps, elles sont harcelées et sont même victimes de ces bagarres”, affirme l’agent de sécurité.

Alors que doit faire un professionnel dans ce genre de situation ?

Un professionnel qui est payé pour faire son travail correctement, est habilité à intervenir. Il sait pratiquer la légitime défense et porter secours à autrui. Il a la formation martiale pour pouvoir maîtriser un client qui dérape. Il a également une connaissance des formations de la sécurité événementielle donc habilité à travailler là-dedans. L’expérience dans le domaine est très importante. Ce métier, parfois mal vu, est pourtant lié à la sécurité des clients des établissements de nuit. Il y a des gens qui exercent ce métier là depuis longtemps et le font bien. Et puis à un moment donné, les patrons les ont retirés et remplacés par des personnes qui ne savent pas comment gérer cette situation. Elles paniquent et cela part en c….”. 

Comment expliquez-vous ce laisser-aller de la part des agents de sécurité ?

« Absence de formation, recrutements douteux, le peu d’encadrement de la profession ouvre la porte aux dérapages. De plus, ils sont sous-payés et n’ont donc pas envie de se salir les mains. Depuis la levée des restrictions, c’est vraiment le bordel au niveau des boîtes de nuit.  Il y a une dégradation de la sécurité. Les gens ne sont plus sécurisés. La clientèle est de plus en plus jeune et elle n’est pas forcément respectueuse. Ça grouille de drogue dure plus que jamais à l’intérieur des boîtes. À l’époque, c’était maîtrisé parce que nous travaillions en allié avec la police. Mais aujourd’hui c’est fini. On se retrouve face à des équipes qui n’arrivent plus à gérer la pression et complètement dépassées. Les anciens clients se font rouer de coups par les nouveaux et on ne leur porte pas secours. À partir de trois heures du matin, c’est le bordel. Les jeunes imbibés d’alcool et parfois drogués sont comme des bombes prêtes à exploser. Et le moindre regard ou la moindre réflexion les rend agressifs. 

Les patrons aujourd’hui doivent prendre leurs responsabilités. Ils veulent ouvrir des boîtes de nuit, vendre de l’alcool, faire du chiffre, du profit facile mais oublient de mettre l’argent aussi dans la sécurité ! En métropole, on ne lésine pas sur la sécurité. On prend des professionnels qui sont capables de sécuriser. Si on prend des hommes soumis, comment voulez-vous protéger les gens ? Un homme soumis ne va jamais courir sur un fusil. Un homme soumis ne va jamais se battre devant dix bonhommes. Il ne va pas aller à la guerre, ni aller au charbon. Il n’ira pas défendre des gens si leur vie est en jeu, il va juste laisser faire. »

Avez-vous des exemples de ce genre de patron ?

« D. a été le plus mauvais exemple que je connaisse. C’est quelqu’un qui aime gagner de l’argent, gagner en affaires.  Il s’amuse à vouloir soumettre toutes les personnes qui bossent pour lui. Il a viré tous les professionnels de la sécurité pour des moindres coûts. Des professionnels qui ont sauvé des vies devant ses établissements. Il n’a aucune reconnaissance. Il aime avoir le dernier mot sans essayer de comprendre les choses. Aujourd’hui, il fait passer ces professionnels pour des mauvaises personnes, alors qu’à la base, c’est lui qui a créé les désagréments. »

Que doivent faire les gérants de clubs nocturnes ? 

“Les gérants de clubs nocturnes doivent prendre leurs responsabilités et prendre des professionnels qui sont capables d’intervenir à un moment précis et qui savent protéger les gens. Et ces personnes, on ne leur demande pas de protéger le bâtiment ou les murs mais de surveiller les lieux et les accès, de faire respecter les réglementations spécifiques, de protéger l’intégrité physique des personnes et surtout d’identifier les situations à risques. 

Je crains qu’à un moment donné, des gens vont se faire tuer. Les anciens connaissaient la clientèle et pouvaient choisir qui laisser entrer. Maintenant c’est du laisser-aller, tout le monde rentre avec parfois les poches remplies de drogue. Bientôt vous allez voir, vous aurez des morts sur la conscience, c’est ça qui va se passer. Et moi j’aimerais pas être à votre place”, explique Nicolas. 

Et pour finir, Nicolas tient à s’adresser aux parents : Aujourd’hui je pousse un coup de gueule. Parents, faites attention à vos jeunes qui vont en boîte de nuit. Parce que vous ne savez pas s’ils vont rentrer demain matin. A chaque sortie de boite, il y a des bagarres. Certaines sont connues et d’autres non. Et avec la drogue qui circule également, vos jeunes ne sont plus en sécurité. Et même si parfois, la police intervient, elle n’est pas là pour couvrir les activités de délits à l’intérieur des boîtes de nuit. »  

*prénom d’emprunt

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