Il faut se comporter en observateur intelligent et neutre. Il faut mettre en branle toutes les connaissances que nous avons aujourd’hui sur la gestion vertueuse d’un territoire, comme sur la gestion vertueuse de notre planète elle-même. La Réunion rassemble d’ailleurs, quasiment toutes les problématiques de notre malheureuse planète : Difficile dialogue Homme/Nature, réaménagement vertueux et durable du territoire difficile, inégalités insupportables, démographie mal maîtrisée, éducation de nos enfants inadaptée, épanouissement physique, moral et mental des habitant en perte de vitesse, etc.
Or La Réunion dispose d’un potentiel exceptionnel que tous les experts consultés, estiment largement suffisant pour nourrir et faire vivre plus que décemment, plus d’un million d’habitants. Encore faut-il avoir cette ambition. Le paradoxe ahurissant de ce territoire (et qui s’explique par son histoire humainement douloureuse et par des liens délétères avec la France), c’est qu’il ne produit rien ou pas grand-chose, d’une part, et que d’autre part, au lieu de faire l’effort parfaitement possible de produire et donc de donner de l’activité à tous, il reste depuis bien trop longtemps sous perfusion (a minima) de la mère patrie. Son chômage endémique n’a pas d’autre origine. Le nœud gordien de cette affaire est donc bien ce déséquilibre entre ce que ce territoire produit et ce qu’il consomme.
Concrètement, les priorités pour avancer humainement vers la satisfaction de tous ses habitants, sont extrêmement simples. Il y en a trois :
1 – Première clause de sauvegarde du territoire : réduire progressivement les importations par tous les moyens possibles. Je signale à ce titre que même l’OMC (l’Organisation Mondiale du Commerce) dispose d’une clause de sauvegarde lorsqu’un secteur économique est menacé par le dumping.
2 – Parallèlement, développer toutes les activités de substitution aux importations qui sont possibles à La Réunion et qui sont nécessaires et suffisantes. L’effort financier nécessaire pour cela, peut être réalisé au moins en partie par l’utilisation des taxes à l’importation. Ce développement des activités locales est probablement la pierre angulaire d’une politique réunionnaise vertueuse. En effet, elle seule permettrait à la fois de rétablir l’équilibre économique de l’ile et, dans le même temps, de parvenir au plein emploi.
3 – Pour l’achat à l’extérieur des quelques rares produits indispensables que les Réunionnais seraient incapables de produire localement, développer la production haut de gamme de produits d’exception, facilement exportable et à forte valeur ajoutée (produits tropicaux de qualité, extraits, concentrés, arômes, artisanat de luxe, tourisme haut de gamme, etc.). Il est bien évident que si, pour parvenir à une économie équilibrée, les terres actuellement disponibles pour une production agricole nécessaire, n’étaient pas suffisantes, il faudrait bien-sûr envisager de réduire les surfaces des cultures non rentables ou non indispensables pour les Réunionnais.
François-Michel Maugis