Le dimanche 19 juillet dernier, une jeune adolescente de 13 ans et 11 mois entre dans la boulangerie Chez Paul afin d’y acheter du pain. En bout de file, un homme vient se placer derrière elle. Dans un premier temps, elle sent que quelque chose de dur touche ses fesses mais pense que c’est une maladresse. L’homme la colle de plus en plus. Cette fois, elle comprend qu’il est en train de se frotter à elle sans aucune gène et avec insistance.
Elle n’ose rien dire et se met à pleurer discrètement. N’en pouvant plus, elle se met à crier « ne me touche pas » et le personnel finit par intervenir. « Arrête de crier, je vais te donner un euros pour acheter un pain au chocolat », lui balance l’individu qui prend la fuite. Identifié par la video-surveillance, il est interpellé et place en garde à vue.
Présenté en comparution immédiate peu après les faits, il est placé en détention provisoire l’audience étant renvoyée au 20 août. Alors qu’il s’agit d’une mineure, le huit clos n’est pas demandé car elle n’est pas présente. Seule sa maman est là. De son coté, l’homme âgé de 32 ans parait instable et énervé. Il coupe la parole de la juge en permanence qui ne manque pas de se faire respecter et le menace de le renvoyer dans sa geôle. Il faudra que sa propre mère, venue témoigner, le menace de s’en aller pour qu’il se calme.
« Je vais aux putes, mais la ça fait longtemps que j’y suis pas allé »
« Je vais aux putes, mais la ça fait longtemps que j’y suis pas allé. Je veux des rapports sexuels comme tout le monde. J’ai des pulsions, tout le monde a des pulsions, pas vous ? » assène t-il à la juge en introduction. Il reconnait entièrement les faits mais ne veut pas entendre parler d’agression sexuelle. En effet, son absence de discernement, avec ou sans traitement, le rend incapable de comprendre la gravité des faits.
Comme en témoigne sa mère, qui est sa tutrice, elle a appelé trois fois la police le jour des faits pour leur demander de l’aide alors qu’il était parti de la maison, en crise, sans avoir pris son traitement, mais en vain. Il avait déféqué devant tout le monde à la gare routière de Saint-Denis. La suite, on la connait … Elle explique qu’elle ne sait plus quoi faire, même lors des hospitalisations d’office, il sort au bout de quatre jours.
L’expert psychiatrique le décrit comme un malade psychiatrique
L’expert psychiatrique le décrit comme un malade psychiatrique et indique qu’il est en rupture de soin depuis mai 2018. Avec 9 condamnations, il est bien connu de la justice. Même lors de son incarcération, il s’est masturbé devant les infirmières en salle d’attente. La partie civile reconnait que les faits sont simples mais aussi que les conséquences sont importantes. Elle demande une reconnaissance de culpabilité d’autant qu’il s’agit d’un homme extrêmement agressif.
« Je comprends le désespoir de la mère du malade. Oui, tout le monde a des pulsions, mais vous n’êtes pas en mesure de les maîtriser » répond le procureur de la République Eric Tuffery au prévenu. Il décrit un contexte assez inquiétant qui dévie sur l’atteinte aux personnes physiquement et sexuellement. Le procureur requiert une peine de 2 ans de prison avec maintien en détention, une inscription au fichier FIJAISV (Fichier Judiciaire Automatisé des Auteurs d’infractions sexuelles ou violentes) ainsi qu’un suivi socio-judiciaire assorti d’une peine supplémentaire d’un an en cas de non respect.
Quid de la responsabilité des experts psychiatres dans la prise en charge de ce genre de patients ?
La défense, qui relève que la scène n’a duré qu’une minute en tout et pour tout, rappelle qu’il n’y a eu aucune violence, ni agression. Elle met en avant l’état de délire aigu pendant la garde à vue. Pour elle, le vrai problème vient des experts psychiatres qui ne prennent pas leurs responsabilités avec ce genre de patients « c’est le scandale de nos prisons » dit-elle. De son point de vue, les experts bottent en touche. Ils préfèrent diagnostiquer « l’altération du discernement » plutôt que « l’abolition du discernement » ce qui envoie les malades en prison en lieu et place de l’hôpital psychiatrique, où ils les retrouvent ensuite. « Faites quelque chose pour lui aujourd’hui » conclut-elle.
La cour n’a visiblement pas entendu l’abolition pénale demandée par la défense en vue d’offrir des soins et de traiter la cause du mal du prévenu. Elle déclare l’homme coupable et prononce une peine de 10 mois de prison avec maintien en détention assortis d’un suivi socio-judiciaire pour une durée de 3 ans.