Les relations ne sont plus au beau fixe entre le PCR et Nassimah Dindar. Paul Vergès, qui s’est fait une spécialité de rouler tout le monde dans la farine au cours de sa carrière et qui pensait être le plus fort dans ce sport à la Réunion, vient de prendre conscience qu’il est tombé sur plus fort que lui : Nassimah Dindar !
Quand Paul Vergès aide Nassimah Dindar à devenir présidente en 2008, contre la Droite, il mise sur elle car il la pense faible (elle n’a que deux ou trois conseillers généraux qui la soutiennent) et donc facilement manipulable. Il se voit déjà dans le rôle du gros matou dévorant la petite souris, rôle qu’il affectionne et dont de nombreux élus à Droite ont été victimes par le passé. Ou, au pire, dans celui de tireur des ficelles de la marionnette.
On ne sait pas si c’est dû au fait que le jeune chat fringuant s’est transformé au fil des ans en un vieux matou aux dents cariatées ou si c’est la souris qui était diablement trop agile pour lui, toujours est-il que pour une fois, c’est Nassimah Dindar qui a roulé Paul Vergès.
Une fois élue grâce à ses soins, elle s’est empressée de constituer son propre groupe au sein du Département en ralliant à son panache blanc quelques élus de Droite aux convictions tièdes et d’autres du Centre. Groupe qui compte aujourd’hui le même nombre d’élus que ceux de l’Alliance et du PS et qui vient de se transformer en parti politique officiellement basé au Centre.
Et, non contente de parler aussi fort que ses « alliés », voilà qu’elle prétend s’affranchir de leur « tutelle » !
Paul Vergès pensait avoir tout verrouillé…
Quand Paul Vergès a perdu la Région, il n’a pas hésité à trahir la parole donnée à un « camarade » lors des élections à la commission permanente du Département en mars 2011 pour placer son fils Pierre en bonne position dans l’organigramme du Département, à un poste-clé de 4ème vice-président. En charge en plus de la délégation des Transports, un poste qu’on sait gros pourvoyeur d’argent liquide pour les campagnes… Voilà réglé selon lui le problème des élus.
En ce qui concerne les administratifs, il a positionné Catherine Payet, proche parmi ses proches, au poste de chef de Cabinet de la Présidente, puis de directrice de Cabinet, avec les pouvoirs les plus étendus, y compris en matière d’embauche. Nous y reviendrons.
Autre positionnement : celui de Faeza Ibrahim, une « proche » de Pierre Vergès, au Cabinet.
Avec ces trois pions, Paul Vergès pensait tout contrôler. C’était mal connaitre la capacité de manoeuvrière de Nassimah…
La reprise en main de Nassimah…
Une fois prise la décision de créer son propre parti, les liens ont commencé à se distendre avec le PCR et les relations se sont énormément tendues. Il est alors devenu vital pour la Présidente du Conseil général de dessérer l’étau que le PCR avait installé autour d’elle.
La première à en faire les frais a été Catherine Payet qui a vu arriver au Cabinet Fabrice Payet, un proche de Nassimah Dindar, dont le rôle était manifestement de reprendre les choses en main et de l’écarter. Les heurts ont été nombreux et fort du soutien de la Présidente, c’est Fabrice Payet qui l’a emporté. Catherine Payet est aujourd’hui en congés maladie.
La seconde à tomber au champ d’honneur est Faeza Ibrahim, l’ancienne femme de Gino Ponimballom, aujourd’hui « proche » de Pierre Vergès. Grâce à l’appui de Catherine Payet et de Pierre Vergès, elle était passée d’un poste d’employée en charge de la communication à la SR21, à un poste « Cabinet » à environ 3.000 euros par mois ! Problème : Elle a apparemment dépensé l’argent public à tort et à travers (700.000 euros de dépenses en agendas, calendriers en quelques mois, toujours au profit de prestataires proches du PCR) et Nassimah Dindar lui a récemment annoncé qu’elle allait quitter le Cabinet pour retrouver un poste « classique« . Nouveau problème : Sur ce genre de postes, on est embauché dans une « catégorie » (A, B ou C), en fonction de ses diplômes. Et des diplômes, Faeza n’en a pas beaucoup, c’est le moins qu’on puisse dire… Et difficile de revenir à un « petit salaire » quand on s’est habituée à un grand train de vie, en étant en plus invitée dans tous les cocktails en tant que membre du Cabinet de la Présidente du Conseil général !
Pour éviter celà, en compagnie de Pierre Vergès, elle effectue un énorme travail de lobbying auprès de tous ceux qu’elle pense susceptibles de pouvoir faire changer Nassimah Dindar d’avis. Sans grand espoir d’y parvenir, d’après nos informations.
Et comme par hasard, c’est peu après les « limogeages » de Catherine Payet et de Faeza Ibrahim que les choses ont commencé à vraiment se détériorer entre le PCR et la présidente du Département. On peut tolérer beaucoup de choses au PCR , mais pas qu’on s’en prenne à la « famille« …
Quand Nassimah va provoquer Gilbert Annette dans son fief !
Non contente de s’opposer frontalement au PCR, voilà que Nassimah Dindar ne fait pas mystère de son intention de se présenter aux législatives contre Ericka Bareigts, la « protégée » de Gilbert Annette, dans la 1ère circonscription. Quel crime de lèse majesté !
Si les relations ne sont pas encore aussi détériorées qu’avec le PCR, il est à craindre qu’elles ne se tendent un peu…
Nassimah se sent d’autant plus forte qu’elle sait que ni Paul Vergès, ni Gilbert Annette ne peuvent faire grand chose contre elle.
De quels moyens de rétorsion disposent le PCR et le PS ?
Les « armes » dont disposent Paul Vergès et Gilbert Annette ne sont pas très nombreuses -on peut les estimer à deux essentiellement- mais surtout, elles présentent chacune l’énorme inconvénient de ne pas leur permettre de destituer Nassimah Dindar et de prendre sa place…
Tout d’abord, ils pourraient faire démissionner quelques élus de la commission permanente, histoire de provoquer de nouvelles élections. Oui mais voilà, la loi prévoit que l’on renouvelle l’ensemble de la commission, mais sans toucher au poste de présidente de Nassimah.
Autre problème : On sait ce qu’on perd, mais pas ce qu’on va gagner. Sans les élus de Nassimah, ni le PCR ni le PS ne dispose de la majorité pour se faire réélire. Ce qui signifie que tous les vice-présidents socialistes et communistes qui bénéficient aujourd’hui de voitures de fonction, de téléphones avec forfaits illimités et de voyages en 1ère classe seraient quasiment certains de tout perdre.
D’autant plus que Nassimah n’hésite pas à menacer d’utiliser la bombe atomique qu’elle garde dans sa poche : Refaire alliance avec la Droite et renvoyer tout ce beau monde dans l’opposition…
Autant dire donc qu’il y a de grandes chances pour que personne ne bouge et que la majorité actuelle aille jusqu’au bout du mandat, même si les conflits vont être de plus en plus nombreux…
Autre solution : Bloquer le fonctionnement du Département, en ne votant pas le Budget. Cette hypothèse serait certes embarrassante pour Nassimah Dindar, qui serait contrainte de gouverner une institution qui pourrait être mise sous tutelle du Préfet, si la crise allait à son paroxysme. Mais là aussi, une fois l’impact médiatique redescendu, on peut facilement imaginer la présidente allant jusqu’au bout de son mandat en gérant avec son groupe minoritaire.
Reste l’hypothèse d’une alliance avec la Droite. Aujourd’hui, Didier Robert aurait opposé une fin de non-recevoir. Des appels du pied, il en a déjà connu plusieurs, et aucun n’est allé jusqu’à son terme. Il serait donc plutôt sur une attitude attentiste, histoire de voir quelles sont les véritables intentions de Nassimah Dindar. Mais peut-être que l’Elysée, où Nassimah a gardé de très bons contacts, verrait d’un bon oeil un Département basculer à Droite, en pleine campagne des présidentielles et pousse à la roue en ce sens…
On n’en est pas encore là, mais les mois qui viennent s’annoncent passionnants sur le plan politique local…
