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Au Tampon, le « mur de la honte » ne bloque pas la colère

Trois familles du Tampon se retrouvent emmurées chez eux par leurs voisines qui viennent d’hériter du terrain. Ces dernières refusent tout compromis et profitent d’une situation qui leur est légalement favorable. Elles étaient même prêtes à murer la rue et bloquer l’accès à tous les riverains, mais n’ont pas pu aller jusque-là. Pour les habitants des maisons concernées, cette situation les plonge dans un désarroi total et ils ne savent pas comment retrouver l’accès à leur vie d’avant.

Ecrit par 1776023 – le jeudi 01 décembre 2022 à 10H08

Pour Jean-Noël, il était inimaginable que le terrain vague où il jouait durant son enfance devienne le cauchemar de sa retraite. Le Tamponnais vit depuis toujours sur le terrain familial qui se situe sous la SIDR 400. Plus exactement, la parcelle de terrain se trouve entre la rue Claude Milion et le chemin Jean Casimir Perier.

Comme cela s’est longtemps fait sur l’île, Jean-Noël a construit sa maison lui-même à côté de celle de sa mère il y a plusieurs décennies, sans vraiment déclarer. Il n’a jamais connu les propriétaires du terrain en face de chez lui et a toujours pensé que le terrain était à l’abandon. Un sentiment renforcé par le fait que le terrain vague soit utilisé comme parking par les agents de la mairie lors de Florilèges. 

Si Jean-Noël n’a pas été pointilleux à l’époque sur les règles d’urbanisme, ce n’est pas le cas de Julie*, sa voisine. Lorsqu’elle a fait construire sa maison en l’an 2000 sur la parcelle familiale, elle a obtenu son permis de construire, son certificat d’adressage chemin Jean Casimir Perier et a même dû avoir l’autorisation des Architectes de France en raison de la proximité du château Bel-Air. Une rigueur administrative qui ne la protège pourtant pas du cauchemar qu’elle vit actuellement.

Le terrain de la discorde

Les habitants avaient entendu il y a des années que la famille propriétaire du terrain était en conflit avec la municipalité concernant le chemin qui coupe la parcelle, mais n’ont plus eu aucune nouvelle depuis plus d’une décennie. Loin d’imaginer la suite des évènements, Julie et ses parents n’ont pas fait diviser la parcelle pour chaque maison, dans un souci d’éviter les conflits liés à la succession.

Car c’est justement un conflit de succession qui se jouait de l’autre côté du portail. Si le terrain était à l’abandon depuis près d’un demi-siècle, c’est qu’il était un sujet de désaccord entre les nombreux héritiers. La loi Letchimy du 27 décembre 2018 sur les successions outre-mer a changé la donne. Le principe d’unanimité des héritiers étant remplacé par la majorité, un décès dans la fratrie a permis d’obtenir cette majorité concernant l’avenir du terrain.

Deux sœurs ont ainsi décidé de vendre le terrain. Un promoteur immobilier était intéressé pour acheter le terrain. Il est venu à la rencontre des habitants. Le contact a été cordial et le petit bout de terrain entre la route et les propriétés voisines n’était pas un problème. Il a même affirmé qu’un compromis de vente avait été signé. Mais celui-ci n’a plus donné signe de vie du jour au lendemain.

Par contre, les deux sœurs sont elles bien arrivées. Durant plusieurs jours, elles ont séjourné dans leur voiture sur le terrain, en attendant le début des travaux pour la construction du mur. Surtout, elles attendaient que Jean-Noël, Julie et le troisième voisin quittent leur domicile pour stationner leur voiture devant leur portail et les empêcher de rentrer avant que le chantier ne démarre.

Les habitants ont bien tenté de discuter pour trouver une solution, mais en vain. Julie a proposé de racheter le bout de terrain devant chez elle, mais les deux sœurs exigent qu’elle rachète l’ensemble du terrain concerné, route incluse. Le chef d’entreprise chargé de bâtir le mur était désolé en découvrant la situation, mais il ne pouvait plus se rétracter sous peine de payer des dommages en cas de résiliation du contrat.

Les deux sœurs ont même exigé que les habitants payent pour faire déplacer les poteaux électriques et l’arrivée d’eau, ce qu’elles ne peuvent pas légalement faire.

Un imbroglio administratif 

Julie a contacté l’assistance juridique de son assurance. Celle-ci lui a expliqué que le terrain n’étant pas divisé, elle n’est pas légalement enclavée puisqu’elle a un accès par la partie où se situe la maison de sa mère. Il en est de même pour les autres. Ayant reçu une mise en demeure de l’avocat des deux sœurs, elle ne peut plus procéder à cette division. Lorsqu’elle a contacté la mairie pour comprendre comment cela a pu se produire, elle s’est entendu dire qu’elle aurait dû se renseigner elle-même avant.

Dorénavant, la vie est devenue un enfer au quotidien. Julie souffre d’une lourde blessure au pied et doit se déplacer en béquille. Elle doit monter et descendre des escaliers pour sortir de chez elle, ou simplement sortir les poubelles. Ils ont dû détruire un escalier de la maison de sa mère afin que sa voiture puisse rentrer dans la cour.

Pour Jean-Noël et sa femme, la situation est également intenable. Ils doivent traverser la maison de sa mère pour accéder à leur logement. Le couple ne peut plus recevoir d’amis. Ils voudraient déménager, mais ils doivent s’occuper de quatre membres de leur famille porteurs de handicaps ou en perte d’autonomie vivant dans la maison d’à côté.

Hier, la municipalité est allée à la rencontre des habitants. Ils ont reconnu que les propriétaires du terrain étaient dans leur droit. De même, ils ont admis qu’il y avait un problème concernant les autorisations données à Julie pour la domiciliation chemin Jean Casimir Perier. La mairie promet de revenir avec solution.

​Contactées par le biais de leur avocat, les héritières n’ont pas souhaité s’exprimer.

*Prénom d’emprunt

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