Des fruits piqués par des insectes. Des troncs ou des feuilles mangés, pillés par des agents pathogènes, c’est le lot de nombreuses cultures de fruits et légumes sous nos tropiques. Mener à terme une culture de fruits ou de légumes est un combat permanent. D’autant plus lorsqu’il doit se faire dans le cadre d’une agriculture respectant l’environnement. Dans cette lutte, les agriculteurs peuvent compter sur les avancées des chercheurs du CIRAD.
Récemment, le panel des moyens de lutte s’est vu étoffer d’une arme ultime et totalement biologique s’il-vous-plaît. J’ai nommé la plante « attractive » ou la « plante piège ». « Le principe consiste à placer en bordure de champs cultivés d’autres plantes qui auront pour rôle d’attirer ses nuisibles », explique Jean-Philippe Deguine, chercheur agroécologue au CIRAD. « C’est même une innovation au niveau européen », affirme-t-il.
Un exemple parmi tant d’autres : disposer des plants de maïs (plante piège) en bordure d’une culture de courgettes jusque-là la proie des insectes indésirables, c’est-à-dire « les mouches de légumes ». Aucun pesticide n’est alors nécessaire.
C’est de toute façon la seule façon de s’inscrire dans un programme d’agriculture biologique. En matière d’engrais cette fois, le marché est inondé d’engrais de synthèse. « A 99% », estime le chercheur, reléguant l’agri-bio à la marginalité. Pourtant, localement, quelques signes sont encourageants. Entre 2010 et 2011, le nombre d’agriculteurs bio a doublé pour passer à 90. La surface va quant à elle être multipliée par 4 en 2012.
L’agriculture bio plus difficile sur une île
Le rôle du CIRAD se limite notamment à celui d’appui scientifique pour la lutte contre les maladies de plantes. « L’essentiel de mon travail est de résoudre les problèmes phyto-sanitaires », reconnaît le chercheur. Il faut dire que le contexte géographique local est particulièrement rude pour qui veut cultiver des fruits et légumes sans pesticides.
« On a une contrainte agronomique forte à la Réunion où il y a une sensibilité aux ravageurs et maladies (à ne pas confondre avec les parasites qui eux sont utiles) », explique Jean-Philippe Deguine. Dans un espace comme une île, les attaques sur les espèces se trouvent être « plus virulentes que dans un milieu tempéré », assure-t-il.
Au bout du compte, un constat s’impose dans le profil-type de l’agriculteur qui ose se lancer dans le bio: « Ce ne sont plus des petits agriculteurs ». Bref, des personnes qui ont décidé de changer de paradigme, passant de l’agriculture conventionnelle au bio ou débutant directement au bio. Les scandales sanitaires ou encore les doutes sur les conséquences sur la santé d’ingestions répétées, même infimes, de pesticides sur les légumes et les fruits ont sans doute contribué à cette prise de conscience.
Le seul moyen d’être sûr de l’origine biologique des produits du commerce est la mention « AB » sur l’emballage, ajoute enfin Jean-Philippe Deguine.