« Il ne viendra pas », pronostique Me Belot, avocat des victimes. Gagné. Bastoine, ce maquilleur au culot d’enfer, ne s’est pas présenté à l’audience. Il attendra donc chez lui, pour peu qu’on le retrouve, que les gendarmes aillent lui passer les menottes, histoire le convoyer délicatement jusqu’à Domenjod.
Le plus simplement du monde
Bastoine, originaire de Koungou, 26 ans, avait trouvé un emploi de comptable dans la société Mécaservices où il était sur un contrat en alternance depuis plusieurs années. Il disposait, de ce fait, du carnet de chèques de cette société, mais pas de la signature : il ne faisait que rédiger.
Tout se passe très bien jusqu’au jour où un autre employé reprend ses fonctions et c’est là que le pot-aux-roses est découvert. Il s’agit de 4 chèques signés par le chef de service pour un montant total de 10.000 euros et des farines. Argent qui n’est jamais arrivé là où il aurait dû atterrir, à savoir chez des fournisseurs. Dans la réalité, grâce à un habile maquillage dont il a le secret, bonhomme a fait verser les montants sur son propre compte.
Le responsable de la société porte plainte et notre homme est aussitôt convoqué à la police où on l’accuse d’avoir détourné un peu plus de 10.000 euros.
Il le prend de très haut, sans doute estimant avoir été atteint dans son honneur et jamais sans doute les policiers n’auront démêlé une affaire d’escroquerie avec autant de célérité. Jamais non plus n’auront-ils eu face à eux un délinquant aussi coopératif :
« Moi ? 10.000 euros ? Jamais ! J’en ai détourné un peu plus de 130.000 ! »
Où est passé l’argent ?
Bastoine explique alors que les 4 premiers chèques faisant l’objet de la plainte de Mécaservices, il les a effectivement détournés. Mais pour les autres, il a tout fait tout seul, lui-même et personnellement, comme un grand. Il a contrefait contrefait la signature du responsable, c’est aussi simple que deux plus deux font cent-trente-mille..
Du coup, la plainte pour détournement de 10.000 euros devient escroquerie d’un montant de 130.000. Devant les enquêteurs, il explique avoir un peu fait la fête avec tout cet argent, notamment à Madagascar.
Ah oui !… il a aussi bu quelques bières à Trois-Bassins » pour se changer les idées « .
Ce gars aussi habile que grossier dans ses escroqueries, a tout perdu car faisant des études de comptable en même temps qu’il travaillait.
Me Belot s’est livré à un rapide petit calcul, trouvant que quelques bières et trois petites fêtes à Mada, cela représentait quelque 15 à 20.000 euros à tout péter. Où est passé le reste, alors ? L’avocat se dit donc persuadé que tout le reste a été placé à Madagascar et réclame une peine exemplaire, en plus des 102.791,68 euros de remboursement réclamés par Mécaservices.
Le procureur avait réclamé 1 an ferme, l’indemnisation des victimes ainsi que l’interdiction d’exercer une profession dans la comptabilité. Le tribunal a suivi ces réquisitions sans sourciller, y ajoutant un mandat d’amener à l’encontre du curieux comptable ainsi que 800 euros de frais divers.