En l’absence d’un des deux accusés pour grippe A, un seul des patrons s’est défendu hier à la barre. C’est suite à une dénonciation que l’affaire éclate. Au mois de février 2007, un employeur mauricien fait venir, à La Réunion, 14 personnes originaires de l’archipel des Chagos, une main d’œuvre qui semble-t-il « rechigne » moins à faire des travaux pénibles car « on a cherché des Réunionnais, on a pas trouvé » se défend le patron qui s’occupe d’une société de travaux de recyclage de matériaux. Hier, il devait donc répondre à un défaut de remise de bulletin de salaire, une « rémunération sans rapport avec un travail accompli » face à une « vulnérabilité et état de dépendance connu » ainsi que des « conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine« .
Voilà ces 14 chagossiens partis pour ce qu’ils imaginaient être une réponse à la misère : « on nous a proposé 900 euros par mois. Je pensais envoyer cet argent à ma famille à Maurice » témoigne l’un d’entre eux. Le président de la cour lui demande: « Est-il vrai que vous deviez vous faire passer pour des touristes?« , la victime répond : « ils nous a demandé de dire qu’on vient comme des touristes au passage de la douane de La Réunion. »
Un autre arrive à la barre. « Un jour je lui ai dit que j’avais faim, il m’a répondu de manger l’herbe« , explique cet homme qui n’arrivera pas à achever son exposé, sous le coup de l’émotion. Son avocat expliquera plus tard dans sa plaidoirie « que cet homme qui s’est mis à pleurer à la barre a quitté Maurice, sa famille et son bébé de 9 jours pour tenter de gagner un peu d’argent » ajoutant que « c’était pour ces Chadossiens, un peuple sans terre dont une partie s’est réfugiée dans les années 70 dans les bidonvilles de Port-Louis, la chance de leur vie quand on sait que le salaire moyen à Maurice est de 150 à 200 euros et qu’on leur promettait là 900 euros par mois. Finalement, ils n’ont gagné guère plus qu’à l’île Maurice là où sont leurs familles« .
Mais pour l’avocat de la Défense, « on est loin d’une situation où ils auraient travaillé sans n’avoir rien perçu« , soulignant l’exagération des médias pour évoquer cette affaire avec des gros titres tels que « l’esclavagiste« . Le procureur de la République, M.Auter, soulignera pour sa part, le mauvais traitement sur les chantiers : « pas d’extincteur, pas de sanitaires, pas de points d’eau » ou encore « l’obligation d’attendre devant le chantier clos que l’on vienne les chercher le soir, des soirs où parfois levés depuis 5 heures du matin, ils terminent à 19 heures« .
Les patrons risquent 12 ans d’emprisonnement avec sursis simple et devront indemniser les victimes. Le délibéré sera rendu le 29 septembre.