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« Si tu parles, j’en finis avec toi »: Le calvaire d’une collégienne obligée de croiser son agresseur tous les jours

Une jeune adolescente de 15 ans se voit contrainte depuis des mois de faire face à son agresseur quotidiennement. Harcelée sexuellement, elle doit continuer à se rendre au collège pour poursuivre sa scolarité mais le jeune homme n’a pour le moment reçu que des sanctions mineures.

Ecrit par zinfos974 – le mardi 29 novembre 2016 à 17H59
Audrey* souffre depuis sa naissance d’une maladie orpheline. Elle est aujourd’hui scolarisée dans un collège du Sud de l’île en classe Ulis (Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire). « Elle adorait son collège fleuri, comme elle l’appelait », témoigne Jean-Pierre*, son père. Mais voilà le comportement d’Audrey change subitement à la fin de l’année scolaire dernière. « Elle pleurait, ne voulait plus prendre le taxi qui vient la déposer au collège tous les matin. J’ai essayé de comprendre ce qui n’allait pas mais elle refusait de parler » se souvient son père.

Elle a peur pour sa petite soeur

Les vacances scolaires passent, et la petite soeur d’Audrey doit elle aussi faire sa rentrée au collège. « Audrey était très inquiète de savoir comment s’était passée la rentrée de sa soeur. Elle lui a demandé si elle s’était faite embêter, puis a éclaté en sanglots. Le lendemain, jour de sa rentrée, elle a refusé d’aller au collège, allant même jusqu’à demander d’aller en établissement spécialisé, chose qu’elle avait toujours refusée jusqu’à présent » se souvient le père.

L’adolescente se confie à sa petite soeur, et un nom surgit. Il s’agit d’un jeune homme, scolarisé dans la même classe qu’Audrey. Jean-Pierre demande alors à rencontrer l’enseignante de sa fille, pour essayer de cerner le problème. Le père de famille est reçu et l’enseignante demande au jeune homme d’assister à la rencontre.

« Est-ce que tu la touches? »

Sous les yeux stupéfaits du père, l’adolescent avoue se « moquer d’elle quand elle marche, quand elle parle ». Selon la déclaration faite plus tard en gendarmerie, il avoue l’obliger à passer ses récréations avec lui, l’isole. Il mange la nourriture de la jeune fille à la cantine, l’oblige à aller jeter ses ordures. C’est alors que l’enseignante lui demande « est-ce que tu la touches? ». Le jeune homme acquiesce. « Je la chatouille, sur la poitrine et sur les fesses. Je la chatouille quand on est en classe, dans le taxi ».

Un prédateur et une victime qui pense au suicide

« Il a tout avoué, il n’a même pas essayé de nier devant sa mère. Je ne sais pas combien de temps ma fille a dû endurer cela » déplore Jean-Pierre. Le père de famille alerte alors la direction du collège. « Ils ont pris la décision d’exclure l’agresseur de ma fille trois jours. C’est, en tout et pour tout la seule mesure qui a été prise contre ce prédateur. Il est totalement conscient de ce qu’il fait. Depuis, c’est ma fille qui en paie les frais. Ses heures de cours ont été réduites et elle doit en permanence être accompagnée. J’ai dû faire des pieds et des mains pour qu’on lui envoie un taxi différent. Mais elle croise son agresseur tous les jours et le vit très mal ».

Malgré le dispositif mis en place, le jeune homme continue à rôder autour de la jeune fille, allant même jusqu’à forcer l’entrée des toilettes pour l’y retrouver. « Selon ma fille, il lui aurait dit: « Si tu parles, j’en finis avec toi » s’alarme le père. Lors de sa déclaration en gendarmerie, l’adolescente confie avoir pensé au suicide.

« J’ai fait confiance au corps enseignant pour que le problème soit résolu. Mais ce n’est toujours pas le cas. Un rapport a été fait mais rien n’a changé » déclare Jean-Pierre, à bout de patience. Le père de famille a même envoyé un courrier décrivant ces agissements au médiateur du Rectorat, rappelant que la lutte contre le harcèlement est une priorité du Ministère de l’Education nationale.

L’indifférence de l’administration

La réponse du médiateur de l’Académie de la Réunion a été la suivante: « Je me dois de vous rappeler que depuis que j’ai eu connaissance de votre requête, j’ai pu échanger avec tous les acteurs concernés par ce dossier préoccupant pour votre enfant et votre famille, mais aussi pour celle de l’autre élève et de sa famille ainsi que pour l’institution.

Il me semble que chacun à sa place vous a apporté des explications et essaie toujours d’oeuvrer pour un retour à une situation apaisée et propice aux conditions d’accueil et de scolarisation d’Audrey et de (nom de l’agresseur, ndlr). (…) L’enquête apportera des conclusions sur les faits à l’origine de cette situation de conflit. Je ne pense pas que le fait de mettre en doute la bonne volonté des uns et des autres puisse faire avancer les choses de manière sereine. (…). »

« Il faut arrêter de minimiser, c’est une agression »

Jean-Pierre, à bout, a déposé une plainte auprès du Procureur de la République. « Pour moi, il y a faute. Ce n’est pas à ma fille, qui est la victime dans cette histoire, de payer pour les agissements de son agresseur. J’ai l’impression que chacun se protège, sans penser aux répercussions que cela pourrait avoir sur Audrey. Il faut arrêter de minimiser, c’est une agression à caractère sexuel, pas une amourette de collégiens, comme cela a été écrit dans les rapports émis sur cette histoire. »

Contacté par la rédaction, le principal du collège n’a pas souhaité s’exprimer, assurant que « le nécessaire a été fait » et « attendre la suite de l’enquête judiciaire ».

*Nom d’emprunt afin de préserver l’anonymat

 

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