Est-il toujours nécessaire de décrire un spectacle jusqu’à le désosser comme un chien affamé ? La question se pose après la performance de Sergio Grondin, auteur de la pièce « Les chiens de Bucarest ». Hier soir au théâtre du Grand Marché, le conteur nous a traînés dans les rues bitumées de la capitale roumaine, où la faucille et le marteau déciment les canidés faméliques.
Hier soir, nous aussi, nous avons fini par détester les taxis, les kebabs, les putes de la ville, par frôler l’asphyxie au milieu des symétries de béton. Attendu un coup de fil et causé à ce chien, le dernier de Bucarest, posté sous la fenêtre. Bu, pleuré, désiré. Bu, gueulé, espéré. Craint, fui, espéré, comme ce survivant quadrupède. Craint, fui, et compris.
Les errances de Sergio Grondin s’infiltrent dans les synapses que l’on croyait tues, incisent les cicatrices de vieilles amours ratées. S’agrippent au palpitant pour venir s’y greffer. Le conteur ne nous impose rien. Il se confie, se confesse, pense à sa femme et à ses fesses. Se noie dans l’ivresse.
Alors nous aussi.