Les forces de l’ordre plus que jamais mobilisées pour faire face au phénomène des cyclomoteurs débridés à La Réunion. Équipés depuis 2014 d’un curvomètre, les policiers de la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP) et les gendarmes de l’Escadron départemental de sécurité routière (EDSR) ont enregistré des chiffres encourageants pour mettre fin aux modifications sur les deux-roues de petite cylindrée.
Le principe du curvomètre est simple : en posant la roue arrière d’un deux-roues sur un appareil comportant deux rouleaux, la machine mesure la vitesse maximale que la moto est capable d’atteindre.
Pour rappel, les cyclomoteurs de 49,9 cm3 ne doivent pas dépasser la vitesse maximale autorisée de 45 km/h. Lors des contrôles effectués par les forces de l’ordre, il n’est pas rare de voir certains scooters débridés afficher une vitesse supérieure à 90 km/h, voire plus dans des cas beaucoup plus extrêmes…
Quand le deux-roues dépasse la vitesse maximale autorisée, une amende 135 euros est dressée à l’encontre de son propriétaire (ou 90 si elle est payée dans les trois jours) et ce dernier a pour obligation de mettre en conformité son cyclomoteur sous un délai de 8 jours.
« Le curvomètre a réellement un effet dissuasif »
Et lorsque le contrevenant décide « d’abandonner » son véhicule, et après autorisation des deux procureurs de la République de Saint-Denis et de Saint-Pierre, le cyclomoteur non-conforme est détruit auprès d’un professionnel agréé. À l’heure actuelle, seulement trois deux-roues ont été détruits depuis 2014 du côté de la gendarmerie et aucun du côté de la police.
Au niveau de la gendarmerie, 523 contrôles de véhicules à deux-roues ont été effectués à La Réunion avec le curvomètre depuis 2014, « qui ont donné lieu à la réalisation de 319 procès-verbaux pour 218 mise en fourrière », nous explique le chef d’escadron Laurent Frutos, commandant de l’EDSR de La Réunion. « Si on fait le détail année par année, on se rend compte qu’en 2014, 130 véhicules sur 191 étaient débridés. En 2015, sur 135 véhicules, nous avons dressé 85 procès-verbaux. À l’heure où je vous parle, sur 197 véhicules contrôlés, nous avons relevé 104 procès-verbaux pour 56 mises en fourrière », nous indique Laurent Frutos.
Pour le militaire, « il y a des véhicules débridés certes, mais avec une puissance moindre », car moins de deux-roues sont placés en fourrière. « On a toujours autant de véhicules qui dépassent les 45 km/h. Par contre, en analysant les chiffres depuis deux ans, on constate qu’en 2014, sur 191 véhicules contrôlés, 97 d’entre eux ont été mis en fourrière. Pour 2016, nous avons eu seulement 56 mises en fourrière ». Preuve selon lui de l’efficacité du dispositif.
Moins de deux-roues débridés placés en fourrière
Un avis partagé par Thierry Dambreville, commandant à l’échelon fonctionnel et chef des unités départementales de La Réunion, englobant la Compagnie départementale d’intervention (CDI), la formation motocycliste, la formation cynophile et le groupe de sécurité routière (DDSP).
Sur les années 2015 et 2016, malgré des contrôles multipliés par deux (137 en 2015 et 236 en 2016) ses équipes ont également enregistré une baisse de véhicules immobilisés (56 en 2015 ; 43 en 2016) ou mis en fourrière (56 en 2015 et 37 en 2016).
« Le curvomètre a réellement un effet dissuasif », affirme Thierry Dambreville, qui prévient que les actions au curvomètre ne vont pas s’arrêter de sitôt…« Nous arrivons maintenant à mieux établir et à harmoniser nos actions sur la voie publique avec nos collègues gendarmes. De plus, les personnels, qui ont pris la mesure de l’outil, connaissent de surcroît les zones où se trouvent le plus de scooters débridés comme sur le boulevard Tamatave au Port ou au Chaudron à certains moments de la journée. Notre action continue et lorsque demain nous serons équipés d’un second curvomètre (policiers et gendarmes se partagent un seul curvomètre dans l’île, ndlr), nous pourrons faire un travail plus assidu avec nos collègues gendarmes, cela portera ses fruits ».
Un « jeu malsain » avec les forces de l’ordre
Pour Thierry Dambreville, les contrevenants ne se rendent pas compte du danger qu’ils font courir à autrui, mais surtout à eux-mêmes. Une attitude qualifiée d’« irresponsable » par le policier, qui « ne peut pas accepter » qu’avec les campagnes de sécurité routière qui sont menées dans les écoles ou à la télévision, « que des personnes, par esprit de provocation et de jeu malsain avec les forces de l’ordre, continuent à circuler avec des deux-roues non-conformes, sans éclairage souvent, et pire, sans aucune protection ».
« Nous avons quand même un nombre important de cyclomoteurs qui sont trafiqués pour pouvoir atteindre des vitesses avoisinant les 80 km/h, voire plus, pour des engins censés ne pas dépasser 45 km/h, avec des dispositifs de freinage ou d’amortisseurs et autre complètement inadaptés à ce type de vitesse… Ils ne se rendent même pas compte des conséquences d’un accident sur un scooter lié à une vitesse inadaptée. L’irrespect total de la moindre règle de sécurité routière peut conduire à la mort », martèle Thierry Dambreville.
Et à l’occasion des fêtes de fin d’année, ce dernier souhaite une réelle prise de conscience des propriétaires de ces deux-roues non-conformes, mais également à l’ensemble des usagers de la route. « Là on parle des cyclomoteurs débridés, mais demain cela pourrait être les piétons qui traversent les voies de circulation de manière irréfléchie. Vous savez, tout n’est pas lié à l’alcool : c’est comportemental. Nous avons tendance à croire que cela arrive uniquement aux autres et on a un sentiment d’impunité de tranquillité…Et non. La route reste dangereuse ».