Revenir à la rubrique : Blog de Pierrot

Qui aura le courage de dire que la canne, c’est fini ?

Les planteurs se battent aujourd’hui pour obtenir 6€ d’augmentation du prix de la tonne de canne. C’est leur droit. Tout juste peut-on regretter que, comme souvent, ils se croient obligés pour faire aboutir leurs revendications, d’empêcher de vivre 850.000 autres Réunionnais. Beaucoup de gens l’ont déjà écrit, mais quitte à bloquer, pourquoi ne paralysent-ils pas […]

Ecrit par zinfos974 – le lundi 10 juillet 2017 à 16H06

Les planteurs se battent aujourd’hui pour obtenir 6€ d’augmentation du prix de la tonne de canne. C’est leur droit. Tout juste peut-on regretter que, comme souvent, ils se croient obligés pour faire aboutir leurs revendications, d’empêcher de vivre 850.000 autres Réunionnais.

Beaucoup de gens l’ont déjà écrit, mais quitte à bloquer, pourquoi ne paralysent-ils pas plutôt la préfecture, les usines de Tereos, le conseil départemental qui a la compétence de la canne, etc…

Difficile de comprendre que ceux-là même qui réclament la solidarité des Réunionnais commencent eux même par ne pas être solidaires de ces mêmes Réunionnais.

Mais surtout, l’heure est peut-être venue de se poser la question complètement taboue à la Réunion : la canne fait-elle encore partie du futur de notre île ?

Qui osera dire quelques vérités pourtant évidentes à nos planteurs ?

1) Il y a surproduction de sucre sur le marché mondial, et surtout ce sucre produit par des pays à bas coûts de main-d’oeuvre comme le Brésil, est vendu bien moins cher que celui produit à La Réunion.

2) Depuis la fin des quotas et des prix garantis, la seule solution pour maintenir les prix de la canne passe par une augmentation significative des subventions de l’État. Autrement dit, il faudrait que les contribuables mettent la main à la poche pour garantir la continuation d’une activité qui n’a pas d’avenir et dont la seule finalité est de venir grossir encore un peu plus les stocks d’une matière première qu’on n’arrive plus à écouler.

Vous ne voyez pas par vous même l’idiotie du raisonnement ?

Ajoutez à cela que la canne est un non-sens écologique. La Réunion produit du sucre qui a vocation à être exporté et donc à consommer beaucoup de CO2 pour être transporté jusqu’en Europe pour y être vendu. Dans le même temps, nous importons des carottes d’Australie, de l’ail d’Inde, des oranges d’Afrique du Sud et des pommes de terre d’Europe, en produisant là aussi du CO2 pour les transporter jusqu’à nous. Et ce ne sont là que quelques exemples. Aujourd’hui, la plus grosse partie de nos fruits et légumes sont importés, alors même que ceux que nous produisons localement sont de bien meilleure qualité. Quiconque a mangé des carottes d’Australie pourra vous le confirmer…

Nous produisons de la canne que nous ne mangeons pas et nous importons tout ce que nous mangeons. L’idiotie du concept ne vous saute pas aux yeux ?

Ajoutons à cela que le sucre est source de diabète et d’obésité, deux maux dont souffre La Réunion, et qu’accessoirement, la canne sert à la production d’alcool, un autre de nos fléaux locaux.

Alors, qu’est ce qui fait que cette évidence ne soit pas prise en compte par nos grands décideurs ?

Est-ce le fait que les cultures vivrières sont peu ou pas subventionnées ? Pas vraiment car ceux qui en plantent s’en sortent plutôt bien financièrement.

Est-ce le fait qu’elles demandent plus de travail que la canne qu’on regarde pousser toute l’année et dont on ne s’occupe réellement que pendant la période de coupe ? Probablement…

Ou que finalement, malgré les cris actuels des planteurs, la canne rapporte suffisamment pour vivre correctement, si l’on en croit les témoignages de nombre d’agriculteurs sur les radios locales ? Probablement aussi…

Un seul argument va dans le sens de la canne : il s’agit d’une plante qui résiste particulièrement bien aux cyclones. Il est vrai qu’après chaque grosse pluie, les légumes de la Réunion se font plus rares. Mais dans le même temps, les prix augmentent fortement et au final, pas sûr que les agriculteurs soient vraiment perdants. Et au pire, ils percevront des subventions pour « calamités agricoles »…

Enfin, dernier argument que l’on entend souvent : si tous les planteurs se mettaient à cultiver des tomates ou des carottes, il y aurait surproduction et les prix s’effondreraient. C’est oublier que la palette de légumes et de fruits à produire pour compenser les importations est immense. Et qu’accessoirement, il existe d’autres cultures que les fruits et légumes.

Témoignages, le journal du PCR qui officiellement soutient les planteurs, a publié le 23 janvier 2016 un article révélant que « c’est la dernière campagne sucrière à Hawaii, un État des États-Unis. La dernière plantation fermera ses portes cette année. Ce sera la fin d’une industrie qui a permis le décollage économique de Hawaii, et qui a également fait venir dans l’archipel des dizaines de milliers d’immigrants pour travailler dans les champs de canne. (…) Mais cette année, c’est fini. Alexander & Baldwin a décidé de fermer la dernière plantation cette année. L’an prochain, les cannes ne seront plus livrées. (…) Une fois la coupe terminée, les 16.000 hectares seront divisés en petites exploitations pour produire des agrocarburants et des cultures vivrières. (…) D’autres productions comme la biomasse, les papayes, les avocats et le taro sont en cours d’expérimentation, et le maire est « très confiant que malgré la mort du sucre de canne, l’agriculture sera encore très vivante ici ». Quant à la direction d’Alexander & Baldwin, elle a expérimenté des plantations de sorgho et d’autres graminées. Si le succès est au rendez-vous, alors ces nouvelles cultures soutiendront la volonté de Hawaii d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et énergétique« .

Le journal du PCR fait la bonne analyse, mais bizarrement, ne reprend pas ces arguments dans ses récents articles sur la couverture de la manifestation des planteurs. Par manque de courage ? Peur de se couper de sa base ?

Aux Etats-Unis, quand une culture ne rapporte plus suffisamment, on l’abandonne et on fait autre chose; En France, on persiste coûte que coûte et on demande des subventions à l’État…

 

Thèmes :
Message fin article

Avez-vous aimé cet article ?

Partagez-le sans tarder sur les réseaux sociaux, abonnez-vous à notre Newsletter,
et restez à l'affût de nos dernières actualités en nous suivant sur Google Actualités.

Pour accéder à nos articles en continu, voici notre flux RSS : https://www.zinfos974.com/feed
Une meilleure expérience de lecture !
nous suggérons l'utilisation de Feedly.

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

Dans la même rubrique

Pierrot Dupuy : Les ennemis de mes ennemis sont mes amis

La question a tourné en boucle sur toutes les radios et toutes les télévisions durant le week-end : Le Rassemblement national est-t-il devenu un parti fréquentable et a-t-il réellement abandonné les idées racistes de son fondateur Jean-Marie Le Pen?

Pierrot Dupuy – Ces salauds de chômeurs

Le patron des Républicains propose rien de moins que de vendre encore plus d’essence et de gasoil. Et cerise sur le gâteau, de le faire payer par ces salauds de chômeurs !