Nombreux sont les internautes qui n’ont pas pu rester insensibles à la publication, ce jour, d’un article sur la problématique requin à la Réunion sur le site internet d’information Slate.fr.
Dans un article intitulé « Comment la crise requin à la Réunion s’est transformée en une crise identitaire » (voir [ici]url:http://www.slate.fr/story/89297/requin-reunion-crise-identitaire ), le site d’actualité dresse un portrait pour le moins caricatural de la Réunion opposant les « blancs » d’un côté et les « Réunionnais » de l’autre, autour de la pratique du surf, tout en usant d’un raccourci réducteur sur l’histoire de notre île, multiculturelle, multiethnique et fragilisée par la colonisation. De quoi faire bondir sur les réseaux sociaux.
Dans l’article, deux camps s’opposent, les « zoreys » et les « créoles« . « Les premiers considèrent les requins comme triplement « coupables » –coupables de la mort de leurs proches, coupables de les empêcher de surfer les vagues parfaites de l’ouest de l’île et coupables de la crise économique qui affecte la Réunion avec la baisse du tourisme. Les deuxièmes ne se sentent pas concernés par cette affaire qui fait de l’ombre à leurs propres problèmes, et notamment les problèmes que rencontrent les agriculteurs réunionnais », peut-on lire.
Nous n’avons pas eu connaissance d’un sentiment exaspéré des membres de la filière agricole, en proie, il est vrai, à une interrogation sur l’avenir de sa filière en 2017, vis-à-vis des surfeurs qui leur feraient de l’ombre…
Des communiqués sortis de leur contexte
Certes les attaques de requin – la plus récente remonte au 22 juillet dernier – alimentent les « tensions » sur les réseaux sociaux. « La dernière attaque du 22 juillet 2014 n’a fait qu’exacerber les tensions racistes et anti surfeurs, et ce, plus particulièrement sur les réseaux sociaux, où les insultes ont fusé envers les surfeurs qui bravent l’interdiction de la baignade« , lit-on dans l’article. Il faut raison garder car celles-ci ne sont le fait que d’une infime frange de la population locale.
De là en faire une généralité et à transformer cette problématique en « crise identitaire » ! Pour appuyer ses dires, l’auteur de cet article s’appuie sur plusieurs communiqués repris et « sortis de leur contexte » de son propre aveu. Tout comme les témoignages qui semblent avoir été pris ici et là sur les réseaux sociaux, pas de quoi faire avancer véritablement le débat.
« Depuis les attaques des squales, toutes les préoccupations de la Réunion convergent vers la crise requin parce que, selon les Réunionnais installés sur les terres depuis longtemps, l’Etat ne daigne qu’écouter les revendications des blancs. La boîte de Pandore de la colonisation semble s’être rouverte: certains créoles craignent que les « zoreys » se réapproprient encore une fois la terre en octroyant un droit supplémentaire – la conquête de l’océan« , explique encore l’auteur.
Un raccourci dangereux
Si la colère affichée des surfeurs face aux décisions de l’État est légitimement retranscrite, aucune parole n’a été donnée aux scientifiques ou à l’État lui-même. Les réunions du CO4R, le programme CHARC, les solutions proposées pour tenter de protéger les spots de surf, l’étude sociologique sur l’approche des Réunionnais face à la mer… Rien de tout cela n’est évoqué. Bien dommage.
Les raccourcis sont même parfois dangereux. « D’autres, emportés dans une folie protectionniste, voient d’un mauvais œil le nombre croissant d’Européens qui s’installent sur l’île, attirés par le climat agréable, l’exotisme et l’emploi facile, en profitant de la fuite de cerveaux locaux qui partent faire leurs études supérieures en métropole, et qui y restent« , peut-on également lire.
Et de conclure que « certains parlent même de « déportation ethnique » ou de « génocide par substitution » (…) pour décrire le remplacement des populations locales par des gens venus d’ailleurs. Dans cette logique, les métropolitains sont vus comme des intrus qui s’installent sur les côtes de l’île et qui, en conséquence, font monter le foncier et le prix des loyers, créant de fait une exclusion sociale et raciale« .