Des jeunes sans histoire, des frères solidaires, issus d’une famille unie, baignés dans un contexte religieux depuis l’enfance… C’est en substance ce qui est ressorti de l’examen de la personnalité des frères Daleton ce matin à la cour d’assises.
Observés en 2007, John et Patrice ont eu à peu près le même parcours. Les deux étaient éducateurs sportifs avant les faits. Ils ont vécu quelques années en Métropole et ont eu une carrière sportive plutôt impressionnante. Très bons joueurs de hockey sur gazon, ils ont dans un premier temps fait sport-études avant d’être sélectionnés en équipe de France. Patrice a même porté 92 fois le maillot tricolore et participé aux championnats du monde.
Johan et Jean-Charles n’ont pas eu les mêmes opportunités. Parcours scolaire chaotique, le second s’est vu interdire la pratique du sport en raison d’un état de santé fragile (il a subi une grosse opération chirurgicale cardiaque dans son enfance). De plus légère constitution que ses frères, il a bénéficié d’une certaine « surprotection familiale ».
D’un point de vue psychologique, le spécialiste a noté chez chacun d’entre eux « une certaine fragilité de la personnalité ». « L’appartenance et l’implication dans le groupe de prière a mené à une obéissance fondée sur la croyance aveugle et la confiance en Juliano Verbard. Enlever l’enfant relevait d’une mission à caractère mystique dont il n’y avait pas lieu de se poser de questions ».
« J’aurai dû réfléchir avant d’agir »
L’expert a relevé chez Patrice Daleton, « une construction de sa propre personnalité autour d’une forte appartenance à sa famille et au groupe. Ce groupe dans lequel il pouvait tenir un vrai discours sur l’importance de la tradition dans la chrétienté ». Le jeune homme lui aurait avoué vivre difficilement le fait que l’Eglise actuelle accepte une évolution des moeurs.
Revenu s’installer dans l’île en 2005 à cause d’une grosse blessure à la hanche due à la pratique sportive intensive, Jean-Loup Roche a expliqué que ce retour lui aurait fait « perdre son statut social et personnel mais retrouver des valeurs auxquelles il était attaché ». Il lui confiera au sujet des faits : « J’aurai dû réfléchir avant d’agir ».
Jean-Charles Daleton, à qui Corinne Michel aurait confié la tâche de l’enlèvement du jeune Alexandre, est celui des cinq qui est le « plus facilement manipulable ». « A partir du moment où il fait confiance, il s’approprie la parole. Il n’a pas le réflexe de questionnement. D’ailleurs, il n’a pas vu lui même les apparitions mais il y croit parce qu’elles lui ont été rapportées par des personnes de confiance ». Paradoxalement, l’expert remarque qu’au moment de l’entretien, le jeune homme a reconnu qu’il a commis une « faute criminelle ».
Altération du discernement
Le bilan psychologique établi par l’expert Jean-Loup Roche complètera celui de son confrère. Pour lui, les frères Daleton n’ont pas de pathologies mentales mais, en raison de leur « besoin de croyance, de leur aveuglement, de la quasi-inexistence d’une capacité d’auto-critique, ils sont tous sujets à une altération du discernement ».
Le Batônnier Georges André Hoarau, défenseur de John Daleton, a saisi l’occasion pour demander si son client avait conscience de mal agir. Réponse du spécialiste : « Il en a peut-être eu conscience à un moment donné mais il n’en a pas tenu compte car il avait mission ».
L’audience a repris à 14h.