Le protocole de Matignon « Acte 2 » a été conclu hier à Paris par Didier Robert en compagnie d’une délégation régionale. Ce protocole prévoit le plan de financement des grands travaux à La Réunion pour ces dix prochaines années. Il se décline en trois volets, celui de la nouvelle route du Littoral, des voies réservées au Trans Eco Express et du développement des deux aéroports de l’île. Concernant le projet le plus conséquent, celui de la route du Littoral, Philippe Berne reste dubitatif, tout comme sur les autres réalisations.
Zinfos974 : Le montage financier de la nouvelle route du Littoral est-il crédible selon vous ?
Philippe Berne : Notre projet devait être lancé dans les mêmes termes, soit en 2013. Simplement, la différence c’est que le projet actuel prévoit une partie digue qui nécessitera, selon moi, des délais supplémentaires car les matériaux nécessaires sont considérables. En 2008, la route du Littoral était estimée à 1,6 milliards d’euros, aujourd’hui on est à 1,7 milliards. Il y a donc une grosse incertitude sur le coût.
Par ailleurs, le projet de Didier Robert prévoit trois voies dans les deux sens avec deux voies du milieu pour le Trans Eco Express. Ceci est une aberration. Nous avons tous en tête ce que nous impose le Grenelle de l’environnement. Alors que celui-ci prône le transport ferroviaire, nous voilà avec un projet du tout voiture qui ne règle pas la question de l’entrée sur Saint-Denis et sur la Possession puisque l’on passera de trois à deux voies.
Concernant le montage financier, il n’est pas prévu de réactualisation financière, ce qui signifie qu’en cas de surcoût, seule la Région devra emprunter pour combler ce manque. Cela revient à dire que ce sont les contribuables qui devront passer à la caisse.
Comment jugez-vous l’initiative de créer un ensemble aéroportuaire combinant Gillot et Pierrefonds ?
L’aéroport de Gillot est financé à 60% par l’Etat, 25% par la Chambre de Commerce et 15% par les collectivités que sont la Région, le Département et la Cinor. On se rend compte que la Région fait, à travers ce financement, un cadeau à l’État. Nous, nous avions privilégié l’investissement plutôt que l’emprunt.
L’Alliance a été très sévère lors de la campagne avec le projet Trans Eco Express. Qu’en est-il maintenant ?
Ce projet est imparfait, il n’y a même pas d’avant-projet. Sa mise en place me laisse perplexe car on touche à la fois à des routes nationales, départementales et communales. A ce même titre, la préparation de l’acquisition du foncier sera un réel souci. On n’est pas prêt de voir les travaux débuter. Didier Robert et son équipe sont juste forts dans la communication.
Le projet Tram Train était-il non-finançable comme le suggère le président de Région ?
Nous, on avait un projet Tram Train qui débutait en 2010. Tout était bouclé financièrement. Cependant, on n’a pas eu la dotation ferroviaire promise par Dominique Bussereau (ndlr : à l’époque Ministre des Transports) et de François Fillon.
Ce qui est grave, c’est que Didier Robert n’a même pas essayé de négocier pour réactiver et donc obtenir cette dotation. Or, un président de Région se doit de trouver les pistes financières avantageuses pour son territoire.
Je pense qu’au-delà du Tram-Train, il entre dans une logique infernale. Je prends l’exemple du prêt d’ordinateurs aux élèves. Prêter un ordinateur c’est bien, mais le contenu n’a pas été discuté par le monde enseignant. Et que dire de l’état des machines au bout de quelques mois, ce sera le gouffre financier assuré.
Pensez-vous réellement qu’il y ait une chance de voir ressurgir le projet Tram-Train dans les prochaines années ?
Le blocage tenait à l’obtention de cette dotation ferroviaire. Un changement de gouvernement dans deux ans, suivi du retour d’une majorité Alliance au Conseil Régional en 2014 pourrait, en effet, réactiver ce projet. Martine Aubry, lors de son passage dans l’île s’était enthousiasmée du retour du rail sur notre territoire, alors on y pense toujours.