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« Phèdre » au Théâtre d’Azur: un pur moment de bonheur!

Le chef-d’oeuvre de Racine est au nombre des grands classiques du répertoire français. Chaque metteur en scène ne s’y attaque qu’avec prudence, à tâtons. Ici, c’est une autre paire de manches, avec un « Phèdre » revu et sévèrement corrigé par François Folio. L’ami François a taillé à grands coups de sabre pour expurger nombre de scènes […]

Ecrit par Jules Bénard – le lundi 30 novembre 2015 à 12H27

Le chef-d’oeuvre de Racine est au nombre des grands classiques du répertoire français. Chaque metteur en scène ne s’y attaque qu’avec prudence, à tâtons. Ici, c’est une autre paire de manches, avec un « Phèdre » revu et sévèrement corrigé par François Folio.

L’ami François a taillé à grands coups de sabre pour expurger nombre de scènes dans lesquelles Racine, piquant sans vergogne dans Shakespeare, donnait à sa pièce un faux-air de « Roméo et Juliette ». Pour n’en conserver que la substantifique moelle. Les acteurs n’en ont que plus de latitude pour donner libre cours à leur talent. Et Dieu sait qu’ils en ont.

Le rôle-titre a été confié à une artiste qu’il est difficile de présenter plus que je ne l’ai déjà fait. Notamment après « Médée ». Raymonde Lucilly, pas bien grosse pourtant, embrasse toute la scène, occupe l’espace avec une robe rouge tranchant sur tout le reste de l’environnement, blanc et brun, ce qui ajoute encore à sa « présence ». Elle « est » Phèdre, femme ne résistant pas à ses sens, maudissant les dieux de l’avoir faite aimante et la poussant inexorablement à devenir amante incestueuse.
C’est du théâtre à l’état pur, la représentation parfaite des tourments infernaux que Racine savait mieux que quiconque insérer dans l’âme (damnée ?) de ses personnages.

Mais avec Raymonde Lucilly, il faut retenir aussi TOUS les autres autour d’elle. Je veux dire qu’il n’y a pas un seul personnage, quelque soit la brièveté de son temps de parole, qui soit un ton en-dessous.

Et d’abord la surprenante Alissa Folio, timide et maléfique araignée tissant sa toile maudite autour de sa maîtresse. Elle entre sur scène comme forcée par le destin et ne la quitte qu’ayant accompli son forfait à petites doses, ayant savamment instillé son poison dans une âme et un corps ne demandant qu’à être convaincus de la beauté du crime. Du grand art.

Richard Cadet et Olivier Folio, Théramène et Hippolyte, victimes désignées d’un drame qui les dépasse, voix forte, présence indiscutable, ne sont pas des faire-valoir, loin de là : ils ne « passent pas » sur la scène ; ils l’occupent, trop peu sans doute mais chaque fois, ils sont saisissants. En voilà deux qui, un jour prochain, auront certainement leur place sur le devant de la scène. On se rappelle d’ailleurs l’étonnante composition d’Olivier dans « Des souris et des hommes », autre adaptation de François Folio.

François Folio, Thésée, nous campe un héros antique loin des canons traditionnels. Le tueur de monstres redevient un homme emporté par le flot de passions qu’il ne domine pas : les coups physiques se parent plus aisément que ceux au moral et aux sentiments.

Il n’est pas jusqu’aux gardes, faisant le pied de grue de chaque côté de la scène tout du long, qui ne parviennent à nous détendre en échangeant des insultes en grec ancien (c’est pas du toc !) en interchangeant les éléments du décor.

Alors… Bien sûr, ça reste du théâtre très classique (on en voit d’ailleurs trop peu souvent) avec les caractéristiques chères au genre. Unité de lieu, etc. Mais l’imagination fantaisiste (mais solide) du metteur en scène fait que l’on reste scotché à son fauteuil durant une heure qui paraît bien courte. Une adaptation qui devient, par le fait, un  retentissant hommage à Racine.

« Phèdre », Théâtre d’Azur, 5 et 12 décembre au Tampon.
Réservations : 0262 27 65 16 / 0693 00 54 88
 

 

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