Le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de la Réunion (CRPMEM) a présenté, ce vendredi, son programme baptisé Cap Requins, avec ses différents partenaires (Etat, Région, mairie de Saint-Paul, ligue de surf, PRR…).
C’est donc dans la « quasi-unité » que ce programme d’expérimentation de pêche ciblée des requins est lancé, si l’on excepte le départ prématuré de l’IRD, qui avait choisi de claquer la porte du programme fin septembre.
Les requins côtiers ciblés, et « uniquement ceux-là »
« Le principe est de tester la faisabilité de certaines techniques de pêches ultra-sélectives et ciblées pour aller pêcher les requins dans les zones côtières, là où ils sont potentiellement dangereux, et uniquement ceux-là« , explique David Guyomard, chargé de mission « Etudes et expérimentations »au CRPMEM.
Ce projet, souligne David Guyomard, est basé sur les connaissances scientifiques actuelles et notamment sur le programme CHARC, qui a permis de mieux connaître l’utilisation des habitats côtiers par les requins bouledogue. Les premières données de l’étude menée par l’IRD ont ainsi établi que très peu de requins marqués restent longtemps dans les zones côtières. On compterait par exemple moins de 10 requins « sédentaires » sur la zone Boucan-Aigrettes. Ce sont donc ces requins que le programme Car Requins souhaitent réguler.
Les Drumlines testées
Deux techniques de pêche à l’hameçon, considérées comme très sélectives, vont être utilisées dans ce programme Cap Requin, sur le territoire de Saint-Paul.
– la palangre de fond : une technique « éprouvée » et jugée très efficace sur les requins bouledogue. Une pratique également « ultra-sélective », qui ne tuerait pas d’autres animaux.
– la « drumline » : c’est une première. Cette technique de pêche va être installée près des côtes et fonctionne en continu (24h/24).
Dans un premier temps, le programme Cap Requins prévoit une phase pilote de test expérimental des deux dispositifs en baie de Saint-Paul.
« On va commencer par installer des drumlines, qui sont des lignes appâtées dans une zone éloignée des activités nautiques en baie de Saint-Paul, au nord de l’Etang », ajoute David Guyomard. Quatre drumlines vont être installées sur ce site pilote, qui pourra également être utilisé pour d’autres expérimentations (comme les produits Tecknisolar, par exemple, ndlr).
L’idée est de tester l’efficacité de ce dispositif pour voir si il peut être applicable, à terme pour sécuriser des sites comme Boucan Canot ou les Roches Nores. Pendant cette phase pilote, des drumlines appâtées et sans appât seront successivement testées. Les acteurs du Cap Requins souhaitent « se donner du temps » et la phase pilote devrait ainsi durer six mois, au moins. Le site pilote choisi, situé au nord de l’Etang Saint-Paul, dispose déjà d’une station d’écoutes fixée dans le cadre du programme CHARC.
Un programme « encadré scientifiquement »
Pour valider ou non ces deux techniques de pêches, le CRPMEM va s’appuyer sur l’encadrement scientifique du Kwazulu-Natal Sharks Board (KZNSB), basé en Afrique du Sud, et sur un comité de pilotage scientifique de cinq membres, dont on ne connaît pas encore les noms. « Nous avons obtenu l’accord de principe de plusieurs scientifiques de renoms », a souligné Chantal Ambroise, la sous-préfète de Saint-Paul. La sous-préfète a également souligné que l’IRD « participera au suivi » du programme Cap Requins, sans en préciser sous quelle forme.
Après la phase pilote, et si celle-ci s’avère concluante, les dispositifs de pêche seront testés en milieu récifal et coralien, dans le périmètre de la réserve Marine, à plus de 400 mètres des côtes.
Enfin, la phase opérationnelle correspondra à l’application des dispositifs en présence d’activités nautiques sur le territoire de la commune de Saint-Paul. Le but est ainsi d’utiliser les palangres de fond et les drumlines de manière simultanée pour sécuriser au mieux les activités nautiques à Saint-Paul.
50% des requins prélevés, 50% des requins marqués
Reste la question des prélèvements. On l’a compris, le CRPMEM insiste sur le fait que ce sont des pêches « très ciblées ». 50% des requins capturés via ces techniques de pêche seront prélevés dans le cadre du dispositif « Ciguatera 2 ». Et 50% des requins capturés seront marqués.
L’objectif très ambitieux du programme Cap Requin est d’arriver à ne capturer que des requins, et pas d’autres espèces, afin de ne pas impacter le programme CHARC ni l’écosystème côtier.
Pour Chantal Ambroise, c’est « la concrétisation d’un projet mis en place depuis six mois. Tout cela (Cap requins) va prendre du temps. Je sais qu’il y a beaucoup d’impatience dans ce dossier. L’objectif principal est d’éloigner les requins de la côte et d’éviter ainsi les accidents« .
La première sortie en mer est prévue pour la semaine prochaine, en utilisant la technique de la palangre de fond. Avec pour objectif de prélever ou de marquer des requins bouledogue de préférence (s’il s’agit d’un requin tigre, il sera également prélevé ou marqué). Dans le même temps, le CRPMEM va recruter un coordinateur des drumlines. Celles-ci devraient être installées sous quinzaine en baie de Saint-Paul.