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Moi, Claude, prostitué, drogué… et mal considéré

Cela rappelle un film et c’est ainsi que pourrait débuter ce courrier. Celui d’un « chef d’entreprise » ayant grandi dans une famille pauvre, où l’oisiveté n’avait pas sa place et où l’effort et l’amour du travail n’était pas seulement des qualités, mais s’apparentaient plutôt à une obligation de faire.   Il y a quelques […]

Ecrit par zinfos974 – le vendredi 25 octobre 2013 à 15H59
Cela rappelle un film et c’est ainsi que pourrait débuter ce courrier. Celui d’un « chef d’entreprise » ayant grandi dans une famille pauvre, où l’oisiveté n’avait pas sa place et où l’effort et l’amour du travail n’était pas seulement des qualités, mais s’apparentaient plutôt à une obligation de faire.
 
Il y a quelques années, alors encore salarié de l’entreprise la plus grande de France, je décidais de créer ma « boîte » comme on dit. Un besoin pressant de liberté de parole, de renvoyer un certain ascenseur aussi, aux français contribuables, qui pendant des années m’avait permis de vivre décemment. Je décidais à mon tour de voler de mes propres ailes et d’essayer de donner du travail à ceux qui n’en avait pas. Pour financer ce projet, que mes collègues de l’époque qualifiaient de « fou », je vendais tous les biens que j’avais acquis en vue de ma prochaine retraite. 
 
Amoureux du travail, célibataire, sans aucune charge familiale, je ne me voyais pas à l’assaut des musées, devenir le roi du jardinage ou simplement profiter d’une retraite, parait-il, toujours bien méritée. J’étais un drogué du travail. Je pensais pouvoir allier cette dépendance à mon envie d’émancipation professionnelle et ce désir de prouver qu’il existe aussi une vie dans le privé. Intimement persuadé également, qu’il était de mon devoir de prendre une part plus active au redressement national de notre économie. 
 
Certains paramètres m’avaient cependant échappés. Bien sûr, quelques « collègues », moins torturés psychologiquement et professionnellement que moi, assurément plus égoïstes aussi, avaient tenté de me dissuader de l’entreprise. Il fallait, c’était acquis pour eux, être fou, pour oser quitter la « plus grande entreprise de France », cocon ô combien rassurant, et vouloir créer son entreprise dans le privé. Pour eux, la voie était toute tracée. C’était celle de la retraite à 50 ans, voire 55 ans, pour disaient-ils, enfin profiter de la vie. Pour moi, la vie ne semblait que commencer et la retraite dont il parlait ne me disait rien qui vaille. Je n’ai jamais compris pourquoi en France, les fonctionnaires craignaient autant la vie et le travail dans le privé. Quand on croit en soi, tout vous est permis et le monde vous appartient. Enfin,… je le croyais.
 
Je compris vite que du statut de « drogué » du travail, quand on est entrepreneur, on passe dans l’hexagone et à la Réunion, plus rapidement encore, à celui de « prostitué » de l’Etat. Une position ambiguë de « welfare state » envers l’entreprise, ressemblant fortement à la relation qu’il entretient juridiquement avec la prostitution. Nous vivons dans un pays, où la création d’entreprise est un long parcours semé d’embûches. Tout vous est rendu difficile lorsque vous souhaitez aider l’économie de votre pays, par patriotisme certainement… 
Ici, surtout à la Réunion, pas de « MITI » local, comme au Japon, la chambre consulaire n’apparaissant que comme une chambre d’enregistrement de vos cotisations annuelles, pour si peu ou pas grand chose en retour, si ce n’est leur visite intéressée à l’occasion des élections. 
 
La France est un pays où le « chef d’entreprise » est perçu dès le départ comme un fraudeur, voire même un voleur en puissance par les autorités. On se méfie de vous et vous faites simultanément l’objet de toutes les convoitises. Vous focalisez sur vous les jalousies de tous ceux qui n’ont pas osé franchir le pas de la création d’entreprise (pour certains avec raison…). L’on vous congratule pour votre audace, mais on aimerait que vous sombriez, car en France, on n’aime pas ceux qui réussissent.
 
C’est vous dire le respect qu’ont nos institutions locales et ceux qui y travaillent, pour des individus qui ne comptent pas leurs heures au quotidien et la plupart du temps au détriment de leur vie familiale. A la Réunion, les PME/PMI et TPME/TPMI représentent plus de 75% de notre tissu économique local. Posez-vous la question de savoir pourquoi il y a si peu de chefs d’entreprises en politique sur notre île.
 
Chargé financièrement et socialement par les collectivités locales, le chef d’entreprise, l’est encore plus par un Etat obèse, fonctionnarisé à outrance, qui aujourd’hui, force est de le constater, navigue à vue. Le chef d’entreprise, collecteur d’impôts malgré lui au travers de la TVA, subit de plein fouet, l’augmentation des charges lui étant imputables (prélèvements sociaux, RDS, CSG, taxes diverses et d’autres encore à venir…).
Bien souvent enclin à vouloir rémunérer davantage ses bons éléments, il ne peut cependant le faire forcément, sans avoir a également pâtir de sa bonne volonté et de ses remerciements aux employés méritants. A cet égard, défiscaliser davantage les augmentations de salaires et les primes consenties aux salariés par l’entreprise, serait une solution pour favoriser une relance « keynesienne » de notre économie locale.
 
Là ne s’arrête pas cependant le « blues du bussinessman ». en effet, il est majoritairement impossible pour lui d’avoir accès au crédit, voire même aujourd’hui, à une facilité de caisse de la part des banques réunionnaises. Alors, qu’un simple « Rmiste » a droit à un certain découvert, le chef d’entreprise n’a droit bien souvent à rien ! 
 
Du côté de sa protection sociale, sans parler du système des caisses de retraites obligatoires, qu’il doit intégralement financer pour ne recevoir de leur part qu’une aumône, le chef d’entreprise est bien souvent assuré socialement au minimum. Voit-on d’ailleurs souvent des chefs d’entreprise en arrêt maladie ? Il est juridiquement bien moins protégé que ses salariés, assujettis à la sécurité sociale, acquittée pour eux d’ailleurs en partie, par le chef d’entreprise lui-même. Ses salariés, étant eux-mêmes encore moins protégés, il faut le dire, qu’un simple clandestin, qui perçoit en France, environ 3857 euros par personne et par an au titre de l’aide Médicale d’Etat (AME). Ainsi, quand vous êtes clandestins, donc hors la loi, et assistés à outrance, vous êtes remboursés à 100 %. Quand vous faites l’effort de vous régulariser,  vous l’êtes à 80 %, et quand vous êtes Français, vous l’êtes, pour l’instant encore, à 70 %, mais jusqu’à quand ? Vous devez vous acquitter cependant d’une mutuelle. Cherchez l’erreur !…Pour le chef d’entreprise c’est toujours la débrouille.
 
Le constat ne résiste donc pas à l’analyse. Mauvaise image de chef d’entreprise,  considéré en France comme un délinquant en puissance, pressé comme un citron par les services sociaux et fiscaux de l’Etat et des collectivité locales, collecteur d’impôts malgré lui, pas d’octroi de crédit possible en banque, assurances sociales et caisses de retraites onéreuses, un Régime Social des Indépendants (RSI) rapide dans ses prélèvements, tatillon et lents dans ses menus remboursements, contrôles de la CGSS et redressements financiers fréquents, vie de famille quasi-impossible. Pour favoriser un véritable plan « MARSHALL » de notre économie, il conviendrait enfin de donner, un véritable statut au chef d’entreprise. Cela permettrait assurément de créer des vocations et de l’emploi. Mais, on n’aime pas les entreprises en France. Même plus le travail d’ailleurs.
 
Et l’on voudrait que notre pays se redresse et que l’économie reparte  avec de telles conditions ?…. A bien y réfléchir, j’aurais peut-être dû adopter, moi aussi, comme mes collègues, une attitude égoïste, observer mon pays sombrer, conserver mon patrimoine, et rester salarié…Et tant pis pour la France !
Marc LEWITT
 
(Toute Ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé n’est pas une pure coïncidence…)

 

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