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Maladie de Lyme: Un Possessionnais diagnostiqué 20 ans après sa contamination en métropole

Fatigue chronique, problèmes de mémoire, douleurs articulaires, plaques cutanées, voire dépression... Les patients réunionnais qui souffrent de la maladie de Lyme ne le savent pas toujours. Et pour cause : les Réunionnais qui voyagent en métropole, ou plus globalement en Europe ou aux Etats-Unis, peuvent la contracter mais ne voir les symptômes apparaître que des années plus tard. Le lien entre les deux événements est alors compliqué à établir. Le point sur cette pathologie avec le docteur Camuset.

Ecrit par zinfos974 – le lundi 14 mars 2016 à 11H26
Elle passe souvent inaperçue. Il y a quelques semaines, la maladie de Lyme (aussi appelée borréliose de Lyme) a été diagnostiquée chez un Possessionnais de 66 ans.  Une maladie qu’il portait en lui sans le savoir depuis une vingtaine d’années, liée à une morsure de tique, contractée en métropole…

Non détectée dans sa phase primaire, la pathologie a continué à se développer jusqu’à atteindre la troisième phase. Douleurs articulaires, problèmes de fatigue chronique, de mémoire, de concentration, douleurs neurologiques, voire dépression… Plus la maladie avance, moins les signes sont spécifiques et des malades peuvent ainsi vivre de nombreuses années sans savoir quelle est la cause de leurs problèmes. Le diagnostic n’étant pas toujours établi rapidement, un déni médical est d’ailleurs reproché par certaines associations.

Mais si elle est encore trop peu connue, elle n’est pourtant pas rare. Chaque année, en France, 27 000 cas sont détectés, selon le ministère de la Santé. Un chiffre qui ne comprend pas ceux qui en sont porteurs sans le savoir.

Contactée, l’Agence Régionale de Santé Océan Indien affirme que tous les cas recensés à La Réunion sont importés, la tique transmettant la bactérie n’étant pas présente sur notre île. Les Réunionnais qui l’attrapent la contractent donc au cours d’un séjour en métropole ou à l’étranger. 

Le point sur cette maladie, ses symptômes et son traitement avec le Docteur Guillaume Camuset, praticien au service des maladies infectieuses du CHU de Saint-Pierre.

 

Comment s’attrape la maladie de Lyme?

Dr Guillaume Camuset : Cette maladie se transmet par des morsures de tiques (qui sont de petits arthropodes qui se fixent sur la peau et se nourrissent de sang) et pouvant rester plus de 24 heures. L’arthropode, qui transmet une bactérie nommée Borrelia, se trouve dans les forêts.

La tique vectrice de la bactérie n’est pas présente à la Réunion mais on peut se faire mordre lors de séjours en France (partout en métropole mais particulièrement en Alsace, dans les Vosges, ou en Lorraine), même plus largement en Europe, aux Etats-Unis… La tique attrape la bactérie sur les animaux comme le cerf, avant de la retransmettre à l’homme.

Quels sont les symptômes ?

Le premier à repérer est un érythème migrant, c’est-à-dire une rougeur qui va se développer à partir de l’endroit où la tique a piqué. La tâche rouge va ensuite grandir de façon concentrique, pouvant aller jusqu’à 15 cm de diamètre. Dans ce cas, on est sûr à 100% qu’il s’agit de la maladie de Lyme, dans la phase primaire. Attention toutefois, ce symptôme peut passer inaperçu. L’érythème peut être sous le bras, dans les parties génitales… Et au bout d’un moment il disparaît, ce qui explique que le patient ne soit pas au courant qu’il a contracté une maladie.

Si elle n’est pas prise en charge en phase 1, la maladie passe à la phase secondaire. Les symptômes sont cette fois des douleurs articulaires, de l’arthralgie, voire même des arthrites (une articulation qui se met à gonfler). Cette phase se déclenche de quelques mois à quelques années après piqûre.

Enfin, il y a la phase tertiaire qui consiste en des douleurs diffuses dans le corps, des problèmes de fatigue chronique, des douleurs neurologiques, parfois des courants électriques, des sensations de fourmillements,  voire une méningite. On peut envisager aussi la dépression, mais on est moins sûr que ce soit lié, tout comme les acouphènes.

On peut également noter des douleurs comme des sciatiques mais sur plusieurs trajets nerveux. Les patients peuvent également présenter des signes cutanés, des plaques d’atrophie de la peau qui se colorent en violet. En général cette phase se déclenche au moins une dizaine d’années après. Ça peut être très invalidant. Certains ont parfois de telles douleurs qu’ils ne peuvent plus faire de sport. C’est bien plus rare, mais il peut aussi y avoir des atteintes cardiaques. 

Pour résumer, les trois phases causent les symptômes suivants : d’abord la peau, ensuite les articulations, et enfin des troubles neurologiques. Les symptômes peuvent être faibles, ce qui explique que ça prenne parfois du temps pour la détecter. Plus le temps passe, moins les signes sont spécifiques.

Comment cela se traite ?

La maladie se traite par traitement antibiotique. En phase 1, on prescrit de l’amoxicilline pendant 15 jours. Il s’agit d’un médicament régulièrement donné pour d’autres cas. Pour les autres phases, il s’agira d’un traitement antibiotique plus long.

Est-ce fréquent de diagnostiquer la maladie de Lyme sur notre île et les médecins y sont-ils préparés ?

A la Réunion, il est peu fréquent de diagnostiquer cette maladie. Certaines personnes se font d’ailleurs mordre en métropole et se font diagnostiquer durant leur séjour. Mais si la maladie est peu fréquente ici, beaucoup de médecins ont été formés en métropole et ont la connaissance. Et au vu des symptômes, on finit généralement par y penser.

Pour ma part, j’ai eu l’occasion de soigner il y a quelques années une dame qui venait de Strasbourg, qui avait une forme tertiaire. En ce moment, j’ai un patient qui vient de la région de Rambouillet pour qui on suspecte également cette maladie, mais nous n’en sommes pas sûrs.

Quels sont les tests qui existent pour établir le diagnostic ?

Il y a le test Elisa. Mais le problème c’est que même quand on est guéri, le test peut rester positif. Or, il est possible qu’un patient ait été traité dix ans plus tôt sans forcément le savoir. Le fait que le test soit positif ne veut pas forcément dire que ses symptômes sont liés à cette maladie, ils peuvent être liés à d’autres maladies comme la polyarthrite rhumatoïde par exemple. Plus on avance dans le temps, moins on est sûr. Il y a aussi le test de Western Blot, qui est plus précis que le test Elisa. C’est un test complémentaire, c’est-à-dire que si Elisa est positif, alors on fait un Western Blot pour être sûr du diagnostic.
 
Peut-on se faire traiter à la Réunion ?

Les antibiotiques pour traiter la maladie de Lyme sont disponibles à la Réunion. Mais le problème reste que parfois, malgré les antibiotiques, les douleurs ne disparaissent pas complètement. Dans ce cas-là, on est bloqué et les patients se tournent vers d’autres soins en métropole ou en Allemagne. Mais il n’y a rien encore de bien établi. Ce sont des protocoles qui restent un peu expérimentaux. Certains cas sont difficiles à soigner ici comme en métropole. Et plus c’est diagnostiqué tard, plus c’est difficile à traiter.

Avez-vous des conseils à donner pour éviter de passer à côté du diagnostic de cette maladie ?

Les consignes que je donne, à ceux qui vont en forêt, est de faire très attention aux tiques. Ils doivent en rentrant vérifier toutes les parties de leur corps.  Les tiques aiment les endroits chauds et humides (aisselles, parties génitales…). Si une tique est accrochée, il faut la retirer à l’aide d’une pince, sans casser la tête, en dévissant. Il faut ensuite vérifier qu’il n y a pas de tâches rouges. S’il y en a, il faut consulter. Si on fait ça, on peut la traiter rapidement et il n’y aura pas de problème. 

 

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