Revenir à la rubrique : Courrier des lecteurs

Lettre ouverte à mon député Tartempion

Monsieur le député, Après avoir gardé mes vaches, j’ai eu l’honneur de battre (la) campagne pour toi avec le succès que tu connais. Je ne demande rien en retour, pas même un strapontin, contrairement à ceux qui gravitent autour de toi et qui veulent le beurre et l’argent du beurre. Je veux seulement te dire […]

Ecrit par Gérard Jeanneau – le jeudi 24 décembre 2015 à 16H44

Monsieur le député,

Après avoir gardé mes vaches, j’ai eu l’honneur de battre (la) campagne pour toi avec le succès que tu connais.

Je ne demande rien en retour, pas même un strapontin, contrairement à ceux qui gravitent autour de toi et qui veulent le beurre et l’argent du beurre. Je veux seulement te dire tout ce que je pense, avec la plus grande franchise, avec mes gros sabots, sans circonlocution, histoire de pouvoir un jour, par tes soins attentifs, auréoler un peu mieux Dame Mariane qui porte actuellement chez nous des vêtements bien trop délavés, bien trop froissés. Et cela dans un Etat de droit, qui ne va pas bien droit.

Horribile dictu ! dirait Cicéron, mon grand ami, mais l’ennemi juré d’une certaine Belkacem. J’en ai très gros sur le coeur. Lis attentivement mes doléances. Je te les fais parvenir par internet : plus besoin de cahier de doléances ! Je suis de mon temps et pardonne-moi si, d’un paragraphe à l’autre, je passe du coq à l’âne.

Tout récemment, tu as crié au scandale : trop d’abstentionnistes ! Mais réfléchis un peu pour une fois : tu es un pyromane qui crie au feu ! L’électeur qui se déplace pour voter blanc constate que son bulletin n’est pas comptabilisé parmi les suffrages exprimés. Et pourtant son vote exprime quelque chose : on montre soit qu’on ne vote ni pour la peste ni pour le choléra, soit qu’on délivre un message de protestation.

Cet électeur s’est pourtant bien exprimé et tu le frappes d’ostracisme, pour ainsi dire; son bulletin compte pour du beurre; il va tout droit dans la poubelle de la pauvre Marianne. Et beaucoup d’abstentionnistes aimeraient bien faire entendre leur voix; mais tu leur coupes l’herbe sous le pied.

Actuellement, grâce à ta loi, celui qui veut protester en utilisant l’urne – presque funèbre – n’a plus d’autre recours que de voter pour Marine Le Pen ou pour Mélenchon. Après, tu vas pleurer comme une madeleine dans ta chaumière en criant : le FN est le premier parti de France. Mais en réalité, le premier parti, c’est l’abstention.

Ouvre out cannette, te dirait un bon Créole. Le remède est simple : considérer le vote blanc comme un vote normal; et des abstentionnistes viendront enfin voter, sachant qu’ils peuvent exprimer quelque chose !

Si, comme je l’entends, tu refais les calculs des dernières élections de ma patrie d’adoption, tu constateras que Didier Robert a été élu par moins de 10% des Réunionnais en âge de voter et, fort de cette infâme légalité, il nous fait avaler ses couleuvres, entre autres, une NRL en pleine mer, au bas mot, à 2 milliards d’euros. Au bas mot ou aux bas maux, c’est au choix. Et pour cela, il met à sac ma patrie d’adoption : des carrières ouvertes partout dans mon île adorée. Ça me fend le coeur, dirait Pagnol s’il voyait le pillage. Et mon Didier-péi, le Didier 10% des cocotiers, en est plus fier qu’un paon. Je te le jure, il va finir par faire la roue !

Députés et sénateurs – nos nouveaux seigneurs – votent leur propre budget, ce qui leur permet de se ménager, entre autres, une retraite en or; et pour les malheureux qui perdent leur mandat, c’est un parachute doré qui les attend ! On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. Raboter tout cela de 10%, ce serait participer à l’effort national. Il faut cesser de jouer aux seigneurs. Tu me diras – car tu ne manques pas de bagout – que c’est entériné par le Conseil d’Etat; mais du tac au tac, je te pose la question : « Mais qui donc a élu ces personnages-là et que faisaient-ils auparavant ? » J’attends ta réponse. Et tu remarqueras que tu rabotes sans pitié la plèbe alors que chez toi, c’est le contraire, les indemnités des seigneurs provinciaux ont tendance à augmenter dans la France d’en bas. Deux poids, deux mesures. Et l’actuel suzerain de l’Elysée, le pauvre, s’était promis de supprimer les inégalités. Je ne savais pas qu’il savait manier l’antiphrase ! Maintenant, j’ai compris : c’est pour le jour où mes poules auront des dents.

Députés et sénateurs se votent une IRFM (indemnité représentative de frais de mandat) : plus de 6000 euros par mois, somme non imposable, qu’ils redistribuent auprès d’associations ou autres, moyennant retour de l’ascenseur, selon le bon adage : « Je t’arrose, tu m’arroses (en faisant voter pour moi) !  » On sait entretenir sa clientèle, comme au temps de Cicéron. Le remède à cette perversité : il faut la verser intégralement pour la lutte anti-terroriste, pour la protection de tous les Français, blancs, noirs et jaunes – à vrai dire, les blancs à qui j’ai donné la priorité seront moins nombreux au fil des années. Plus tard, pour faire plaisir au CRAN, il faudra inverser : noirs, jaunes et blancs.

Les élus nationaux ou non ont la fâcheuse tendance à cumuler. Il faut calmer la voracité de ces pilleurs de notre pauvre Etat. On a fait un petit effort; on a écrêté, mais si peu que rien. Je salue cet effort laborieux mais la perversité transparaît encore. Le plus simple, c’est de n’accorder qu’une seule indemnité pour un seul mandat, les autres mandats étant assurés gracieusement. Il faut suivre dame Nature : j’ai constaté, dans mon pré, qu’un veau ne peut pas téter deux vaches à la fois.

Des élus nationaux ou non sont passés sous les fourches caudines de dame Justice; ils ont été condamnés comme pilleurs de nos deniers publics. Et ces truands exercent encore leur talent, alors qu’un fonctionnaire qui n’a plus son casier judiciaire vierge est radié d’office et à vie. Ne soyez pas plus truands que les truands. Je suis pour la même justice pour tous : un candidat à une élection doit présenter un casier judiciaire vierge. Pour le moment, on continue à faire un joli bras d’honneur à dame Justice ! Quousque abutere patientia nostra ? dirait encore mon ami Cicéron.

Avec tes compères et commères, fais en sorte que, dans notre pauvre république, vous, vous ne soyez plus de fieffés larrons et que nous, grâce à vous, nous cessions enfin d’être vos dindons farcis après avoir été soigneusement plumés.

Au travail et, comme dit le bon Créole de mon entouraze, ouvre out cannette et bouze ton fesse.

En caressant ce bel espoir, je te prierais d’agréer, monsieur le député, l’expression très respectueuse de ma très haute considération.

Gérard Jeanneau à Gières

 

Thèmes :
Message fin article

Avez-vous aimé cet article ?

Partagez-le sans tarder sur les réseaux sociaux, abonnez-vous à notre Newsletter,
et restez à l'affût de nos dernières actualités en nous suivant sur Google Actualités.

Pour accéder à nos articles en continu, voici notre flux RSS : https://www.zinfos974.com/feed
Une meilleure expérience de lecture !
nous suggérons l'utilisation de Feedly.

S’abonner
Notification pour
0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires

Dans la même rubrique

Des bas-bleus au centenaire d’une « aiguille mesurant l’espace » : Reflet d’un amour des lettres et des industries créatives

Avez-vous déjà entendu parler du Bas-bleuisme ? Un mouvement de femme de lettres mais aussi de réformatrices sociales, mécènes, salonnières, critiques littéraires et enfin membres influentes de la société éponyme des bas-bleus. Leur héritage laisse aux générations futures une esthétique littéraire pleine d’aspiration, au même titre que des œuvres d’art originales, ainsi que des tissus et des designs, reflétant l’amour de femmes leaders pour l’artisanat de qualité et l’industrie du futur.