Ils étaient plus d’une soixantaine hier à la Rivière-des-Galets, au Port, venus dire à la presse leur détresse, leur désespoir et leur espoir.
La détresse, ce sont ces quatorze années qui ont suivi leur éviction du capital de la Coopérative ouvrière de La Réunion, fondée en 1992 par Paul Vergès, actuel président de la Région Réunion et par deux cent vingt-six dockers.
“Paul Vergès l’est venu voir à nous, li l’a dit à nous, la COR sera le meilleur outil pour travailler, ce sera comme notre maison”. Ainsi la loi sur la mensualisation du travail des dockers, appliquée à partir du 1er août 1994, est passée sans dégâts.
Une fois cette loi entrée en application, Jacques Virin qui a succédé à Michel Dioflar au poste de directeur, a évincé deux cent quatre dockers associés, à l’issue d’un conseil d’administration. Une performance exceptionnelle réalisée au vu et au su de tous, qui n’a ému ni le syndicat CGTR Ports et Docks, ni les caciques du PCR ou d’un quelconque parti politique d’ailleurs.
Un directeur qui vire deux cents quatre dockers associés, du capital de leur société en leur envoyant un chèque de 2 000 francs, à l’époque, pour racheter leurs parts sociales, sans que cela n’offusque personne, c’est sans doute unique dans les annales. “C’était ça not désespoir. Personne i voulait parle de cette injustice, not’ syndicat l’avait lâche à nous. Beaucoup parmi nous i gagne ni lire, ni écrire”.
C’est également au cours de ce conseil d’administration mémorable, et sans convocation préalable, que “le directeur Jacques Virin a nommé Jacques Virin, président directeur général de la COR”. Jean-Bernard Gaillac et la plupart des dockers n’appréciaient ni l’ancien directeur, ni le nouveau PDG.
“C’était surtout ses méthodes”. Jean-Bernard Gaillac a aussi attaqué Jacques Virin sur sa gestion. Dans un courrier à la Confédération générale des Scop, le docker dénonçait le climat détestable pour les dockers. Quelques jours plus tard, Virin l’a viré, lui aussi.
Il est vrai aussi qu’il réclamait avec insistance les documents comptables de la COR. Une décision du tribunal de commerce lui a donné raison. Jean-Bernard Gaillac et la première centaine de dockers du collectif espèrent que la Commission d’arbitrage de la Confédération générale des Scop, leur donnera raison, mardi prochain.
“Ce sera un élément important pour les autres actions en justice et ce pour réclamer trois millions d’euros pour la première centaine de dockers. Ce chiffre sera revu à la hausse si nécessaire lorsque la justice nous permettra d’avoir accès aux documents administratifs et comptables de la COR. Mais cette fois-ci, nous demanderons réparation pour les deux cent quatre dockers”, précise Jean-Bernard Gaillac, porte-parole du collectif.
Et, les dockers semblent déterminés. “Nous l’est prêt à bloque le port s’il le faut. Faut pas band la, i oublie que nous l’a été à bonne école. C’est zot que la forme à nous”, explique un docker. “Maintenant, nous sa bataille pou nous, pou nout famille. Et ce ne sera que justice…”